Rapport du Card. Péter ERDŐ, Président de la Conférence épiscopale, Président du "Conseil
de Conférences épiscopales d'Europe" (C.C.E.E.), pour l’Europe
Pour l’Europe: S. Ém. le Card. Péter ERD_, Archevêque d'Esztergom-Budapest,
Président de la Conférence épiscopale, Président du "Conseil de Conférences épiscopales
d'Europe" (C.C.E.E.) (HONGRIE)
Au nom des évêques européens représentés par
les Présidents de toutes les Conférences Épiscopales du continent, réunis il y a dix
jours à Zagreb à la quarantième session plénière du Conseil des Conférences Épiscopales
d’Europe (CCEE), j’adresse mes plus sincères et cordiales salutations aux Prélats,
qui sont ici présents, et à tous les catholiques du Moyen-Orient. Regardant à partir
de l’Europe, la Terre Sainte et le Moyen-Orient sont situés à l’Est. C’est de là que
nous est arrivée la lumière du Christ qui reste pour toujours le vrai Soleil Invincible
qui ne connaît pas de déclin. Le visage de Jésus brille comme le soleil (Mt 17,2)
et illumine toute l’histoire de l’humanité. Mais cette splendeur, les disciples choisis
l’ont vue sur le mont de la transfiguration alors que se préparait déjà le drame de
la passion et de la résurrection du Seigneur. L’Europe est débitrice du Moyen-Orient.
Non seulement une multitude des éléments fondamentaux de notre culture provient de
cette région, mais également les premiers missionnaires de notre continent sont arrivés
de cette région. Avec gratitude, nous conservons le souvenir de l’événement raconté
dans les Actes des Apôtres: “Or, pendant la nuit, Paul eut une vision: un Macédonien
était là, debout, qui lui adressait cette prière: ‘Passe en Macédoine, viens à notre
secours!’. Aussitôt après cette vision, nous cherchâmes à partir pour la Macédoine,
persuadés que Dieu nous appelait à y porter la Bonne Nouvelle” (Ac 16,9-10). Cela
a été une décision providentielle du Saint-Père Benoit XVI que de consacrer toute
une année à Saint Paul, apôtre des nations, dont la ferveur et la sagesse sont d’une
extrême actualité pour la nouvelle évangélisation. À ce propos, je dois rappeler
notre pèlerinage épiscopal européen à Tarse, ville de Saint Paul, mais je dois aussi
réitérer l’expression de douleur profonde et de solidarité des Évêques européens,
que nous avons manifestée à l’occasion de la mort violente de Son Excellence Mgr Luigi
Padovese, ancien président de la Conférence Épiscopale de la Turquie. En pensant
au Moyen-Orient, nous européens, nous devons faire notre examen de conscience. Est-ce
que le message de l’Évangile est encore vivant parmi nous, cette bonne nouvelle que
nous avons reçue des apôtres? Ou est-ce que l’on ne voit plus dans notre vie cette
lumière et cet enthousiasme qui proviennent de la foi en Christ? De nos jours,
lorsque des réfugiés et des émigrants chrétiens arrivent en Europe en provenance des
différents Pays du Moyen-Orient, quelle est notre réaction? Sommes-nous assez attentifs
aux causes qui contraignent des milliers, pour ne pas dire des millions, de chrétiens
à laisser la terre où habitaient leurs ancêtres depuis presque deux mille ans? Est-ce
que c’est vrai que notre comportement est responsable aussi de ce qui arrive? Nous
sommes confrontés à un grand défi. Nous devons examiner la nature et les effets des
changements en Europe et dans le monde occidental. Savons-nous exprimer d’une manière
efficace notre soutien aux chrétiens du Moyen-Orient? Les facteurs principaux de la
vie publique européenne sont-ils encore sensibles aux valeurs humaines éclairées par
le christianisme? Ou sommes-nous plutôt indifférents et méfiants envers ce précieux
héritage qui fait partie de nous? Héritage sans lequel l’Europe n’existerait même
pas du point de vue culturel. Les chrétiens qui arrivent du Moyen-Orient frappent
à la porte de nos coeurs et réveillent notre conscience chrétienne. Comment accueillons-nous
ces frères et soeurs? Comment contribuons-nous au fait que leur antique héritage -
aussi ecclésiastique - soit conservé pour l’avenir? Le thème de ce Synode est “L’Église
catholique au Moyen-Orient: communion et témoignage”. Dans les Actes des Apôtres nous
lisons en effet que la multitude des croyants avait “un seul coeur et une seule âme”
(Ac 4,32). Une telle communion existe aussi dans l’Église aujourd’hui, mieux même,
la communion des saints est un article de notre profession de foi. Une telle communion
essentielle doit être - comme l’Église elle-même - en même temps visible et invisible;
elle doit agir dans le monde de la grâce, mais aussi de la société. Les catholiques
d’Europe prient, travaillent, s’efforcent et combattent afin d’être également présents
et efficaces dans la société visible. Malgré toutes les tristesses, toutes les désillusions,
toutes les expériences négatives, et parfois également les discriminations et les
pressions qui frappent les chrétiens voulant suivre leur conscience, nous ne cessons
pas d’espérer que l’Europe aussi puisse retrouver sa propre identité enracinée profondément
dans la culture de la vie, de l’espérance et de l’amour. Plus nous sommes conscients
de notre vocation chrétienne dans la société, plus nous serons aussi capable de montrer
et d’irradier la force de l’Évangile qui est puissant et qui peut transformer la société
humaine de notre siècle. Fidèles à l’enseignement du Concile Vatican II, manifesté
tout spécialement dans la Constitution pastorale Gaudium et Spes, nous devons
suivre l’invitation de l’Église : “Ceux qui sont, ou peuvent devenir, capables d’exercer
l’art très difficile, mais aussi très noble de la politique, doivent s’y préparer
; qu’ils s’y livrent avec zèle, sans se soucier de leur intérêt personnel ni des avantages
matériels. Ils lutteront avec intégrité et prudence contre l’injustice et l’oppression,
contre l’absolutisme et l’intolérance, qu’elles soient le fait d’un homme ou d’un
parti politique ; et ils se dévoueront au bien de tous avec sincérité et droiture,
bien plus, avec l’amour et le courage requis par la vie politique. (GS 75f) “Médecin,
guéris-toi toi-même.”(Lc 4,23) - écrit Saint Luc, “le cher médecin” (Col 4,14). Nous
devons donc nous guérir - nous, chrétiens d’Europe - avec l’aide de l’Esprit-Saint
afin que nous puissions refléter la lumière du Christ, reçue de l’Orient, et restituer
le don obtenu au travers de notre courageux témoignage. En ce sens, je demande
la bénédiction de Dieu sur le présent Synode et sur tous les chrétiens du Moyen-Orient.
“Stellas Orientis”, étoile de l’Orient, priez pour nous!