(RV) Entretien- Le Pape François reçoit Barack Obama ce jeudi matin. Cette
visite marque le 30e anniversaire des relations diplomatiques officielles entre les
Etats-Unis et le Saint-Siège. Depuis Eisenhower dans les années 1950, presque tous
les présidents américains ont été reçus au Vatican. Barack Obama avait été reçu par
Benoît XVI en 2009. Ce sera cette fois sa première rencontre avec le Pape François,
dont il a loué à de nombreuses reprises les engagements dans le domaine social.
Des
pierres d’achoppement entre l’Eglise et l’administration Obama subsistent toutefois,
notamment sur le mariage homosexuel et la contraception.
Selon Mgr Anthony
Figueiredo, directeur au collège pontifical nord-américain à Rome, ces questions
de bioéthique devraient aussi être abordées durant cette rencontre :
Comment
les relations entre le Saint-Siège et les États-Unis ont-elles évolué depuis la visite
de Barack Obama en 2009 ? C’est important, même si c’est tout à fait normal
que le Pape reçoive un chef d’État. Je me souviens très bien que quand le Pape Jean-Paul
II est mort, trois présidents américains sont venus. Le Pape Benoît a reçu le président
Bush et ensuite, le président Obama. C’est tout à fait normal mais très important
en ce moment parce que je pense que le président Obama a vu quelque chose de spécial
dans le Pape François, qui a ce grand charisme, qui attire les gens. Je pense que
c’est très important pour le président Obama de venir ici à Rome pour rencontrer le
Pape François.
Dans l’entourage du président Obama, il y a un certain
nombre de personnalités catholiques, notamment John Kerry et Joe Biden. Est-ce que
ces personnalités contribuent à une certaine compréhension entre le Saint-Siège et
l’administration Obama, ou est-ce qu’elles sont éloignées des positions de l’Église
? Moi-même, j’ai visité la Maison Blanche et j’ai parlé avec le vice-président
Biden. J’ai parlé avec lui de ces questions éthiques. Il tient à sa position éthique
comme catholique mais il croit qu’il faut toujours donner la liberté à la personne.
Nous pensons autrement. Nous pensons qu’il faut former les personnes, et l’État à
une responsabilité très grande. On ne peut pas choisir les choses, les questions éthiques
avec la seule logique de la majorité, parce que nous avons dans le cœur une loi qui
vient de Dieu. Alors maintenant, il y aussi le plan de santé Obama qui oblige les
institutions religieuses à rembourser leurs employés pour la pilule abortive ou pour
la contraception. Ça, ce n’est pas de la liberté. On oblige les personnes à faire
comme cela. Je pense aussi que le Pape lorsqu’il va voir le Président Obama, il va
lui dire quelque chose à ce sujet. Il faut garder la liberté des personnes qui est
très importante pour les États-Unis et pour tout le monde.
Cette question
de la contraception, et peut-être aussi celle du mariage gay qui pose aussi beaucoup
de questions en France, c’est un sujet de tensions diplomatiques entre le Saint-Siège
et Barack Obama ? Je pense que oui, parce que la famille est très importante.
La famille est la cellule fondamentale de toutes les sociétés. Si on n’a pas de père,
si on n’a pas de mère, si on n’a pas la famille, il y a des problèmes très grands
au sein des familles. L’an prochain, on va avoir à Philadelphie cette réunion très
importante, la Rencontre mondiale des Familles. On espère aussi que le Pape va aller
là-bas pour défendre la famille. Si on change, au niveau du gouvernement, la structure
de la famille, on dérange toute la société. L’Église a cette obligation de dire au
Président : « Non, il faut défendre la famille, il ne faut pas donner ces choix qui
par après, ont des conséquences ». Ce qui se passe aux États-Unis, un peu comme le
Coca-Cola, ça se propage aussi en Europe et dans le monde entier. Nous avons donc
une responsabilité particulière.
Vous avez fait allusion à la rencontre
mondiale des familles qui se tiendra à Philadelphie en 2015. Le message chrétien sur
la famille, est-ce qu’il est bien compris dans les médias américains ou est-ce qu’il
est souvent caricaturé, déformé comme il l’est parfois en Europe ? Je pense
que maintenant, on est arrivé à une situation très difficile pour la famille. Aux
États-Unis, les médias ont une grande influence pour former une opinion publique et
je ne pense pas que cela soit bien compris. Ça, aujourd’hui, c’est très important
pour les évêques, pour les pasteurs, car ils défendent la famille. On peut très bien
voir que quand on détruit la famille, on détruit aussi la société : on le voit par
la violence et par beaucoup d’autres choses. Je ne pense pas que c’est très bien compris
et ça, aujourd’hui, c’est vraiment un devoir de l’Église, des évêques, des pasteurs
et de nous tous que de défendre les familles. Et je connais des familles catholiques
aux États-Unis qui sont merveilleuses, notamment parmi les nouvelles communautés.
L’épiscopat
américain a retrouvé un certain dynamisme, une visibilité médiatique. Quand on regarde
CNN, vu de France, on est impressionné par la visibilité de l’Église américaine. Il
y a beaucoup de cardinaux qui bénéficient actuellement d’une forte audience, qui sont
très connus même sur le plan international. Est-ce que l’Église est aujourd’hui plus
décomplexée qu’elle l’était il y a 10 ou 20 ans ou est-ce que ça fait simplement partie
de la culture américaine de s’exprimer plus ouvertement qu’on ne le fait en France
? Aux États-Unis, il y a 400 évêques. C’est tout à fait normal qu’il y ait
des évêques qui soulignent le droit canonique. Il y a des évêques qui soulignent la
doctrine de l’Église. Il y a des évêques qui soulignent aussi les matières sociales.
Mais l’autre jour, le Pape François a parlé des points communs des évêques. Quel est
ce point commun ? Etre témoin du Christ ressuscité. C’est la chose la plus importante.
Je pense que quand on en parle, on ne voit plus les différences mais ce point commun.
On attire les personnes en annonçant toujours le Christ ressuscité. Il n’y a rien
qui est impossible si je crois en le Christ ressuscité. C’est ça que les évêques doivent
annoncer aujourd’hui.