2014-04-22 18:13:33

Jean XXIII et Jean-Paul II, bonté et prière


(RV) Le 27 avril, deux immenses figures papales seront canonisées. Jean XXIII et Jean-Paul II, très différents dans leurs parcours et leur formation, ont pourtant bien des points communs. Ce sont tout d'abord deux Papes qui ont été très populaires et qui ont ouvert, chacun à leur manière, de nouveaux horizons à l'Église.

La bonté du Pape Jean XXIII, Angello Roncalli, est restée dans tous les esprits, écrit le cardinal Giovanni Battista Re dans l'Osservatore Romano. A la veille de l'ouverture du Concile en 1962, on se souvient de ses mots adressés à tous les fidèles massés place Saint-Pierre.Quand vous rentrerez chez vous et retrouverez vos enfants, avait alors dit le Pape, « faites leur une caresse en disant 'c'est la caresse du Pape'». Une gestuelle et une attention aux gens qui n'est pas sans rappeler celle du pape François.

Vatican II, un pont jeté vers le monde moderne

Cette bonté a conquis le monde entier. Jean XXIII était d'un caractère serein et optimiste, mais sa personnalité a aussi été le fruit d'une profonde vie de prière et d'effort ascétique appris à l'école de l'Evangile dans l'optique de s'améliorer. Sans toutefois jamais oublier ce qu'il devait à ses parents, ses premiers éducateurs. « Depuis que j'ai quitté la maison, à l'âge de 10 ans, j'ai lu beaucoup de livres, et j''ai appris tant de choses que vous ne pouviez pas m'enseigner », écrit Angello Roncalli à ses parents alors qu'il est nonce en Bulgarie. Mais les choses les plus précieuses et importantes sont finalement celles que j'ai apprises de vous et qui m'ont permis d'apprécier et donner de la valeur à d'autres enseignements par la suite ».

Jean XXIII a toujours essayé d'établir des rapports d'amitié cordiale avec les personnes éloignées de l'Église et de la foi chrétienne. Son optique a toujours été de construire des ponts, et non des murs. Et le Concile Vatican II a été un immense pont jeté vers le monde moderne. Ses deux encycliques les plus mémorables, Mater e Magistra, et Pacem in terris sont aussi deux sortes de ponts jetés vers tous les hommes de bonne volonté sur les thèmes de l'économie, du travail, de la justice sociale et de la paix. Nonce, patriarche de Venise ou Pape, Angelo Rocalli a réussi à ouvrir les portes du dialogue et à résoudre bien des problèmes grâce à sa bonté.

Les 26 années et demi de pontificat de Jean-Paul II ont tout autant marqué le monde. Si Karol Wojtyla a été un Pape d'action, c'était un Souverain Pontife également très attaché à la prière.
C’était un homme de certitudes, mais aussi un Pape avec une grande profondeur de pensée, capable de parler aux foules, avec une grande facilité pour les langues et un sens de l’humour adapté aux circonstances. Mais plus que tout, « ce qui marquait, c'était sa capacité à s’immerger dans la prière, manifestation de son union profonde et vivante avec Dieu », poursuit le cardinal Giovanni Battista Re. Quand il se recueillait, plus rien ne semblait l’atteindre, tant était forte sa rencontre avec Dieu.

Tous ses discours ou homélies commençaient sur le papier par une invocation ou une prière en latin, écrite sur la partie droite de la feuille qu’il lisait. Totus tuus ego sum, pouvait-on lire sur la première feuille, suivie de omnia mea tua sunt, sur les autres pages.

La prière pour trouver le chemin juste

Au quotidien, tous ses changements d’activité étaient rythmés par une brève prière et il préparait ses rencontres de la journée ou de la semaine en priant. Il le disait parfois à ses interlocuteurs, comme lors de sa rencontre avec Mikhaïl Gorbatchev en 1989, à qui il avait confié au début de l'entretien qu’il avait prié pour sa personne et le déroulement de la rencontre. Toutes ses décisions étaient également précédées de prières et plus la décision était importante, plus long était en général ce temps dédié à la prière.

