2015-06-24 13:29:00

Instrumentum : le texte s'est enrichi des difficultés concrètes


(RV) Entretien - Les défis, la vocation et la mission de la famille, ce sont les lignes directrices de l’Instrumentum laboris, le document de travail qui doit servir de base au prochain synode sur la famille d’octobre 2015. Le texte a été rendu public mardi et a été présenté aux journalistes. Il a été élaboré à partir de la Relatio Sinodi, le rapport final du synode d’octobre 2014, avec les réponses au questionnaire envoyé dans les épiscopats du monde entier. Il a également bénéficié d’apports académiques et de 359 observations provenant de différents fidèles, de paroisses ou de diocèses.

Cette feuille de route reprend tous les paragraphes de la Relatio Sinodi y compris les points très discutés, relatifs à l’accès aux sacrements pour les divorcés-remariés et aux unions homosexuelles. L’accent est mis sur un meilleur accompagnement des familles « pilier irremplaçable de la vie sociale ».

Mgr Bruno Feillet, évêque auxiliaire de Reims, délégué suppléant au prochain synode sur la famille présente avec Hélène Destombes sa lecture de ce texte

C’est un document de préparation pour le synode, c’est-à-dire qu’il y a un certain nombre d’options qui sont parfois présentées simultanément en disant qu’il y a un débat entre les personnes divorcées-remariées qui n’est pas du tout si homogène que ça ; je crois que c’est vrai pour d’autres points. Sinon, dans l’ensemble, il est assez homogène dans les positions qu’il présente. Je crois qu’on n’aura pas de difficultés au synode à admettre qu’il faut une bonne formation des prêtres pour accueillir les personnes blessées, qu’il faut former les couples à la préparation au mariage, qu’il est heureux qu’ils puissent avoir un accompagnement dans les années qui suivent pour les aider à bien vivre cet engagement etc.

Percevez-vous dans cette feuille de route un enrichissement issu notamment des réponses au questionnaire envoyé par le Vatican dans le monde entier après le premier synode d’octobre 2014 ?

Oui, un certain nombre de citations bibliques reviennent bien sûr et du point de vue des situations humaines, je crois que ce qui a été enrichi, c’est ce qui vient des régions qui ne sont pas occidentales. Je pense par exemple aux situations de polygamie, aux mariages arrangés, aux violences que subissent les femmes, à l’exploitation sexuelle des femmes et des enfants, toute chose qui ont été peu évoquées, je crois, dans le premier document préparé au synode extraordinaire. Cette fois-ci, ils sont beaucoup plus entendus. Il manque peut-être encore des réflexions sur la dote qui est parfois un empêchement au mariage tant elle est élevée dans certaines cultures, sur le machisme à l’égard des femmes, sur les questions des castes en Inde etc., qui est une question difficile. Mais globalement, je trouve que le document est vraiment enrichi de connaissances, de difficultés bien concrètes qui touchent des gens pas forcément chez nous en Occident.

L’accent a été mis sur l’accompagnement des familles dans tous les sens du terme.

L’accompagnement au mariage, après le mariage, l’accompagnement des familles blessées avec ce que le document appelle le soin pastoral auprès de ces familles blessées pour des questions diverses, soit en les aidant à trouver le chemin du Pardon, soit en les aidant à vivre le Sacrement du mariage ou à affronter les divorces qu’ils ont pu vivre, qu’ils ont dû vivre. Car des fois, certaines personnes ne choisissent pas le divorce. Il y a les souffrances qui rendent la séparation inévitable, les évêques le savent bien. Donc, de ce point de vue-là, il y a un accompagnement très diversifié avec une connaissance très fine de la diversité des situations humaines.

Un accompagnement des personnes en souffrance dans leur vie conjugale, des personnes qui se sont éloignées du magistère de l’Eglise : il y a une attente, une véritable demande en France, vous la sentez ?

Ah oui, on sent qu’il y a une demande. Si on devait faire un sondage en France, il est clair que nous entendrions chez la plupart des catholiques des demandes comme quoi les personnes divorcées qui auraient vécu une deuxième union puissent avoir accès aux sacrements. Ça c’est la demande qu’on entendrait majoritairement. Mais la grande question c’est qu’il faut encore qu’elles soient compatibles avec ceux qui restent fidèles au sacrement de leur mariage et qui s’appuient sur la communion eucharistique pour pouvoir le vivre. Mais le débat est en place, il n’est pas tranché. Je crois que les évêques ont des positions diverses, et on verra comment l’esprit sain aidera au discernement, car comme dit le Pape François : «  ce n’est pas un débat, c’est vraiment un travail de discernement ».

Les évêques ont des positions diverses, cela s’est exprimé lors du précédent synode. Comment abordez-vous ce nouveau synode, avez-vous le sentiment que la discussion sera sereine, nourrie par cette réflexion, par ce document de travail ?

Je l'espère oui, car je crois que le Pape François a vraiment bien expliqué ça. Je crois qu’il regarde le corps synodal, le corps des pères synodaux comme un corps social et lorsqu’on fait des retraites dans l’esprit ignacien, il y a des mouvements spirituels et lorsqu’il y a des mouvements, ça veut dire que la personne vit sa retraite à fond, et bien s’il y a des mouvements à l’intérieur des pères synodaux pour approcher cette réalité de la souffrance des couples séparés, remariés etc. ça veut dire qu’ils sont disponibles globalement à l'action de l'Esprit Saint et donc ce débat, et plus encore ce discernement, va se mener, je l’espère, dans la foi et petit à petit, je pense qu’on va trouver un chemin qui va s’initier et qui permettra à tout le monde de trouver au fond une paix intérieure face au cheminement qui sera proposé.








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