2015-12-26 13:23:00

Centrafrique : le Pape, ange du Seigneur pour Mgr Nzapalainga


(RV) C’est un message de Noël très politique et en forme d’hommage au Pape François que Mgr Dieudonné Nzapalainga, archevêque de Bangui, a publié ce vendredi 25 décembre 2015. A peine un mois après le voyage du Pape en République centrafricaine et l’ouverture de la porte sainte de la cathédrale de Bangui, donnant le coup d’envoi de l’année jubilaire de la Miséricorde, il est revenu sur deux moments forts de cette année pour son pays : le voyage apostolique du Pape donc, et l’élection présidentielle.

Ce scrutin qui doit permettre de mettre fin à la crise politique que traverse le pays depuis 2012, devait se tenir ce dimanche 27 décembre mais il a été reporté pour des questions logistiques de trois jours et devrait être organisé dorénavant le 30 décembre. La crise qui frappe la Centrafrique, écrit Mgr Nzapalainga, est « marquée par la violence, le déplacement massif des populations, la destruction des biens d’autrui, les maladies. Toute chose qui engendre le désespoir et la perte de confiance ».

Le voyage du Pape, manifestation de la gloire de Dieu

A l’occasion de Noël, l’archevêque de Bangui établit un parallèle entre son pays et l’histoire sainte. De la même manière qu’elle s’est manifestée au monde par la naissance de Jésus, la « gloire de Dieu s’est manifestée à nous, avec la récente visite du Pape François en Centrafrique ». Mgr Nzapalainga voit ainsi « dans le récent voyage du Pape François en Centrafrique la visite d’un ange du Seigneur envoyé à nous, bergers des bords de l’Oubangui ».

Car « ce qui se dit de de la Centrafrique d’aujourd’hui est identique à ce qui se disait des bergers du temps de Jésus. Petit pays parmi tant d’autres, la Centrafrique est classée parmi les pays les plus pauvres au monde. Déchirée par la guerre, la violence et la barbarie, elle n’attire personne. Elle est présentée comme une terre de misère et de désespoir où règnent des groupes armés non conventionnels qui n’ont aucun respect pour la vie humaine. Pourtant, c’est à ce pays pauvre, peu attrayant, que le Saint Père, comme l’Ange aux bergers, a choisi d’apporter la Bonne Nouvelle du Dieu de gloire et de miséricorde. »

Le Pape, porteur de la Bonne Nouvelle

Mgr Nzapalainga revient également sur le climat sécuritaire et sur les craintes qui avaient été émises sur la sécurité même du Pape. « On avait présenté cette visite comme un “voyage à haut risque”, un voyage de tous les dangers, qui pouvait lui coûter la vie. Mais, confiant dans le Seigneur et sûr de son amour protecteur, le Messager de la paix, surpassant la peur et le doute, est venu chez nous. Comme l’Ange de l’évangile aux bergers, le Saint Père, nous a apporté une Bonne Nouvelle. Il a rencontré des femmes, des hommes, des enfants, des vieillards, des jeunes, des riches, des pauvres, des déplacés internes, des malades. A chacun de nous, il a parlé de la paix, de la réconciliation, d’amour et de la miséricorde. Il nous a réconfortés, re-suscité l’espérance chez ceux qui l’ont perdue ».

Cette visite a suscité ainsi un vent de solidarité parmi toute la population centrafricaine pour préparer la venue de François, souligne l’archevêque de Bangui. « Le contexte social et politique qui avait prévalu, avant la visite papale, était dominé par des scènes de violence, des incendies de maisons. Des quartiers et des villes étaient divisés. La peur de l’autre et la méfiance se sont installées. A l’arrivée du Pape, chacun est sorti de sa réserve. Nous avons su surmonter nos différends et nous unir pour une même cause. Témoignant ainsi que le mot “Unité” légué par Barthélemy Boganda est une réalité. »

Climat de collaboration dans tout le pays

Mgr Nzapalainga en profite pour remercier les Autorités de la transition ainsi que les autres confessions religieuses du pays, les « frères protestants et musulmans ». Sa reconnaissance va aussi aux forces de la MINUSCA qui ont collaboré avec les forces de l’ordre centrafricaines « pour garantir la sérénité du passage du Pape. En dépit de leurs moyens limités, ces forces ont fait preuve de professionnalisme et d’efficacité ».

