«En trois jours, ces trois hommes rebâtiront peut-être une paix malade»
(RV) Entretien - Le voyage du Pape en Terre Sainte, qui doit s’achever lundi
soir, aura été marqué de gestes forts et inédits, tant pour l’œcuménisme que pour
le dialogue interreligieux. Pour le journaliste Jean-Marie Guénois, rédacteur
en chef adjoint au Figaro, en charge des affaires religieuses, François apporte
un souffle nouveau et une initiative de paix imprévue, « à un moment où personne
n’y croit plus » et qui remet le Saint-Siège sur l’échiquier géopolitique. Il
est interrogé par Bernard Decottignies, notre envoyé spécial en Terre Sainte :
Parmi
tous les actes marquants de ce voyage, le journaliste retient surtout la portée symbolique
de l’accolade devant le Mur occidental entre François et ses amis argentins, le rabbin
Abraham Skorka, et le professeur musulman Omar Abboud, président de l'Institut du
dialogue interreligieux de Buenos Aires, qui avaient désiré l’accompagner durant ce
voyage. «Cette image est peut-être prophétique. Pour moi c’est vraiment l’image
qui restera de ce pèlerinage», estime-t-il. «C’est le charisme du cœur, et
montre qu’on peut bâtir des portes dans le mur, avec des juifs et des musulmans».
Se référant aux paroles du Christ dans l’Évangile, en trois jours je rebâtirai le
Temple : «Ces trois hommes en trois jours rebâtiront peut-être une paix malade,
ils ont su trouver l’antidote qui est celui du cœur».
La diplomatie
du coeur
Pour Jean-Marie Guénois, la personnalité du Pape, à la fois simple
et déterminée, est très importante dans l’analyse de cette nouvelle initiative de
paix. « C’est un homme têtu qui voit un objectif, en l’occurrence la paix, avance
envers et contre tout pour faire bouger les lignes, changer les habitudes».
Cette
méthode, notamment dans l’invitation faite aux deux présidents israélien et palestinien
de venir prier avec lui à Rome, est nouvelle. «Ce n’est pas forcément la diplomatie
du Vatican, telle qu’on l’a connue jusqu’ici. On a quelqu'un qui va sur le champ,
y croit ». Et parle au cœur, avec une simplicité désarmante, et cela interroge
les gens, les questionnant sur leur possibilité d'avancer.
Une voie du
coeur à explorer pour l'oecuménisme
La célébration oecuménique historique
au Saint Sépulcre de Jérusalem dimanche soir, rassemblant les chefs de toutes les
Eglises chrétiennes de Jérusalem a en revanche moins convaincu le journaliste. «La
cérémonie était très liturgique, très codifiée». Il préconise aussi pour l'oecuménisme
cette nouvelle voie du coeur, déjà employée par François pour le dialogue interreligieux
et la géopolitique. « Cette voie nouvelle on ne l’a pas encore mise en œuvre pour
l’œcuménisme et l’unité des chrétiens. »
Photo : accolade devant
le Mur occidental entre François et ses amis argentins, le rabbin Abraham Skorka,
et le professeur musulman Omar Abboud, président de l'Institut du dialogue interreligieux
de Buenos Aires