Au troisième jour de son voyage apostolique en France, Benoît XVI avait tenu à rencontrer
les évêques. A Lourdes, ce dimanche après-midi dans l'hémicycle Sainte Bernadette,
le Pape est revenu sur plusieurs points importants. Ecoutez le Pape s'adresser à eux
Messieurs
les Cardinaux, Très chers Frères dans l'Épiscopat ! C'est
la première fois depuis le début de mon Pontificat que j'ai la joie de vous rencontrer
tous ensemble. Je salue cordialement votre Président, le Cardinal André
Vingt-Trois, et je le remercie des paroles aimables qu’il m’a adressées en votre
nom. Je salue aussi avec plaisir les Vice-Présidents ainsi que le Secrétaire Général
et ses collaborateurs. Je salue chaleureusement chacun de vous, mes Frères
dans l'Épiscopat, qui êtes venus des quatre coins de France et d'Outre-mer. J'inclus
également Mgr François Garnier, Archevêque de Cambrai, qui célèbre aujourd'hui à Valenciennes
le Millénaire de Notre-Dame du Saint-Cordon. Je me réjouis d'être
parmi vous ce soir dans cet hémicycle « Sainte Bernadette », qui est le lieu ordinaire
de vos prières et de vos rencontres, lieu où vous exposez vos soucis et
vos espérances, et lieu de vos discussions et de vos réflexions. Cette salle
est située à un endroit privilégié près de la grotte et des basiliques mariales. Certes,
les visites ad limina vous font rencontrer régulièrement le Successeur
de Pierre à Rome, mais ce moment, que nous vivons, nous est donné comme une grâce
pour réaffirmer les liens étroits qui nous unissent dans le partage du même sacerdoce
directement issu de celui duChrist rédempteur. Je vous encourage à continuer à travailler
dans l'unité et la confiance, en pleine communion avec Pierre qui est venu pour raffermir
votre foi. Bien nombreuses sont actuellement vos préoccupations ! Je sais que vous
avez à coeur de travailler dans le nouveau cadre défini par la réorganisation de la
carte des provinces ecclésiastiques, et je m'en réjouis vivement. Je voudrais profiter
de cette occasion pour réfléchir avec vous sur quelques thèmes que je sais être au
centre de votre attention. L'Église - Une, Sainte, Catholique et Apostolique
- vous a enfantés par le Baptême. Elle vous a appelés à son service ; vous
lui avez donné votre vie, d'abord comme diacres et prêtres, puis comme évêques. Je
vous exprime toute mon estime pour ce don de vos personnes : malgré l'ampleur
de la tâche, que ne vient pas diminuer l'honneur qu'elle comporte – honor, onus
! – vous accomplissez avec fidélité et humilité la triple tâche qui est
la vôtre : enseigner, gouverner, sanctifier suivant la Constitution Lumen
Gentium (nn. 25-28) et le décret Christus Dominus. Successeurs
des Apôtres, vous représentez le Christ à la tête des diocèses qui vous
ont été confiés, et vous vous efforcez d’y réaliser le portrait de l'Évêque tracé
par saint Paul ; vous avez à grandir sans cesse dans cette voie, afin d'être
toujours plus « hospitaliers, amis du bien, pondérés, justes, pieux,
maîtres de vous, attachés à l'enseignement sûr, conformes à la doctrine »
(cf. Tt 1, 8-9). Le peuple chrétien doit vous considérer
avec affection et respect. Dès les origines, la tradition chrétienne a insisté sur
ce point : « Tous ceux qui sont à Dieu et à Jésus-Christ,
ceux-là sont avec l'Évêque », disait saint Ignace d'Antioche (Aux
Philad. 3, 2), qui ajoutait encore : « celui que le
maître de maison envoie pour administrer sa maison, il faut que nous le recevions
comme celui-là même qui l'a envoyé » (Aux Eph.
