Intervention de Mgr Francisco João SILOTA, Évêque de Chimoio (MOZAMBIQUE)
S. Exc. Mgr Francisco João SILOTA, M. Afr., Évêque de Chimoio, Deuxième Vice-Président
du Symposium des Conférences Épiscopales d'Afrique et de Madagascar (S.C.E.A.M.) (MOZAMBIQUE)
Au
n. 66 du chapitre II de l’Instrumentum laboris, on peut lire: “... d’aucuns estiment
que la raison profonde de l’instabilité des sociétés du continent est liée à l’aliénation
culturelle et à la discrimination raciale qui ont engendré tout au long de l’histoire
un complexe d’infériorité, le fatalisme et la peur” (IL n. 66).
Moi-même, conformément
à cette recherche des raisons les plus profondes, je me rends compte que ce complexe
d’infériorité et d’autres questions encore sont allés beaucoup plus loin et ont provoqué
de graves dommages à de nombreux africains, quelque chose que je qualifierais d’aliénation
anthropologique. D’autre part, les faits démontrent que de nombreux africains non
seulement nient certaines valeurs qui sont typiquement les leurs, mais en arrivent
aussi à se renier eux-mêmes. Ils n’acceptent pas leur “Africanité”. Le légitime orgueil
que Léopold Sédar Senghor voulait diffuser comme idéologie de la “Négritude” est quelque
chose que beaucoup ignorent. La campagne en faveur de l’“Authenticité”entreprise à
sa manière par Désiré Mobutu a été ridiculisée! Le “Communalisme africain” au travers
duquel Kwame N’krumah voudrait classifier la manière d’être de l’homme africain est
considéré de manière sceptique et montré du doigt comme anachronique!
Alors,
les questions qui se posent sont les suivantes: Où es-tu Afrique? Où te situes-tu?
Ne serait-ce pas par hasard ce vide sans terrain et sans support auquel tu te soutiens
qui est paradoxalement à la base de ton drame? D’autre part, comment est-il possible
de concilier ton tempérament accueillant avec la discrimination ethnique, tribale
et régionale qui règne au sein de tes sociétés mais également dans l’Église? Cette
discrimination ne serait-elle pas le fruit d’un “transfert” que certains de tes fils
mettent en œuvre vis-à-vis des autres pour se nier eux-mêmes? Comment est-il possible
d’expliquer l’évidente contradiction existant entre l’amour inconditionné pour la
vie, caractéristique de l’homme africain, et les trahisons que commettent certains
de tes fils contre leurs propres frères, leur causant d’inhumaines souffrances voire
les privant de la vie?
Quelle est la porte de sortie de cette situation contradictoire,
ô Afrique?