Mais l’un des symboles les plus forts de la réussite du voyage du Pape et du nouveau climat qui s’est instauré en Centrafrique par la suite, c’est la situation prévalant dans le quartier Km 5, « considéré jusque-là comme une “enclave”, c'est-à-dire une zone fermée sur elle-même, uniquement habités par nos frères musulmans ».

Ce quartier, rappelle Mgr Nzapalainga, a vu « de nombreuses personnes se mobiliser de l’intérieur de ce quartier. Nous avons vu des banderoles, des chrétiens, catholiques et protestants se mélanger avec leurs frères musulmans pour souhaiter la bienvenue au saint Père à l’entrée de la mosquée centrale. Et quand le Pape François avait fini de délivrer son message, une clameur d’adhésion s’était levée parmi nos frères musulmans. Ce jour-là, spontanément, une foule immense a suivi le cortège papal en direction du stade où avait lieu la grande célébration liturgique de cette merveilleuse journée du 30 novembre 2015. »

Pas de débordement depuis le départ du Pape François

Autre preuve d’un changement dans les attitudes et les mentalités, le calme qui a suivi la mort d’un musulman au lendemain de la visite du Pape. « Généralement, quand ce type de situation se produit, cela déclenche des représailles d’envergure : on tue, on brûle, on détruit des maisons. Miraculeusement, ce jour-là, il n’y a rien eu de pareil », explique l’archevêque.

Au contraire, décrit-t-il, « des habitants du Km5 avaient préféré prendre à témoins des leaders sociaux et religieux invités à constater le fait. Des appels à l’apaisement avaient été lancés. Ainsi, nous avions pu nous rencontrer et dialoguer avec nos frères ». Mgr Nzapalainga prend donc cet exemple comme modèle : « c’est bien ce chemin de dialogue qu’il nous faut prendre désormais pour régler nos différends. Car les représailles aveugles sèment des troubles et des tueries inutiles. Nous rendons grâce à Dieu pour toutes les merveilles que cette visite du Pape François nous a permis de vivre. » Dans le contexte de l’Année de la Miséricorde, l’archevêque de Bangui rappelle que « si nous ouvrons la porte de notre cœur à cette miséricorde, la paix adviendra chez nous ».

Appel aux candidats à la présidentielle

C’est dans ce contexte apaisé que confirme le nonce apostolique à Bangui, que doit se dérouler l’élection présidentielle. Et selon Mgr Nzapalainga, « il est urgent que nous puissions aller aux élections, dans le souci d’abréger les souffrances de nos populations et de garantir une bonne gestion de la chose publique. Cela nécessite que chacun puisse voter en toute sincérité et honnêteté, en choisissant son candidat, non sur la base ethnique, régionale ou religieuse, mais sur la base de son projet de société, de ses mérites et de son intégrité morale ».

L’archevêque de Bangui n’hésite pas ainsi à s’adresser directement « à ces hommes politiques qui entretiennent la zizanie et le désordre, par la manipulation et la provocation » et à les inviter « à un sursaut patriotique, pour cultiver la paix et l’harmonie sociale. Qu’ils s’abstiennent d’enrôler les jeunes dans des conflits qu’ils ont eux- mêmes créé pour assouvir leur désir égoïste de conquête du pouvoir, et de pillage de richesses de ce pays à leur profit et à celui des forces obscures ! »

Reprenant les paroles du Pape, Mgr Nzapalainga invite « les hommes politiques à être les premiers à “incarner avec cohérence dans leur vie les valeurs de l’unité, de la dignité, et du travail, en étant des modèles pour leurs compatriotes”. Le Seigneur Jésus est venu faire “toutes choses nouvelles” (Ap 21, 5). Nous osons espérer une Centrafrique stable et nouvelle ». (XS)








All the contents on this site are copyrighted ©.