Le commentaire de l'Evangile : Le dimanche des Rameaux
Le père Ludovic Danto commente l'Evangie de ce dimanche des Rameaux : "Un silence
salvateur : celui du Christ"
Texte
du commentaire : En ce dimanche des Rameaux, l’Eglise nous donne d’entendre comme
chaque année le long récit de la passion du Christ. Ce drame qui se déroule devant
nous, nous le connaissons bien et nous sommes appelés en le suivant à ne pas rester
extérieur à ce qui nous est lu. C’est un risque en effet car plus l’Evangile est long,
moins nous l’écoutons avec attention ; plus nous croyons le connaître, moins nous
faisons d’efforts. Chacun d’entre nous retiendra tel ou tel aspect de la Passion suivant
ce que l’Esprit Saint lui soufflera, mais une chose reste certaine, c’est que le drame
de la Passion est un drame qui nous intéresse directement car le sang du juste qui
va être verser est le résultat de la vie de chacun d’entre nous. Nous le savons bien,
c’est nous qui crucifions le Christ par notre péché. Si le drame que connaît le Christ
est circonscrit historiquement dans un temps et dans un lieu, et avec des personnes
bien déterminées, ce drame est tout autant un drame cosmique qui transcende le temps,
et c’est chacun d’entre nous, insultant et dénonçant le Christ, qui se retrouve au
Prétoire ou sur le chemin qui mène au Golgotha. Une attitude de Jésus est très
significative durant son procès et je voudrais y revenir. C’est son silence. On lit
en effet : « tandis que les chefs des prêtres et les anciens l’accusaient, il ne répondit
rien. Alors Pilate lui dit : « tu n’entends pas tous les témoignages portés contre
toi ? » Mais Jésus ne lui répondit plus un mot si bien que le gouverneur était très
étonné ». En fait, contrairement à Pilate, ce silence du Christ ne doit pas nous étonner.
Il est capital dans l’œuvre de salut que le Fils de l’homme est entrain d’accomplir.
Dans la Bible, une chose apparaît très claire : le sang de l’innocent retombe toujours
sur le coupable… Et dans cet ordre d’idées, une attitude est montrée comme gravissime,
celle d’accuser faussement un innocent. Une telle accusation mensongère porte immanquablement
en retour à une condamnation sans appel du dénonciateur… Nous pouvons penser par exemple
à Suzanne accusée faussement par les vieillards. Et bien, ces vieillards libidineux
souffriront la peine que Suzanne aurait encourue, si elle avait été reconnue coupable :
en l’occurrence la mort… Avec Jésus, nous nous trouvons dans une situation analogue.
Le Christ est l’innocent par excellence et il est faussement accusé par la foule.
La foule comme nous l’avons rappelé, ce n’est pas seulement les personnes qui se trouvaient
là ce jour-là, c’est l’humanité entière qui par son péché condamne le Christ dont
elle ne peut supporter l’innocence : il est tellement intolérable – l’expérience nous
le démontre – de devoir souffrir la simple présence d’un homme qui vous renvoie votre
image telle qu’elle est, beaucoup moins lisse et brillante que celle que l’on aime
à montrer aux autres… devant cette fausse accusation donc de la foule, le Christ se
taît car il n’est pas venu condamner mais sauver l’humanité… En effet, dans la logique
biblique du procès que nous avons rappelé, si le Christ avait parlé, si le Christ
avait fait la preuve de son innocence, alors ceux qui l’accusaient devaient recevoir
la condamnation qu’ils espéraient pour le Seigneur : la mort. Non seulement la foule
des présents eut été appelée à mourir – et elle ne s’y trompe pas elle qui déclare :
« son sang, qu’il soit sur nous et nos enfants » –, mais l’humanité entière qui l’accusait
ainsi faussement eut été appelée elle aussi à périr… Or le Christ est venu sauver
ce qui était perdu. Le silence du Christ apparaît donc comme un instant capital.
Une seule parole et l’humanité entière devait être condamnée… seul le silence de celui
dont on a ridiculisé la royauté et la mort pouvait porter au salut de tous… Et c’est
ce qui est arrivé. Aussi en ce dimanche, méditons donc l’humilité de Dieu qui
se taît pour sauver l’humanité blessée, humanité dont chacun d’entre nous est membre.