Sous prétexte de « résoudre les tensions religieuses » croissantes au Sri Lanka,
le gouvernement vient de créer une police spéciale dépendant directement du Premier
ministre. Une initiative qui alarme les minorités de l’île, inquiètes d'une possible
collusion entre cette nouvelle unité et le pouvoir sri-lankais, dominé par les partis
bouddhistes nationalistes.
La nouvelle force de sécurité, qui a pris ses fonctions
le 28 avril, est officiellement chargée d’enquêter sur les constructions non autorisées
de lieux de culte, l’accaparement des terres pour y bâtir des édifices religieux et
les affrontements interreligieux. L’inspecteur principal Anura Senanayaka a déclaré
aux médias que son unité spéciale traiterait également les conversions illégales,
les troubles à l’ordre public de nature confessionnelle et les menaces envers les
religieux.
Ce discours, qui se veut rassurant, a cependant déclenché de vives
inquiétudes au sein des minorités religieuses de l’île. Les communautés chrétiennes,
hindoues et musulmanes subissent déjà une importante discrimination, dans un pays
où la puissante majorité bouddhiste est alliée au pouvoir. Ces minorités craignent
que la police religieuse ne vienne renforcer les abus des autorités locales à leur
encontre.
40 églises chrétiennes attaquées
Ces dernières années,
et notamment ces derniers mois, les agressions des bouddhistes nationalistes à l’encontre
des minorités chrétiennes et musulmanes ont augmenté de façon constante. Les plaintes
se sont accumulées contre la police accusée d’inaction, voire de complicité avec les
agresseurs.
Selon l’agence d'information catholique "Ucanews", au moins 30
magasins musulmans et autres édifices, dont des mosquées, ont été attaqués en 2013.
L’"Alliance Nationale Chrétienne" (NCA) du Sri Lanka a rapporté qu'au moins une quarantaine
d’églises chrétiennes ont été la cible des bouddhistes extrémistes, depuis le début
2014.
Quant aux « récents conflits interreligieux » auxquels fait allusion
le gouvernement, il s’agit en réalité d’une vague de répression menée par les bouddhistes
à l’encontre des minorités de l’île. A l'instar de la NCA, le Conseil musulman du
Sri Lanka a publiquement émis des réserves concernant la création de la nouvelle unité
et plus particulièrement son indépendance, la police spéciale étant rattachée au cabinet
du Premier ministre, lequel fonctionne étroitement avec le parti nationaliste bouddhiste
"Jathika Hela Urumaya" (JHU), au sein de la coalition au pouvoir. (apic/Eglises
d'Asie)
Photo: catholiques à Colombo lors du Vendredi Saint