Devant la communauté Sant'Egidio, le Pape appelle l'Europe à retrouver ses racines
(RV) Les orages qui se sont abattus sur Rome ne les ont pas découragés, au contraire
: ils sont venus par milliers accueillir et saluer le Pape dimanche après-midi dans
le Trastevere, ce quartier romain populaire où est née il y a un peu plus de 45 ans
la communauté Sant’Egidio, que François est allé rencontrer. Le compte-rendu de
Xavier Sartre
Le
Souverain Pontife a été accueilli vers 16h30 sur la place Saint-Calixte qui jouxte
la basilique Sainte Marie in Trastevere par Andrea Riccardi, le fondateur de la communauté,
et a cheminé jusqu’à la basilique en prenant le temps de saluer les très nombreuses
personnes massées aux abords, parmi lesquelles de nombreux jeunes.
Puis François
est entré dans la basilique Sainte Marie pour présider une rencontre de prière. Un
millier de personnes y avaient pris place. Des visages qui sont à l’image de ceux
à qui vient en aide Sant’Egidio : des pauvres, des handicapés, des immigrés, des chômeurs
mais aussi des enfants. Quelques réfugiés du drame de Lampedusa du 3 octobre dernier
avaient également pris place dans l'église.
Sant’Egidio est très active aussi
dans la médiation de paix et le dialogue interreligieux et cette dimension était présente
avec la présence de membres de la communauté juive, mais aussi celle de l’archevêque
syro-orthodoxe de Damas qui a demandé à ce que l’on prie pour le peuple syrien, «
otage de la guerre » qui ravage son pays.
Aider l’Europe à retrouver
ses racines
En accueillant le Pape, Andrea Riccardi a souligné que «
la périphérie » qui lui est chère est l’orientation de la communauté. Des témoignages
émouvants se sont ensuite succédés : une personne âgée, une femme handicapée ou encore
un rom, tous ont rappelé combien la communauté Sant’Egidio avait changé leur vie en
étant un lieu d’accueil, d’écoute et d’amitié.
Francescaa 12 ans.
Elle a témoigné dimanche devant le Pape pour parler de son expérience avec les "Jeunes
pour la paix"
Dawood
Yousefi vient d'Afghanistan, pays qu'il a fui pour « éviter de tuer et d'être
tué ». Il a raconté son terrible voyage jusqu'à Rome, où il est devenu
l'ami de la communauté
Le Pape François
les a écoutés très concentré, avant de prendre la parole. Le Saint-Père a ainsi rendu
hommage au travail de la communauté et à ces personnes vulnérables. « Un peuple
qui ne prend pas soin des personnes âgées, des enfants, est un peuple sans avenir,
sans espérance », a-t-il dénoncé en pointant les maux de l’Europe, qui marginalise
les personnes âgées et où le marché du travail met tant de jeunes au chômage. Le Pape
a eu des mots durs envers cette Europe qui est repliée sur elle-même et où, a-t-il
ajouté, nombreux sont ceux qui veulent enlever du dictionnaire le mot « solidarité
». « L’Europe est fatiguée, nous devons l’aider à se renouveler, à retrouver ses
racines », a plaidé le Souverain Pontife.
Au centre de l’économie mondiale,
il n’y pas l’homme et la femme, détaille François, mais « l’argent idole ».
Et à cause de cela, les enfants et les personnes âgées sont « écartés ». Derrière
ce comportement se trouve une « euthanasie cachée », lâche le Pape : « ce
qui ne sert à rien est écarté. Ce qui ne produit rien est écarté. La crise aujourd’hui
est si grande que même les jeunes sont écartés ». Le pape a donc eu une pensée
pour ces « 75 millions de jeunes jusqu’à 25 ans qui sont des “ni ni” : ni travail
ni études. Et cela se passe dans une Europe fatiguée ».
Prière pour
l'Irak, la Centrafrique, l'Ukraine et le Nigeria
« Vous avez appris
à voir les autres, en particulier les plus pauvres », a aussi affirmé le Pape,
en s’adressant aux membres de la communauté Sant-Egidio. En reprenant les mots d’Andrea
Riccardi, il espère que se « confondent celui qui aide et celui qui est aidé ».
Jésus
l’a dit de lui-même a conclu François : « La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs
est devenue la pierre angulaire ». Il en va de même pour la société : elle doit
s’appuyer sur les personnes âgées et les pauvres. En partant, le Pape a invité les
fidèles à prier pour les pauvres et pour les peuples qui souffrent de la guerre. Car
la prière est « l’arme que nous avons pour toucher le cœur de Dieu ». Il n’a
enfin pas oublié de les inviter à prier pour lui, pour son travail qui est « insalubre
». Le Pape a ainsi affirmé avoir besoin « d’heures supplémentaires de prière
».
A l'issue de la cérémonie où l'on a prié pour l'Irak, la Centrafrique,
l'Ukraine ou encore le Nigeria, le Pape s'est entretenu en privé avec les dirigeants
de Sant'Egidio. Il s'est rendu à pied dans leur siège, à quelques dizaines de mètres
de la basilique, place Sant'Egidio.
Une délégation de la communauté hébraïque
de Rome a profité de cette visite pour inviter François à visiter la synagogue de
Rome, où se sont déjà rendus Jean-Paul II en 1986 et Benoît XVI en 2009.
Photo
: le Pape François, sur un écran géant devant la basilique Sainte Marie in Trastevere,
alors qu'il salue les fidèles venus l'accueillir