Le commentaire de l'Évangile du 26e dimanche ordinaire
Le Père Jean-Côme About commente l'Évangile selon st Luc (16, 19-31) de ce 26e dimanche
du temps ordinaire.
Le texte
du commentaire: En ce vingt-sixième dimanche du temps ordinaire, l’évangile pourrait
vouloir nous donner une dimension de l’au-delà puisque nous avons le récit du pauvre
Lazare et du riche. Mais Jésus n’anticipe pas l’état du Royaume, il pousse juste
plus loin le contraste que signifiait l’Ancienne Alliance dans le commandement de
l’amour du prochain et qui, ici, est amplifiée largement dans cette différence absurde
du riche et du pauvre. Deux mondes se côtoient sans s’entrecroiser : l’un est
enfermé dans ses richesses et l’autre est isolé dans sa misère. Situation parfois
si criante dans nos cités. Et tous deux meurent, l’un pour se retrouver dans le
sein d’Abraham et l’autre est déposé en terre et pour se retrouver dans les enfers
brûlants. Le fossé qui les sépare devient, dans l’au-delà, un abime définitif,
infranchissable et même insurmontable puisqu’Abraham lui-même ne peut le franchir. L’enfer
nous semble être brûlant mais la situation nous montre Lazare dans la réjouissance
du cœur d’Abraham alors que le riche est dans la froideur absolue d’un éloignement
total de Dieu. Et voilà le dialogue et la demande du riche qui s’adresse à Abraham
sans aucun regard pour le pauvre sauf pour qu’il serve de commissionnaire : « il faut
prévenir mes frères ! ». Mais que peut donc faire Lazare qui resterait encore
à leurs yeux, le méprisé. Ils ont bien plus, « Moïse et les Prophètes » rappelle
Abraham. «Si quelqu’un revient de chez les morts, ils se convertiront» «Quelqu’un
pourrait bien ressusciter d’entre les morts, ils ne seront pas convaincus».
Le
constat est terrible et anticipe les propos et commentaires sur la résurrection de
Jésus. Lorsque le cœur est à se point desséché, la grâce ne peut même pas venir
revivifier les canaux de la mémoire de la foi ou de la bonne volonté humaine. Et
se pose fondamentalement la question de la liberté : elle est telle que, Dieu l’ayant
offerte, il s’interdit d’imposer son amour même s’il y a danger de mort pour nous.
Il se contente alors de signes, de sa Parole, événements extérieurs, en espérant que
notre conscience se laissera toucher. Quel Père, quel homme, qui d’entre-nous,
se refuserait d’agir en péril de mort, par respect de la liberté d’amour ? Le
signe évident force à la foi, cela n’est pas le désir de Dieu. Voilà pourquoi
le Christ répondra à ses détracteurs : « Seul le signe de Jonas vous sera donné »
lorsqu’ils exigent un signe. Le signe de Dieu ne se perçoit et se comprend que dans
l’amour le plus vulnérable. Et la croix sera le signe indélébile qui seul, peut confondre
l’indifférence humaine, et porter à la foi. Tel est notre rôle, rendre comme réalité
tangible pour les cœurs, ce signe d’amour qui mène à la résurrection. Permettre
que la croix devienne signe de vie par un libre choix, une véritable conversion, qui
place Dieu au centre de l’existence humaine dans ses nuits comme dans ses jours.