2015-07-09 17:44:00

Le Pape en Bolivie : « la richesse d'une société se mesure dans la vie des gens »


(RV) Des dizaines de milliers de Boliviens avaient bravé le froid pour assister ce jeudi matin, sur la Place du Christ-Rédempteur, à Santa Cruz, à la messe d’ouverture du Ve congrès eucharistique national. La célébration a été présidée par le Pape François, arrivé moins de 24 heures plus tôt dans le pays. Une messe multilingue : on y a prié et chanté en espagnol, certes, mais également en guarani, quechua et aymara, les trois principales langues indigènes d’Amérique du Sud. Dans son homélie, le Saint-Père a appelé le peuple bolivien à prendre soin de sa mémoire, à aller à contre-courant d’une logique de rejet, pour promouvoir une culture de communion et d’inclusion.

Le compte-rendu de Manuella Affejee :

A l’ombre de la monumentale statue du Christ-Rédempteur, un autel décoré avec simplicité. Un vent frais fait danser les drapeaux et fanions aux couleurs de la Bolivie et du Vatican qu’agitent les fidèles. Le Pape a appelé ces derniers à préserver la mémoire de leur peuple. Une mémoire souvent anesthésiée, par des situations qui instillent une tristesse mortifère pour l’espérance. C’est cette tristesse qui « nous fait perdre la mémoire du peuple aimé, peuple élu ». Cette perte, assure François, nous désagrège, fait en sorte que nous nous fermons aux autres, spécialement aux pauvres.

« Dans un cœur désespéré, observe le Pape, il est très facile que prenne place la logique qui prétend s’imposer dans le monde d’aujourd’hui. Une logique qui cherche à tout transformer en objet d’échange, de consommation, qui rend tout négociable. Une logique qui prétend donner espace à un petit nombre, en écartant tous ceux qui ne ‘‘produisent’’ pas, qui ne sont pas considérés aptes ou dignes parce qu'apparemment ‘‘les comptes n’y sont pas’’ » a déploré François.

Reprenant l'invitation du Christ lancée à ses disciples lors de l’épisode de la Multiplication des pains - « donnez-leur vous-mêmes à manger » -, le Pape a assuré que cette invitation résonne encore aujourd’hui sur cette place : « ça suffit avec ceux qui sont mis à l’écart, donnez-leur vous-mêmes à manger » a-t-il exhorté. Jésus nous indique la route, celle du miracle. Il prend le pain, le bénit, et le partage : d’une logique de mise à l’écart, le Christ, par ces trois gestes, en fait une logique de communion, de communauté.

« Le partage est la finalité de la bénédiction »

Quand il prend le pain, le Christ « prend très au sérieux la vie des siens, a expliqué le Pape. Il les regarde dans les yeux, et à travers ces yeux, il comprend leur vie, leurs sentiments. Il voit dans ces regards ce qui palpite et ce qui a cessé de palpiter, dans la mémoire et dans le cœur de son peuple ». Il n’est pas question ici d’objets, de biens culturels, mais de personnes. Car, a rappelé François, « la richesse authentique d’une société se mesure dans la vie de ses gens, elle se mesure dans les personnes âgées qui réussissent à transmettre leur sagesse et la mémoire de leur peuple aux plus petits ».

Jésus, ensuite, bénit le Pain. Bénir, « c’est reconnaître que la vie est toujours un don, un cadeau qui, placé entre les mains de Dieu, acquiert une force de multiplication. Notre Père n’enlève rien, il multiplie tout » a souligné le Saint-Père.

Enfin, Jésus partage le pain. Le partage est la finalité de la bénédiction, un engagement à part entière, « qui désire reconstruire la mémoire d’être un peuple saint, un peuple invité, appelé à porter la joie du salut ». Par son geste, « Jésus réussit à créer un courant entre les siens, tous partageaient ce qu’ils avaient ». Le peuple mange ainsi à sa faim, et recueille ce qui reste en sept corbeilles, car « une mémoire prise entre les mains, bénie, et offerte, rassasie toujours un peuple ». L’Église est une communauté qui fait mémoire, a assuré François, avant d’insister : « nous ne sommes pas des personnes isolées, séparées, mais le peuple de la mémoire actualisée et toujours offerte ».








All the contents on this site are copyrighted ©.