6, 1). Votre mission, spirituelle surtout, consiste donc à créer les conditions
nécessaires pour que les fidèles puissent « chanter d'une seule
voix par Jésus-Christ un hymne au Père » (Ibid. 4,
2) et faire ainsi de leur vie une offrande à Dieu. Vous êtes à
juste titre convaincus que, pour faire grandir en chaque baptisé le goût de Dieu et
la compréhension du sens de la vie, la catéchèse est d’une importance fondamentale.
Les deux instruments principaux dont vous disposez, le Catéchisme de
l'Église catholique et le Catéchisme des Évêques de France constituent
de précieux atouts. Ils donnent de la foi catholique une synthèse harmonieuse
et permettent d'annoncer l'Évangile dans une fidélité réelle à sa richesse. La catéchèse
n'est pas d'abord affaire de méthode, mais de contenu, comme l'indique son nom même
: il s'agit d'une saisie organique (kat-echein) de
l'ensemble de la révélation chrétienne, apte à mettre à la disposition des intelligences
et des coeurs la Parole de Celui qui a donné sa vie pour nous. De cette
manière, la catéchèse fait retentir au coeur de chaque être humain un unique
appel sans cesse renouvelé: « Suis-moi » (Mt 9,
9). Une soigneuse préparation des catéchistes permettra la transmission
intégrale de la foi, à l’exemple de saint Paul, le plus grand catéchiste de tous les
temps, vers lequel nous regardons avec une admiration particulière en ce
bimillénaire de sa naissance. Au milieu des soucis apostoliques, il exhortait ainsi
: « Un temps viendra où l’on ne supportera plus l’enseignement solide, mais,
au gré de leur caprice, les gens iront chercher une foule de maîtres
pour calmer leur démangeaison d’entendre du nouveau. Ils refuseront d’entendre la
Vérité pour se tourner vers des récits mythologiques »
(2 Tm 4, 3-4). Conscients du grand réalisme
de ses prévisions, avec humilité et persévérance vous vous efforcez de correspondre
à ses recommandations : « Proclame la Parole, interviens à temps et à contretemps
… avec une grande patience et avec le souci d'instruire »
(2 Tm 4, 2). Pour réaliser efficacement cette tâche,
vous avez besoin de collaborateurs. Pour cette raison les vocations sacerdotales
et religieuses méritent plus que jamais d'être encouragées. J'ai été informé des initiatives
qui sont prises avec foi en ce domaine, et je tiens à apporter tout mon
soutien à ceux qui n'ont pas peur, tel le Christ, d'inviter jeunes ou moins jeunes
à se mettre au service du Maître qui est là et qui appelle (cf. Jn 11,
28). Je voudrais remercier chaleureusement et encourager toutes les familles,
toutes les paroisses, toutes les communautés chrétiennes et tous les mouvements d'Église
qui sont la bonne terre qui donne le bon fruit (cf. Mt 13,
8) des vocations. Dans ce contexte, je ne veux pas omettre d’exprimer ma
reconnaissance pour les innombrables prières de vrais disciples du Christ et de son
Église. Il y a parmi eux des prêtres, des religieux et religieuses, des
personnes âgées ou des malades, des prisonniers aussi, qui durant des décennies ont
fait monter vers Dieu leurs supplications pour accomplir le commandement
de Jésus : « Priez donc le maître de la moisson d’envoyer
des ouvriers pour sa moisson » (Mt 9, 38).
L'Évêque et les communautés de fidèles doivent, pour ce qui les concerne,
favoriser et accueillir les vocations sacerdotales et religieuses, en s'appuyant sur
la grâce que donne l'Esprit Saint pour opérer le discernement nécessaire.
