Le Père Jean-Côme About commente l'Évangile selon saint Luc (18, 1-8) de ce 29e dimanche
du temps ordinaire.
« Le Fils de
l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur terre ? » Cette question de
Jésus a de quoi nous faire frémir, en ce vingt neuvième dimanche du temps ordinaire,
car elle semble indiquer l’inquiétude du Fils de Dieu quand à la transmission de la
foi qu’il initie récemment dans sa mission. Jésus douterait-il de l’homme ? Dans
notre monde occidental, on pourrait croire que cette question s’applique parfaitement
: l’impression d’une perte de foi semble galopante, l’indifférence se veut être le
politiquement correct et l’attaque du religieux devient un jeu célébrant sa fin. Mais
sommes-nous dans une époque et une mentalité si différentes de celles du Christ ?
Ce serait oublier ce monde multi-païen dans lequel il évolue, cette opposition de
tout instant de ses compatriotes dans la foi et le nombre ridicule de ceux qui le
suivent. Non, cette question se situe dans le contexte de l’évangile de ces derniers
dimanches centrés sur la conversion, et cette troublante question s’inscrit dans la
pédagogie stimulante de Jésus. Irions-nous jusqu’à oublier le message de Dieu, nous
qui croyons ? Alors soyons responsables et redoublons de fidélité et d’audace. Tel
est le combat de la veuve de l’évangile, face au juge inique. Dès le départ, elle
se trouve en situation d’infériorité : veuve, sans aucun statut juridique et en situation
de double injustice puisqu’elle se trouve plaignante dans une situation qui doit lui
rendre justice et le juge refuse d’exercer son devoir envers elle. Le juge étant en
plus vénal, elle ne peut même pas l’amadouer par un cadeau à cause de sa pauvreté.
Alors elle l’importune jusqu’à ce qu’il cède, non par justice mais par exaspération.
Et le juge se débarrasse ainsi de cette veuve, en lui rendant, malgré lui, justice.
« Écoutez-bien ce que dit ce juge sans justice ! Dieu ne fera-t-il pas justice
à ses élus, qui crient vers lui jour et nuit ? Est-ce qu’il les fait attendre ? » Le
Seigneur, utilisant l’argument par l’absurde, vient nous rappeler que nos demandes
ne restent jamais sans réponse. Dieu désire notre bien, mais pas notre bien selon
nos conditions d’exécution. Et c’est bien souvent en cela que notre entendement de
la foi déraille. Nous exigeons des solutions rapides, souvent avec une très bonne
et noble volonté mais qui négligent le libre arbitre de Dieu et la finalité divine
de la réponse à notre demande. Nous réitérons nos demandes sans attendre son amour
et nous voulons anticiper sur son projet d’action. Mais qui sait ce qui est bon pour
nous, si ce n’est Dieu ? Qui sait si une vie ne sera pas plus comblée et assumée auprès
de Lui alors que notre désir est souvent de retenir dans n’importe quel état, ceux
qui ont de l’importance pour nous ? Quelle confiance et quelle acceptation de
son amour manifestons-nous à Dieu ? « Mais le Fils de l’homme, quand il viendra,
trouvera-t-il la foi sur terre ? » Notre foi doit oser jusqu’à aller confier nos
vies et celles de ceux qui nous aiment dans la mort pour qu’ils vivent de Dieu. Mais
si nous doutons de la réponse de Dieu alors il ne peut l’accomplir, malgré nous, dans
nos vies. Fidélité et audace sont les oui de la foi. Abusons d’elles en Dieu.