2015-06-24 16:47:00

Soeur Nirmala Joshi, un modèle de douceur et de joie


(RV) Entretien - Soeur Nirmala Joshi, qui avait succédé à Mère Teresa à la tête de l’ordre des Missionnaires de la Charité à Calcutta, en Inde, est décédée mardi matin, à l’âge de 81 ans. Modèle de douceur et de joie malgré les souffrances qu’elle a endurées, elle a secondé Mère Teresa dans sa mission auprès des plus pauvres pour ensuite lui succéder.

Olympia Alberti est romancière et chroniqueuse littéraire française, auteur du « Royaume de sa nuit », un livre publié aux éditions First en 2010 qui retrace la vie de cette mère des plus démunis. Pour écrire son livre, elle a mené son enquête en marchant dans les pas de Mère Teresa, depuis l’Irlande jusqu’à Darjeeling, en passant par les bidonvilles de Calcutta où elle a rencontré Sœur Nirmila.

Olympia Alberti revient aujourd’hui avec Marguerite du Chaffaut sur cette rencontre exceptionnelle, une manière de rendre hommage au dévouement extraordinaire de cette petite sœur de Calcutta qui, de 1997 à 2009, a su diriger et faire croitre l’immense œuvre des Missionnaires de la Charité

Elle n’avait pas les angoisses qui ont déchiré Mère Térésa. Son approche du divin était beaucoup moins mystique qu’elle et elle était quelqu’un d’une tranquillité intérieure et d’une paix extraordinaires. A côté d’elle, on n’avait plus peur de rien. Même quand elle avait des choses très fermes devant moi à dire aux autres sœurs, quand elle devait passer une info alors qu’on était en entretien, elle le faisait avec une douceur, une délicatesse, un respect d’autrui tout à fait extraordinaires. Ce qui était frappant, c’était cette alliance d’extrême douceur et de fermeté. Et cette humilité incroyable, jamais on n’aurait pu croire que c’était elle qui avait mené la barque depuis la fin de Mère Térésa.

La personne la plus proche de Mère Térésa, c’était sœur Nirmala, c’était presque sa compagne de route et de cheminement, son second. Quand Mère Térésa était sur le point de mourir, elle s’est tournée vers sœur Nirmala, et elle lui a demandé de lui enlever ses sandales car elle voulait, disait-elle, arriver pieds nus devant son Seigneur.

Et du coup, pour sœur Nirmala, ce qui est particulier, c’est vraiment sa rencontre avec Mère Térésa qui a bouleversé sa vie.

Oui complètement, c’est à partir du moment où elle l’a rencontrée que sa décision a été prise, et qu’ elle a fait partie de celles qu’elle appelait ses filles. Les sœurs fondatrices, celles sur qui Mère Térésa pouvait s’appuyer car il faut savoir que ce qu’elle exigeait d’elles, toutes, c’était très important : elles avaient une assiette, une fourchette et une cuillère, une tasse et une Bible. C’est tout.

Et vous parliez tout à l’heure justement du fait que c’était presque un second pour Mère Térésa ? Quel rôle a-t-elle joué vraiment dans sa vie, quelle place a pu tenir justement sœur Nirmala dans cette nuit traversée par Mère Térésa et du coup dans la construction aussi de toute l’œuvre de missionnaire de Mère Térésa ?

Elle a pu jouer - ça j’en suis certaine - un rôle très important, pas seulement dans l’édification des missionnaires de la Charité mais un rôle au niveau de l’organisation la plus pragmatique. C’était une extraordinaire courroie de transmission, c’est elle qui faisait passer les nouvelles annonces, les ordres, les modifications, les plannings des journées. Car n’oubliez pas que la première mission de Mère Térésa, ça a été d’instruire les enfants dans la rue, de leur apprendre l’alphabet bengalais et puis de leur apprendre leur langue, à lire et à écrire. Elle disait que tout part de l’éducation, c’était quelqu’un de très moderne Mère Térésa et la courroie de transmission pour les Missionnaires de la Charité ça a très vite été Nirmala parce que c’était une femme pragmatique comme Mère Térésa, extrêmement obéissante. Elle avait cette douceur qui permet de faire passer tout sans braquer personne. Donc, je pense que sur ce plan-là, elle a été très bien.

En revanche sur le plan de la mystique, rien. Quand je lui ai parlé des troubles de Mère Térésa, de ses moments de désespoir, elle m’a dit : « je voyais bien que par moment elle était très cassée et quand je lui disais : “est-ce que je peux t’aider”, elle disait : “non, non, c’est entre moi et Dieu” ». Jamais, elle n’a pesé sur les sœurs.

Du coup, de tout ce que vous me dites, on peut vraiment dire que sœur Nirmala, puisqu’elle a pris la suite de Mère Térésa, a permis d’assurer, en quelque sorte la fécondité du travail de Mère Térésa, de l’œuvre missionnaire ?

Oui c’est exactement ça, c’est sa fécondité des actes. Elle la connaissait bien, elle connaissait l’esprit de sa pensée, elle l’avait accompagnée dans nombre de voyage, en Afrique, au Liban etc. Elle avait bougé beaucoup à la suite de Mère Térésa. Vous savez, quand Mère Térésa partait les vingt ou trente dernières années, elle est allée partout au moment de la guerre du Liban, elle est allée au Venezuela, elle est allée à Rome fonder une section des Missionnaires de la Charité pour les drogués. Le visage occidental de la misère et de la pauvreté, ce n’est pas forcément une misère matérielle, c’est de la misère morale qui fait que les jeunes tombent dans la drogue, les addictions, l’alcoolisme etc.

Partout où elle a accompagné Mère Térésa, elle a, entre guillemets, pris des leçons et comme c’était quelqu’un d’extrêmement dévoué, mais un dévouement sans faille pour la Congrégation et d’une extrême fidélité à la pensée de Mère Térésa, elle ne l’aurait pas trahie d’un iota, donc elle était quelqu’un à qui Mère Térésa pouvait déléguer. Le fait-même qu’elle ait toujours tenu à ce qu’elle soit toujours si sainte et non pas « Mother » voulait dire à quel point pour elle, il y avait une gradation dans le travail intérieurement, et elle, elle était vraiment l’élément pragmatique, solide. Elle était le chainon qui permet de rayonner, de dire une telle fera ça, une telle s’occupera des textes, une telle s’occupera de la liturgie, telle autre de la pharmacie. Elle vérifiait mais elle secondait bien.

Son sourire était le garant de quelque chose de si exceptionnel au niveau de la maturité de son âme que je pense que, non seulement elle a parfaitement secondé et accompli les vues et les projets que Mère Térésa avait pour la Congrégation et qu’elle n’a pas pu accomplir, mais qu’elle a remise dans les mains de la sœur Prima d’origine allemande qui a pris la suite - la nouvelle « Mother » comme ils disent - une congrégation en parfait ordre de marche. Après la personnalité extrêmement ferme de Mère Térésa - c’était un bulldozer, car quand elle voulait quelque chose vous aviez intérêt à vous écarter - cela a dû être un très grand contraste pour les sœurs de la Congrégation, que de voir la douceur de sœur Nirmala, et j’aillais dire son obéissance au divin. 

 








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