Oui, très chers Frères dans l'épiscopat, continuez à appeler au sacerdoce et à la
vie religieuse, tout comme Pierre a lancé ses filets sur l'ordre du Maître,
alors qu'il avait passé la nuit à pêcher sans rien prendre (cf. Lc
5, 5). On ne dira jamais assez que le sacerdoce
est indispensable à l'Église, dans l'intérêt même du laïcat. Les prêtres sont un
don de Dieu pour l'Église. Les prêtres ne peuvent déléguer leurs fonctions aux fidèles
en ce qui concerne leurs missions propres. Chers Frères dans l'épiscopat,
je vous invite à rester soucieux d'aider vos prêtres à vivre dans une union intime avec
le Christ. Leur vie spirituelle est le fondement de leur vie apostolique. Vous les
exhorterez avec douceur à la prière quotidienne et à la célébration digne
des Sacrements, surtout de l'Eucharistie et de la Réconciliation, comme
le faisait saint François de Sales pour ses prêtres. Tout prêtre doit pouvoir
se sentir heureux de servir l'Église. A l'école du curé d'Ars, fils de votre
terre et patron de tous les curés du monde, ne cessez pas de redire qu'un homme ne
peut rien faire de plus grand que de donner aux fidèles le corps et le sang
du Christ, et de pardonner les péchés. Cherchez à être attentifs à leur formation humaine,
intellectuelle et spirituelle et à leurs moyens d'existence. Essayez,
malgré le poids de vos lourdes occupations, de les rencontrer régulièrement
et sachez les recevoir comme des frères et des amis (cf. LG 28
et CPE 16). Les prêtres ont besoin de votre affection,
de votre encouragement et de votre sollicitude. Soyez proches d'eux et ayez une attention particulière
pour ceux qui sont en difficulté, malades ou âgés (cf. CPE 16).
N'oubliez pas qu'ils sont comme le dit le Concile Vatican II, reprenant
la superbe expression utilisée par saint Ignace d'Antioche aux Magnésiens, « la
couronne spirituelle de l'Évêque » (LG 41). Le
culte liturgique est l'expression suprême de la vie sacerdotale et épiscopale, comme
aussi de l'enseignement catéchétique. Votre charge de sanctification du
peuple des fidèles, chers Frères, est indispensable à la croissance de l'Église. J'ai
été amené à préciser, dans le Motu proprio Summorum Pontificum, les
conditions d'exercice de cette charge, en ce qui concerne la possibilité
d'utiliser aussi bien le missel du bienheureux Jean XXIII (1962) que celui du Pape
Paul VI (1970). Des fruits de ces nouvelles dispositions ont déjà vu le
jour, et j’espère que l'indispensable pacification des esprits est, grâce à
Dieu, en train de se faire. Je mesure les difficultés qui sont les vôtres, mais je
ne doute pas que vous puissiez parvenir, en temps raisonnable, à des solutions
satisfaisantes pour tous, afin que la tunique sans couture du Christ ne se déchire
pas davantage. Nul n'est de trop dans l'Église. Chacun, sans exception,
doit pouvoir s'y sentir chez lui, et jamais rejeté. Dieu qui aime tous les
hommes et ne veut en perdre aucun nous confie cette mission de Pasteurs, en faisant
de nous les Bergers de ses brebis. Nous ne pouvons que Lui rendre grâce
de l'honneur et de la confiance qu'Il nous fait. Efforçons-nous donc toujours
d'être des serviteurs de l'unité ! Quels sont les autres domaines qui requièrent
une plus grande attention ? Les réponses peuvent différer d'un diocèse à l'autre,
mais il y a certainement un problème qui apparaît partout d’une urgence particulière
: c’est la situation de la famille. Nous savons que le couple et la famille
affrontent aujourd'hui de vraies bourrasques. Les paroles de l’évangéliste
à propos de la barque dans la tempête au milieu du lac peuvent s’appliquer à la famille
: « Les vagues se jetaient sur la barque, si bien que déjà
elle se remplissait » (Mc 4, 37). Les facteurs qui
ont amené cette crise sont bien connus, et je ne m'attarderai donc pas à
les énumérer. Depuis plusieurs décennies, des lois ont relativisé en différents pays
sa nature de cellule primordiale de la société. Souvent, elles cherchent
plus à s'adapter aux moeurs et aux revendications de personnes ou de groupes
particuliers, qu'à promouvoir le bien commun de la société. L'union stable d'un homme
et d'une femme, ordonnée à la construction d'un bonheur terrestre grâce
à la naissance d'enfants donnés par Dieu, n'est plus, dans l'esprit de certains,
le modèle auquel l’engagement conjugal se réfère. Cependant l’expérience enseigne
que la famille est le socle sur lequel repose toute la société. De plus,
le chrétien sait que la famille est aussi la cellule vivante de l'Église. Plus la
famille sera imprégnée de l'esprit et des valeurs de l'Évangile, plus l'Église
elle-même en sera enrichie et répondra mieux à sa vocation. D’ailleurs je
connais et j’encourage vivement les efforts que vous faites afin d'apporter votre
soutien aux différentes associations qui oeuvrent pour aider les familles.
