2006-09-22 11:39:06

Le Père Grégory Woimbée commente l'Evangile.


(RV-22 septembre 2006) Le commentaire de l'Evangile du 25ème dimanche du temps ordinaire. Evangile selon saint Marc (9,30-37)

« Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier ».

Donc, pour être le premier, c’est-à-dire être le plus grand, il faut se faire le serviteur de tous. La grandeur naît de la servitude. Le serviteur est plus grand que le maître. Voulez-vous savoir ce qu’est la grandeur ? Alors vivez ce qu’est le service. En grec, le même mot désigne le serviteur et l’enfant. Si donc vous voulez savoir ce qu’est un serviteur, regardez ce qu’est un enfant. L’enfant n’est pas l’être innocent, l’être sans tâche, l’être parfait. Non ce n’est pas l’innocence qui constitue un enfant. Cela c’est une symbolique erronée. L’enfant n’est pas l’idéal de la pureté, et donc la grandeur du chrétien n’est pas dans cette naïve conception des choses. L’enfant est fondamentalement celui qui dépend en tout de l’autre, c’est une dépendance totale à l’autre. Il est l’idéal de l’abandon. Son identité, ce qu’il est, est purement entre les mains d’une altérité, d’un autre. Autrement dit, l’enfant symbolise la confiance et la vulnérabilité, puisque sa vie, sa croissance reposent en l’autre. L’enfant est fondamentalement ce qui ne peut pas être seul. Il représente la nécessité d’un collectif, d’une communauté, d’un bien commun qu’il partage avec un autre. L’enfant symbolise la solidarité du groupe parce que sans elle, tout seul, il ne peut vivre ou même survivre.
Nous confondons généralement l’enfant et l’adulte qui refuse de grandir. L’enfant n’est pas l’échec de l’âge adulte, il en est le seuil, la préparation, le passage. Aujourd’hui, le matérialisme consumériste et la culture du jeu et du loisir font de nous d’éternels enfants ; certes nous restons dans une totale dépendance, mais cette dépendance vient d’un refus du service. Les grands enfants veulent continuer à être servis, nourris, logés, blanchis. Partout, on revendique un droit à l’irresponsabilité. Or l’abandon à l’autre n’est pas la paresse de soi. Etre éduqué à l’âge adulte, c’est autre chose que de vivre en assisté, aux crochets de l’autre. Dépendre d’un autre, ce n’est pas vivre aux dépens de l’autre, mais vivre par lui, avec lui, en lui, pour lui. Notre société contemporaine ne comprend plus ce qu’est un enfant ou ce qu’est l’enfance, ni non plus ce qu’est la confiance ou l’abandon. L’enfant-roi n’est qu’un objet de consommation comme un autre. Ce n’est pas lui que le Christ place au milieu des apôtres. C’est la fragilité qu’il célèbre non le caprice. L’enfant est devenu une sorte d’idole et surtout une sorte d’icône publicitaire. Un enfant sur une affiche ça fait vendre, ça fait consommer. Le Christ nous parle d’enfance spirituelle, d’abandon spirituel, de fragilité spirituelle. Nous sommes comme des enfants en Dieu, car nous sommes des fils en Dieu, car nous sommes nés en Dieu, nous devons grandir en Dieu, mûrir en Dieu, vieillir en Dieu, mourir en Dieu, ressusciter en Dieu. Nous demeurons toujours ses enfants, malgré l’âge, malgré la trahison, malgré la chute.
L’enfant représente le mieux l’idéal de la grandeur chrétienne, parce que la grandeur chrétienne est cette totale remise entre les mains de l’autre, le père, le frère. Le christianisme célèbre la grandeur du lien, de nos liens sans lesquels nous ne sommes rien. Le serviteur symbolise cette dépendance, cet abandon, il est pour un autre, et il n’est que cela. Servir, c’est exister en vue d’un autre, à cause d’un autre, c’est se construire en collectif. Le serviteur acquiert le sens d’une âme collective.
Le premier des serviteurs et donc aussi le plus grand, c’est le Christ : livré aux mains des hommes, ils le tueront, et trois jours après sa mort, il ressuscitera. La grandeur extrême de sa résurrection naît de la servitude extrême de sa passion. Si quelqu’un veut ressusciter, qu’il accepte de donner sa vie. Le don devient le principe de la gloire. Alors, si vous voulez être le premier, soyez le dernier, si vous voulez être grand, soyez généreux, offrez-vous, ne vous concevez vivant ou existant que pour l’autre.
Vivre en enfant de Dieu, c’est faire l’expérience d’un amour définitif qui fait grandir, qui conduit à servir, à se donner à la multitude des frères que Dieu nous donne dans sa fécondité et sa paternité universelles.








All the contents on this site are copyrighted ©.