Les chrétiens de RDC se mobilisent contre l’insécurité régnant au Sud-Kivu
En République démocratique du Congo, un nouvel assaut a été lancé dans la nuit de
dimanche à lundi contre un monastère des environs de Bukavu, dans l’Est du pays, où
une religieuse avait été tuée le 7 décembre dernier ; ce mardi, les chrétiens de Bukavu
et d’Uvira ont participé à une marche pour la paix avant d’assister à la messe dans
leurs paroisses. Tous les jours, à midi, ils sont invités à sonner une cloche, à siffler
ou à donner un coup de klaxon pour demander le retour de la paix. L’insécurité règne
au Sud-Kivu où des hommes armés commettent impunément des massacres, des viols, incendient
des villages, prennent des personnes en otage. Le réseau paix pour le Congo animé
par des missionnaires xaviériens se demande s’il ne s’agit pas d’un plan orchestré
pour déstabiliser les forces vives de la société, à commencer par l’Église, pour mener
à terme des projets criminels. Le clergé et les religieux de l’archidiocèse de Bukavu
ont écrit au président Kabila pour lui demander d’intervenir. La lettre énumère les
récents actes de violences dont ont été victimes des prêtres, des religieux et des
religieuses actifs dans le territoire de l’archidiocèse. Ces derniers seraient-ils
donc considérés comme les témoins embarrassants de toutes les violations des droits
de l’homme massivement perpétrées dans le Sud-Kivu depuis presque 14 ans ? C’est la
question que se posent les signataires. Écoutez l’abbé Justin Nbungi, directeur
de la commission diocésaine justice et paix de l’archidiocèse de Bukavu.
Propos recueillis
par Claire Malapert.
Lettre de la communauté ecclésiale de l’archidiocèse
de Bukavu au président Kabila
À Son excellence Monsieur le chef de l’Etat
Président de la République DEMOCRATIQUE DU CONCO à KINSHASA PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE,
Nous, Prêtres, religieux et religieuses de l’Archidiocèse de Bukavu réunis
autour de notre Archevêque, venons auprès de votre haute autorité, pour vous demander
d’assurer notre sécurité et celle des populations dont nous avons la charge. En
ville comme en campagne, les gens passent des nuits sans espoir du lendemain, surtout
les prêtres qui se posent la question de savoir à qui le prochain tour ? Un traumatisme
qui coupe le goût de la vie et crée des maladies qui tuent dans la durée … A qui faut-il
finalement s’adresser quand les rues et les villages sont pris d’assaut par les gens
en armes "non autrement identifiés" ? Les partisans de la justice populaire pêchent
dans les eaux troubles favorisées par l’absence de ceux doivent dire le droit et ne
font rien. Fatalité ou hypocrisie partagées par ceux qui veulent fatiguer ou mieux
diviser et terroriser ? Ailleurs, il suffit qu’un citoyen soit pris en otage pour
que toute la nation se mobilise. Mais, Ici, avec la culture de la banalisation de
la vie et de l’impunité qui s’installe, on dirait qu’on veut la paix des cimetières
et que seuls ceux qui ont des armes ont droit à la survie. Visiblement une guerre
d’usure est en cours. Dieu aidant, Cependant, loin de nous anéantir, elle suscite
en nous des nouvelles énergies.
