Polémiques et manifestations contre Benoît XVI en France: éclairage du porte-parole
de la Conférence des évêques
La polémique qui a suivi les propos du Pape sur le préservatif et le Sida, dans l’avion
qui le conduisait au Cameroun mardi dernier, si elle est reléguée au second plan dans
la plupart des pays, elle ne s’apaise pas en France. Au contraire. Le journal du dimanche
a publié un sondage IFOP selon lequel 43% des catholiques français souhaiteraient
que Benoît XVI démissionne. Par ailleurs les élus communistes au Conseil de Paris
et les militants de l'association de lutte contre le Sida Act-Up organisé, ce dimanche,
des manifestations ainsi qu’une distribution de préservatifs place Jean-Paul II, à
Paris, c’est-à-dire sur le parvis de la cathédrale Notre Dame. Des affrontements ont
éclaté avec des jeunes catholiques auxquels se seraient joints des militants d’extrême-droite.
Mathilde Auvillain a recueilli les explications du Père Podvin, porte-parole de
la conférence des évêques. Ecoutez
Il y a deux
jours, dans un entretien au Figaro, le cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris,
avait déploré le lynchage dont Benoît XVI est victime et critiqué les catholiques
qui veulent dévorer l’institution et ceux qui croient tout ce que disent les medias
*********** Lire
aussi ci-dessous, une déclaration de l'évêque d'Ajaccio, Mgr Jean-Luc Brunin, rendue
publique le 20 mars
" Soyez toujours prêts à justifier votre espérance »
(1 Pierre 3, 15)
Une nouvelle fois, la polémique s’est engagée autour du pape
Benoît XVI. Il me paraît utile d’apporter à la communauté catholique de Corse et,
au-delà, aux personnes de bonne volonté troublées ou scandalisées par les propos rapportés
dans les médias, les éléments d’information permettant de comprendre la portée réelle
des paroles du Saint-Père lors de sa visite pastorale à l’Eglise en Afrique.
Pour
éviter le « dé-lire », il est toujours prudent de « lire ». En l’occurrence, de prendre
en considération l’ensemble des propos de Benoît XVI concernant ce fléau du sida qui
frappe particulièrement les populations du continent africain.
Le pape n’a
pas parlé du préservatif en termes d’interdit, comme certains raccourcis le laissent
entendre. Il est évident qu’une personne contaminée par le virus IHV ne doit pas prendre
le risque, dans une relation sexuelle, de transmettre le sida. C’est une question
de bon sens et de respect de ce commandement fondamental : tu ne tueras pas ! Mais
le pape a déplacé la question sur un terrain anthropologique beaucoup plus fondamental.
Nous ne sommes pas, comme des commentateurs le prétendent pour disqualifier l’approche,
face à une simple conception théologique ou une opinion morale, ou encore une position
confessionnelle. Il s’agit bien d’une vision de l’homme et de sa dignité qui nous
vient de l’Evangile et qui a une portée universelle.
Est-il scandaleux ou
assassin de dire qu’on « ne peut résoudre ce fléau du sida par la distribution de
préservatifs » ? Surtout lorsque le pape, dans la même déclaration, en appelle à une
« humanisation de la sexualité, c'est-à-dire un renouveau spirituel et humain qui
apporte avec soi une nouvelle manière de se comporter l’un avec l’autre ».
Le
pape mentionne les œuvres caritatives de l’Eglise, des organisations internationales
comme Sant’Egidio ou des congrégations religieuses comme les Camilliens. L’Eglise
en Afrique, comme d’autres O.NG, est quotidiennement présente auprès des malades du
sida pour apporter des soins et du réconfort moral. Les chrétiens vivent une vraie
proximité évangélique auprès des victimes de cette pandémie et de leur famille.
Le prochain Synode sur l’Afrique se tiendra en octobre prochain. Appelée à porter
une parole de réconciliation, de paix et d’espérance, l’Eglise a autre chose à proposer
aux africains qu’une vaste distribution de préservatifs pour faire face au fléau dévastateur
du temps. Ce serait cautionner et promouvoir le zapping affectif et sexuel. Nous croyons
qu’il est destructeur de l’homme, qu’il compromet l’équilibre et la stabilité de la
famille, cellule de base de toute société.
Le message du Christ révèle une
autre dimension de l’homme appelé à s’épanouir dans une vie relationnelle basée sur
la confiance mutuelle, le respect de l’autre et la fidélité. C’est bien à cet idéal
que le Saint-Père veut appeler dans son intervention. Cela participe clairement de
l’annonce de l’Evangile de la vie qui détermine les prises de parole de l’Eglise catholique.
Elle se reconnaît le droit et la mission d’intervenir sur tous les sujets concernant
l’humanité. Elle le fait dans le domaine de la bioéthique, de la sexualité et de la
famille, mais aussi sur la question du respect de l’environnement naturel, de la justice
sociale, de la démocratie et du développement solidaire et durable. Elle le fait aussi
sur les difficiles questions migratoires. Nous aimerions qu’en tous ces domaines aussi,
la parole de l’Eglise soit entendue et répercutée largement. Ceux qui s’émeuvent légitimement
du malheur des victimes du sida en Afrique, seront-ils aussi prompts à répercuter
la parole de l’Eglise lorsqu’elle dénonce la misère qui continue de s’abattre sur
le continent africain, ou la situation des centaines de migrants africains, - hommes,
femmes et enfants -, qui viennent s’échouer et mourir sur les côtes de l’Europe ?
Prochainement, une initiative sera prise dans le diocèse, pour un temps de
débat très large avec ceux et celles qui souhaiteront comprendre les raisons profondes
et réelles qui poussent l’Eglise, dans l’esprit du Concile Vatican II, à prendre la
parole sur tout ce qui touche l’homme et son avenir. Elle transmet, au nom du Christ,
un idéal pour l’humanité. Même s’il demeure lointain et exigeant, cet idéal n’est
ni ringard, ni disqualifié par un modernisme souvent réducteur et déshumanisant. La
parole de l’Eglise que le pape porte courageusement, garde toute sa pertinence car
elle dit des choses essentielles sur l’homme et pour l’homme.