Quand ses interlocuteurs lui faisaient une demande ou une proposition, il répondait qu’il désirait y réfléchir avant de décider. En fait, il gagnait du temps pour consulter quelques personnes, -il a toujours eu beaucoup de contacts-, mais surtout, il souhaitait prier sur le sujet évoqué. Si la solution ne venait pas rapidement, il affirmait : « nous devons encore prier pour que le Seigneur nous vienne en aide ». Jean-Paul II se fiait à la prière pour trouver le juste chemin à suivre.

« La prière est le premier devoir et quasiment le premier message du Pape, tout comme elle est la première condition de son service dans l’Église et dans le monde », avait dit Jean-Paul II deux semaines après son élection au trône de Pierre. L’Eucharistie, le Crucifix et la Madone étaient les trois épicentres de sa piété. Et il y avait, surtout, la messe, la réalité la plus haute et la plus sacrée de chacune de ses journées. « La messe est au centre de ma vie et de chacune de mes journées», avait-il dit lors d’une rencontre avec des prêtres en 1995.

Levé à l'aube pour le chemin de croix

Le cardinal Innocenti, nonce en Espagne en 1995 a pu alors assister directement à la dévotion avec laquelle Jean-Paul II ponctuait son quotidien de prière, et au chemin de croix qu’il effectuait tous les vendredis. L’ancien nonce avait confié l'anecdote suivante au cardinal Giovanni Battista Re. Le Pape effectuait son premier voyage officiel en Espagne et avait eu un jeudi particulièrement chargé. Il n’avait pu dîner qu’à 21h et la journée suivante, le vendredi, était tout aussi rempli avec un petit déjeuner prévu à 6h30 et un départ pour Séville prévu dès 7h. Le vendredi, le nonce, qui avait cédé sa chambre au Pape pour dormir dans un petit lit du grenier s'était réveillé très tôt. Il devait veiller au bon déroulement de la visite. Passant devant l'Église de la nonciature, à 5h30, il y vit de la lumière. Pensant que quelqu'un avait oublié de l'éteindre veille, il ouvrit la porte et...vit Jean-Paul II agenouillé au sol devant une des stations du chemin de Croix. Sa journée allait être très chargée à Séville et à Grenade, mais le Pape s’était réveillé plus tôt pour faire le chemin de Croix.

Jean-Paul II et la prière de demande

Le Pape Wojtyla avait livré quelques-unes de ses réflexions sur la prière à André Frossard au cours de conversations à Castel Gandolfo en 1982. Notamment sur la prière de demande, par rapport à la prière d'adoration, l'action de grâce et la demande de pardon. « Il fut un temps où il me semblait qu’il fallait limiter la "prière de demande"( prière d’intercession pour une personne ou une situation) pour laisser plus de temps à la prière d’adoration, de louange et d'action de grâce, la jugeant plus noble. Ce temps est révolu. Plus j’avance sur le chemin que la Providence m’a indiqué, plus je ressens le besoin de recourir à cette forme de prière, et plus le cercle des demandes à Dieu s’élargit », expliquait ainsi le Pape à André Fossard, dans l’ouvrage N’ayez pas peur !*.

Jean-Paul II a évoqué à plusieurs reprises la « géographie de la prière », confiant que pendant qu’il priait, il faisait mentalement un tour du monde, s’arrêtant sur les nations les plus oppressées et dans le besoin. Jean-Paul II était sans aucun doute un mystique. Mais un mystique attentif aux personnes et aux situations, et qui a grandement influencé le cours de l’histoire. Le principal moteur de Jean-Paul II fut son désir de mener les hommes et les femmes de notre époque plus près de Dieu et de donner à celui-ci un statut complet de citoyen dans notre monde. (Avec l’Osservatore Romano, inspiré de l'article de Giovanni Battista Re)



*Jean-Paul II, N’ayez pas peur ! André Frossard dialogue avec Jean-Paul II, Paris, Robert Laffont, 1982, p. 46.
















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