Contexte Excellence Monsieur le Président
de la République, c’est pratiquement chaque jour que nous déplorons des crimes contre
les populations innocentes au Sud Kivu. En ce qui concerne les ecclésiastiques
et les religieux de l’archidiocèse de BUKAVU, les crimes à répétition qui ont étés
dirigés particulièrement contre eux, ont été perpétrés par des hommes armés en uniformes
militaires. Il convient également de signaler que les récents actes criminels sont
intervenus au cours de deux derniers mois : • CIHERANO : Attaque, pillage du presbytère
et prise en otage des d’un prêtre et d’un séminariste le 3 octobre 2009 à 20hoo. Leur
libération s’est faite le lendemain contre payement d’une rançon de 5000$. • NYANGEZI
: le 5 octobre 2009 , attaque et pillage du complexe scolaire dirigé par les frères
maristes . • KABARE : Attaque de l’hôpital de Mukongola , le …… deux médecins sont
grièvement blessés • KARHALE : le Père Jérôme NDAYE est attaqué par les hommes
en armes en tenue de policier à 19h00 • KABARE : Attaque du presbytère et assassinat
par balle de l’abbé Daniel CIZIMYA, le 6 décembre 2009 à 2h00 du matin • MURHESA
: assassinat par balle de la Soeur Dénise Kahambu au Monastère, le 7 décembre 2009
à 19h30
Souhaits : Excellence, Monsieur le président de la République,
au regard de ce qui précède, nous souhaiterions : • L’unification du commandement
militaire au niveau provincial : Sous le même drapeau, il y a plusieurs chefs militaires
qui, manifestement, ne collaborent pas. Et les différentes factions d’après leurs
provenances sont différemment traitées quant à leur solde et leur logistique. Certains
d’entre eux affirment ne recevoir leurs ordres que de la présidence. Cette rivalité
de commandement et les disparités dans leur traitement couvent une tension qui pourrait
éclater à tout moment A cet effet, nous demandons pour ceux qui servent sous le
drapeau, un traitement digne à la hauteur de leur sacrifice. • Chasser les FDLR
de nos forêts est une initiative très louable que nous encourageons ; mais certains
militaires commis à cette opération Kimya II ne rassurent pas les populations qui
gardent en mémoire les atrocités subies en 2004 lors de l’occupation de la ville de
Bukavu par Nkunda et Mutebusi. • Tout nous porte à penser que les services de
sécurité ne sont pas à la hauteur de leur tache, dès lors qu’ils ne semblent pas savoir
anticiper les événements et intervenir à temps. • La population du sud Kivu est
sous le choc, parce qu’on a pris pour cible l’Eglise catholique dont vous connaissez
le rôle social et l’implication dans la démocratisation de notre pays. Les ecclésiastiques
(Prêtres , Religieux et religieuses) seraient-ils considérés comme des témoins gênants
de toutes les violations des droits humains massivement perpétrés au sud Kivu depuis
près de 14 ans ? • Manifestement, notre province du Sud Kivu n’a pas de chance
. outre les potentialités avérées , nous ne pouvons pas comprendre qu’au niveau de
la province du sud Kivu, l’on puisse manquer même de 5 litres de carburant à la police
d’intervention rapide pour secourir une population en danger, en l’occurrence la sœur
Denise qui attendait en vain leur secours à Murhesa . • Notre police provinciale
ferait davantage si elle était mieux équipée et plus encadrée. • Pour permettre
à la population de communiquer en cas de danger : nous souhaiterions que vous pesiez
de votre autorité , pour que des antennes VODACOM, ZAIN, TIGO, CCT et autres soient
érigées pour couvrir les endroits difficilement accessibles (Bunyakiri, kalonge, Ninja
, Kanyola… • L’absence apparente d’une police militaire, ne nous rassure pas quant
à l’incivisme et au banditisme imputés à certains éléments de notre armée. Il serait
souhaitable de caserner et d’identifier tous les militaires afin d’éviter la circulation
incontrôlée des hommes en uniformes et en armes non autrement identifiés. • Il
y a trop de massacres dans notre province, mais malheureusement aucune enquête ne
semble aboutir. Cela favorise la justice populaire. • Des messages d’avertissement
demandant à notre archevêque de faire attention, nous parviennent de partout, il est
ciblé. Pourquoi cette traumatisation ?
CONCLUSION : le peuple du SUD
KIVU qui vous a massivement élu vous fait encore confiance et compte sur vous pour
donner un message de plus fort pour que plus jamais le sang des innocents ne coulent
dans notre province .
Notre église ne cesse d’élever la voix vers dieu pour
implorer sa bénédiction sur nos dirigeants et leurs administrés , afin que , le temps
de la célébration de notre jubilé d’or , nous donne de commencer réellement une ère
nouvelle de paix , de justice et de travail pour la reconstruction et la prospérité
de notre pays la R.D Congo Avec l’expression de notre parfaite considération.
Fait
à Bukavu , le 11 décembre 2009
• Président de l’UPRELO (Union des Prêtres Locaux) •
Président de l’USUMA (Union des Supérieures Majeures ) • Président de l’ASUMA (Union
des Supérieurs Majeurs ) • Les curés doyens
Vu et approuvé par son
excellence Monseigneur MAROYI RUSENGO Archevêque de Bukavu et Administrateur Apostolique
d’UVIRA