Vous avez raison de maintenir, même à contre-courant, les principes qui
font la force et la grandeur du Sacrement de mariage. L'Église veut rester indéfectiblement
fidèle au mandat que lui a confié son Fondateur, notre Maître et Seigneur
Jésus-Christ. Elle ne cesse de répéter avec Lui : « Ce que Dieu a uni,
que l'homme ne le sépare pas ! » (Mt 19, 6). L’Église
ne s'est pas donné cette mission : elle l'a reçue. Certes, personne ne peut
nier l'existence d'épreuves, parfois très douloureuses, que traversent certains foyers.
Il faudra accompagner ces foyers en difficulté, les aider à comprendre la
grandeur du mariage, et les encourager à ne pas relativiser la volonté de Dieu et
les lois de vie qu'Il nous a données. Une question particulièrement douloureuse est
celle des divorcés remariés. L'Église, qui ne peut s'opposer à la volonté
du Christ, maintient fermement le principe de l'indissolubilité du mariage, tout en entourant
de la plus grande affection ceux et celles qui, pour de multiples raisons, ne parviennent
pas à le respecter. On ne peut donc admettre les initiatives qui visent
à bénir des unions illégitimes. L'Exhortation apostolique Familiaris consortio a
indiqué le chemin ouvert par une pensée respectueuse de la vérité et de la charité. Les
jeunes, je le sais bien, chers Frères, sont au centre de vos préoccupations. Vous
leur consacrez beaucoup de temps, et vous avez raison. Ainsi que vous avez
pu le constater, je viens d'en rencontrer une multitude à Sydney, au cours de
la Journée Mondiale de la Jeunesse. J'ai apprécié leur enthousiasme et leur capacité
de se consacrer à la prière. Tout en vivant dans un monde qui les courtise
et qui flatte leurs bas instincts, portant, eux aussi, le poids bien lourd d'héritages difficiles
à assumer, les jeunes conservent une fraîcheur d'âme qui a fait mon admiration. J'ai
fait appel à leur sens des responsabilités en les invitant à s'appuyer toujours
sur la vocation que Dieu leur a donnée au jour de leur Baptême. « Notre force,
c'est ce que le Christ veut de nous », disait le Cardinal Jean-Marie Lustiger.
