2015-03-20 19:00:00

A Naples, on attend des paroles fortes du Pape François


(RV) Entretiens - Le Pape effectue ce samedi 21 mars une visite pastorale de quelques heures, tout d’abord au sanctuaire marial de Pompéi puis à Naples. Au programme de ce déplacement, bref mais significatif, une rencontre avec les habitants du quartier populaire de Scampia, surnommé il y a quelques années « le supermarché italien des drogues », la visite d’une prison et un déjeuner avec des détenus ainsi qu’un moment partagé avec des jeunes et des malades. Ce voyage intervient un an jour pour jour après la soirée de prière avec des familles des victimes de la mafia, organisée à Rome. Le Pape avait alors exhorté les mafieux à « arrêter de faire le mal », à se convertir « pour ne pas finir en enfer ». Un sujet préparé par Hélène Destombes

Cette visite du Pape François, sur les traces de ses prédécesseurs Jean-Paul II et Benoît XVI, suscite beaucoup d’espoir. Naples est une terre de contrastes : à la fois gangrénée par le crime organisé et la corruption, mais aussi porteuse d’une grande vitalité. C’est le constat de l’abbé Christian Fréderic Ndounokon, à Naples depuis 5 ans :

« Le Pape vient toucher du doigt la réalité : les souffrances et l’espérance que traverse notre ville, les contradictions, la pauvreté et le bien-être, le retard et le développement, l’égoïsme et la générosité. Quand je suis arrivé à Naples, je pensais trouver une terre délaissée. Naples a reçu cette étiquette-là et ça pèse dans les consciences. Mais notre Naples, c’est aussi une terre riche dans sa culture et dans sa diversité ».

Les visites du Pape Jean-Paul II à Naples en 1979 et en 1990 étaient placées sous le signe de l’espérance tout comme celle de Benoît XVI en 2007 qui avait appelé à lutter contre toutes les formes de violence y compris celle de la camorra, la mafia locale. Comment la situation a-t-elle évoluée ? Le père Pierpaolo Ottone, vicaire de la paroisse de San Francesco Caracciolo, à Miano :

« Je dois dire que depuis la visite de Jean-Paul II beaucoup de choses ont changé. Il y a eu des actions entreprises dans le monde laïc et religieux. L’Eglise a pris conscience qu’elle devait intervenir non seulement au niveau pastoral, mais aussi au niveau social. Même du point de vue urbanistique, il y a beaucoup à faire parce que cet aspect-là aussi est important ; un environnement viable. Certainement les esprits ont été secoués mais il y a encore tout un aspect plus caché qui est culturel. Il faudrait modifier la conscience collective de ce territoire. On attend donc, sur ce point un encouragement du Pape mais aussi des directives pour intervenir. » 

Naples, ville martyrisée, c’est ainsi que la considèrent de nombreux Napolitains qui disent se sentir abandonnés par les autorités locales et nationales. Ils attendent donc des paroles fortes du Pape. L'abbé Christian Fréderic Ndounokon :

« On attend du Pape un message vraiment fort à l’endroit de politiques qui, à un moment donné, donnent l’impression qu’ils sont absents. Et on espère vraiment du Pape qu’il donne courage en dénonçant ces crimes et en rappelant un peu aux responsables leur devoir. »

Il y a un an à Rome, lors d'une soirée de prière bouleversante avec des familles touchées par la mafia, le pape François avait prié pour que « le sens de la responsabilité, petit à petit, gagne contre la corruption », assainissant « les comportements, les relations, les choix, le tissu social ». Comment son message sera-t-il accueilli à Naples ? Le père François de La Salle, aumônier dans un hôpital psychiatrique judiciaire, depuis 30 ans à Naples, est confiant :

« Je crois que le Pape François qui a ce regard sur la personne, comme éducateur, dit à la personne : « Lève-toi ! Aie confiance ! Dieu est avec toi, aie confiance ! ». Et son parcours de vie, c’est une des meilleurs choses que nous tous, mais les Napolitains en particulier peuvent écouter. Il écrit sur la corruption, par exemple, en disant : Ce n’est pas un phénomène dans l’air, c’est dans les cœurs. C’est quelque chose d’extraordinaire. Et bien sûr, chacun de nous doit s’interroger. C’est un personnage extrêmement crédible et je crois que ça va faire beaucoup de bien ».

Réconforter les Napolitains, faire place à l’espérance mais aussi attirer l’attention sur la situation dramatique du Mezzogiorno : une visite pastorale aux multiples facettes. un déplacement à la périphérie qui, semble-t-il, revêt aussi une dimension symbolique.     








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