Commentaire de l’Évangile du premier dimanche de carême
Le père About commente l’Évangile selon saint Luc (4, 1-13) du premier dimanche du
carême.
Texte
intégral du commentaire
Nous venons de commencer le temps du carême :
temps de pénitence, temps de conversion et temps du don de soi, à Dieu et aux autres.
L’Église, en sa liturgie, au long des cinq dimanches préparatoires à la Pâque, nous
propose un itinéraire spirituel de textes fondamentaux chargés de paroles d’espérance
de Jésus. Si nous sommes invités à mesurer nos péchés et notre fragilité face à Dieu
et aux hommes, notre regard ne doit pas perdre de vue l’horizon de Pâques, la résurrection
du Fils de Dieu, qui entraîne notre être et notre chair vers la vie éternelle. Progressivement,
en ces cinq évangiles, le balancement entre le regard sur nous-mêmes et son illumination
par l’œuvre de Dieu, va nous tourner vers la joie totale du Salut. Ainsi
les tentations vont nous rappeler, qu’en Jésus-Christ, elles peuvent être vaincues ;
la Transfiguration va nous signifier que notre chair et notre corps sont destinés
à la vie éternelle ; l’épisode de la tour de Siloé va relativiser le hasard et inscrire
la patience de Dieu en nous ; le fils prodigue nous montera la teneur du pardon de
Dieu et enfin, la femme adultère évoquera la plénitude du pardon au-delà de notre
espérance. Nous voici dans les tentations de Jésus. Illuminé par le Baptême,
Jésus mesure notre faiblesse face au péché et notre fragilité de tenir dans la foi.
Oui, car après quarante jours de jeûne, il est tenté. Lorsque l’épreuve dure, savons-nous
tenir dans la foi ? Tel est l’enjeu de tout carême : ce n’est pas l’épreuve pour faire
plaisir à Dieu, ni pour se mesurer soi-même, mais l’épreuve de se priver de soi-même
pour recevoir de Dieu une confiance surabondante en lui. C’est passer du « Il faut
qu’il grandisse et que moi je diminue » au troisième oui de Pierre : « Seigneur, tu
sais bien que je t’aime ». C’est un chemin de renoncement pour grandir en
Dieu. Et ce chemin rencontre en Jésus nos trois tentations majeures : celle du pouvoir :
« Ordonne à cette pierre de devenir du pain », celle de la gloire : « Toi, si tu te
prosternes, tu auras tout cela », et celle du vouloir : « Si tu es le Fils de Dieu,
jette-toi en bas ». Mais j’aimerai, avec vous, les lire sous un autre angle : celle
du corps, de l’esprit et de l’âme. La tentation du corps : Jésus a faim.
Faim de nourriture pour vivre, évidement mais derrière cela, Il y a la faim du corps
qui se fait sentir en tous nos sens. Faim de connaître, de penser, d’aimer, de partager,
de vouloir satisfaire aux appels de mon corps et la réponse à ces faims peut aller
jusqu’à vouloir maîtriser l’autre jusqu’à en faire un objet de satiété, un esclave
de mes besoins. Le carême, par la privation désirée, vient rétablir l’ordre de
mes faims. La tentation de l’esprit consiste à agir pour que tout converge
vers moi. Faim d’être reconnu, désiré et remercié. C’est le moi, qui veut bien vivre
avec les autres mais en restant Le Moi. Le carême, par une humilité offerte, me
remet à ma simple place. La tentation de l’âme, que stigmatise la dernière
tentation de Jésus, affiche cette volonté orgueilleuse de vivre par moi-même, sans
Dieu et si je peux, sans l’aide des autres. C’est l’errance de mon imagination qui
me met à égalité avec Dieu : alors pourquoi en aurais-je besoin ? Et si j’en ai besoin
alors je le mets à l’épreuve : sauve ou fais ceci et je croirais en toi ! Le carême,
par une foi aimante, bride mon imagination et me rappelle Dieu comme la seule source
de mes joies et de mes peines accueillies. Bon et saint carême à tous.