Au cours de son premier voyage en France, mon vénéré Prédécesseur avait
fait entendre aux jeunes de votre pays un discours qui n'a rien perdu de son actualité et
qui avait alors reçu un accueil d'une ferveur inoubliable. « La permissivité
morale ne rend pas l'homme heureux », avait-il proclamé au Parc-des-Princes,
sous des tonnerres d'applaudissements. Le bon sens qui inspirait la saine réaction
de son auditoire n'est pas mort. Je prie l'Esprit Saint de parler au coeur
de tous les fidèles et, plus généralement, de tous vos compatriotes, afin
de leur donner - ou de leur rendre - le goût d'une vie menée selon les critères d'un
bonheur véritable. A l'Élysée, j'ai évoqué l'autre jour l'originalité de
la situation française que le Saint-Siège désire respecter. Je suis convaincu,
en effet, que les Nations ne doivent jamais accepter de voir disparaître ce qui fait
leur identité propre. Dans une famille, les différents membres ont beau
avoir le même père et la même mère, ils ne sont pas des individus indifférenciés, mais
bien des personnes avec leur propre singularité. Il en va de même pour les pays, qui
doivent veiller à préserver et développer leur culture propre, sans jamais
la laisser absorber par d'autres ou se noyer dans une terne uniformité. « La Nation
est en effet, pour reprendre les termes du Pape Jean-Paul II, la
grande communauté des hommes qui sont unis par des liens divers,
mais surtout, précisément, par la culture. La Nation existe "par" la culture et "pour"
la culture, et elle est donc la grande éducatrice des hommes pour
qu'ils puissent "être davantage" dans la communauté » (Discours à l'UNESCO,
2 juin 1980, n. 14). Dans cette perspective, la mise en évidence des racines
chrétiennes de la France permettra à chacun des habitants de ce Pays de
mieux comprendre d'où il vient et où il va. Par conséquent, dans le cadre institutionnel
existant et dans le plus grand respect des lois en vigueur, il faudrait
trouver une voie nouvelle pour interpréter et vivre au quotidien les valeurs
fondamentales sur lesquelles s’est construite l’identité de la Nation. Votre Président
en a évoqué la possibilité. Les présupposés sociopolitiques d’une antique
méfiance, ou même d’hostilité, s'évanouissent peu à peu. L'Église ne revendique
pas la place de l'État. Elle ne veut pas se substituer à lui. Elle est
une société basée sur des convictions, qui se sait responsable du tout et
ne peut se limiter à elle-même. Elle parle avec liberté, et dialogue avec autant de
liberté dans le seul désir d'arriver à la construction de la liberté commune.
Une saine collaboration entre la Communauté politique et l’Église, réalisée
dans la conscience et le respect de l’indépendance et l’autonomie de chacune dans
son propre domaine, est un service rendu à l’homme, ordonné à son épanouissement
personnel et social. De nombreux points, prémices d'autres qui s'y ajouteront
selon les nécessités, ont déjà été examinés et résolus au sein de l’ « Instance de
Dialogue entre l’Église et l’État ». En vertu de sa mission propre et au
nom du Saint-Siège, le Nonce Apostolique y siège naturellement, lui qui est appelé
à suivre activement la vie de l’Église et sa situation dans la société. Comme
vous le savez, mes prédécesseurs, le bienheureux Jean XXIII, ancien Nonce à Paris,
et le Pape Paul VI, ont voulu des Secrétariats qui sont devenus, en 1988,
le Conseil Pontifical pour la promotion de l'Unité des Chrétiens et le Conseil
Pontifical pour le Dialogue Interreligieux. S'y ajoutèrent très vite
la Commission pour les Rapports Religieux avec le Judaïsme et la Commission
pour les Rapports Religieux avec les Musulmans. Ces structures sont en quelque sorte
la reconnaissance institutionnelle et conciliaire des innombrables initiatives
et réalisations antérieures. Des commissions ou conseils similaires se trouvent
d'ailleurs dans votre Conférence Épiscopale et dans vos Diocèses. Leur existence et
leur fonctionnement démontrent la volonté de l'Église d'aller de l'avant
(…) dans le dialogue bilatéral. La récente Assemblée plénière du Conseil
Pontifical pour le Dialogue Interreligieux a mis en évidence que le dialogue authentique
demande comme conditions fondamentales une bonne formation pour ceux qui
le promeuvent, et un discernement éclairé pour avancer peu à peu dans la
découverte de la Vérité. L'objectif des dialogues oecuménique et interreligieux, différents
naturellement dans leur nature et leur finalité respective, est la recherche
et l’approfondissement de la Vérité. Il s'agit donc d'une tâche noble et
obligatoire pour tout homme de foi, car le Christ lui-même est la Vérité. La construction
des ponts entre les grandes traditions ecclésiales chrétiennes et le dialogue
avec les autres traditions religieuses, exigent un réel effort de connaissance réciproque,
car l'ignorance détruit plus qu'elle ne construit. Par ailleurs, il
n'y a que la Vérité qui permette de vivre authentiquement
le double Commandement de l'Amour que nous a laissé Notre Sauveur. Certes, il faut
suivre avec attention les différentes initiatives entreprises et discerner
celles qui favorisent la connaissance et le respect réciproques, ainsi que la
promotion du dialogue, et éviter celles qui conduisent à des impasses. La bonne volonté
ne suffit pas. Je crois qu'il est bon de commencer par l'écoute, puis de
passer à la discussion théologique pour arriver enfin au témoignage et à l'annonce
de la foi elle-même (cf. Note doctrinale sur certains aspects
de l'évangélisation, n. 12, 3 décembre 2007). Puisse l'Esprit Saint vousdonner
le discernement qui doit caractériser tout Pasteur ! Saint Paul recommande : « Discernez
la valeur de toute chose. Ce qui est bien, gardez-le ! »
(1 Th 5, 21). La société globalisée, pluriculturelle et pluri-religieuse
dans laquelle nous vivons, est une opportunité que nous donne le Seigneur
de proclamer la Vérité et d'exercer l'Amour afin d'atteindre tout être humain
sans distinction, même au-delà des limites de l'Église visible. L'année
qui a précédé mon élection au Siège de Pierre, j'ai eu la joie de venir dans votre
pays pour y présider les cérémonies commémoratives du soixantième anniversaire
du débarquement en Normandie. Rarement comme alors, j'ai senti l'attachement
des fils et des filles de France à la terre de leurs aïeux. La France célébrait alors
sa libération temporelle, au terme d'une guerre cruelle qui avait fait de
nombreuses victimes. Aujourd’hui, c'est surtout en vue d’une véritable libération
spirituelle qu'il convient d'oeuvrer. L'homme a toujours besoin d'être libéré de ses
peurs et de ses péchés. L'homme doit sans cesse apprendre ou réapprendre
que Dieu n'est pas son ennemi, mais son Créateur plein de bonté. L'homme
a besoin de savoir que sa vie a un sens et qu'il est attendu, au terme de son séjour
sur la terre, pour partager à jamais la gloire du Christ dans les cieux.
Votre mission est d'amener la portion du Peuple de Dieu confiée à vos soins à la reconnaissance
de ce terme glorieux. Veuillez trouver ici l'expression de mon admiration et de ma
gratitude pour tout ce que vous faites afin d'aller en ce sens. Veuillez
être assurés de ma prière quotidienne pour chacun de vous. Veuillez croire que
je ne cesse de demander au Seigneur et à sa Mère de vous guider sur votre route. Avec
joie et émotion, je vous confie, très chers Frères dans l'Épiscopat, à Notre Dame
de Lourdes et à sainte Bernadette. La puissance de Dieu s'est toujours déployée
dans la faiblesse. L'Esprit Saint a toujours lavé ce qui était souillé, abreuvé
ce qui était sec, redressé ce qui était déformé. Le Christ Sauveur, qui a bien voulu
faire de nous les instruments de la communication de son amour aux hommes,
ne cessera jamais de vous faire grandir dans la foi, l'espérance et la charité, pour
vous donner la joie d'amener à Lui un nombre croissant d'hommes et de femmes de notre
temps. En vous confiant à sa force de Rédempteur, je vous donne à tous et
de tout coeur une affectueuse Bénédiction Apostolique.