5 000 Chinois aux obsèques de l'ex-évêque clandestin de Shanghai
(RV) Des milliers de catholiques chinois ont célébré samedi 22 mars les obsèques de
l'ancien évêque « clandestin » de Shanghai, décédé le 16 mars dernier à l’âge de 96
ans alors qu’il se trouvait assigné à résidence. Le gouvernement chinois ayant
interdit le transfert de la dépouille de Mgr Joseph Fan Zhongliang dans la cathédrale
du diocèse, les funérailles présidées par le Père Zhu Yude, vicaire général de la
communauté « clandestine », se sont déroulées dans un funérarium de la ville où les
autorités communistes n'ont pu faire autrement que de laisser les fidèles affluer.
Dans la cathédrale Saint Ignace de Shanghai, un catafalque avait été déposé en début
de semaine au pied du maître autel, et des messes y ont été célébrées en sa mémoire.
70
prêtres endossant une étole rouge, couleur du martyr
Un livret de messe
avait été tiré à 4 000 exemples. Ils n’ont pas suffi. Ce samedi, 5 000 fidèles venus
de Shanghai et des alentours se sont donc rassemblés sur la place faisant face au
funérarium pour suivre la messe de requiem sur écran géant, toléré par la police.
A l'intérieur reposait le corps de Mgr Fan dans un cercueil vitré, entouré de fleurs
et de photographies. Aux côtés de 70 prêtres endossant une étole rouge, couleur
du martyr, l'assemblée a chanté, prié et écouté un rappel de la vie de ce prêtre jésuite,
à qui les autorités chinoises n'ont jamais reconnu son statut épiscopal. Pour cette
raison, la banderole funéraire évoquait la mémoire de leur « pasteur » et non de leur
« évêque », un terme interdit par Pékin pour les évêques « clandestin » mais qu’a
néanmoins utilisé, pendant toute la liturgie, le Père Zhu Yude.
Des fidèles
attachés à leur ancien évêque
Le vicaire général de la communauté « clandestine
» a rappelé la foi et le service accompli par le défunt, encourageant les catholiques
chinois à suivre son exemple. La célébration a duré trois heures. A l’issue de
la messe, les fidèles ont pu un à un passer devant le cercueil et rendre un dernier
hommage à Mgr Fan. « Je suis venue dire adieu à notre évêque », a confié une femme
rencontrée au milieu de l'assemblée. « Toute sa vie il est resté fidèle au Seigneur,
en supportant de grandes souffrances. Je veux témoigner de mon respect envers lui
».
La dépouille de Mgr Fan ne pouvant être enterré dans la cathédrale saint
Ignace, les fidèles ont acheté un espace au sein du cimetière de Sheshan, non loin
du sanctuaire de la Vierge, patronne de la Chine. C’est là que les cendres du défunt
ont été enterrées après la crémation.
Hommage discret du Vatican
Originaire
de Hongkong, seul Chinois en poste à la curie romaine, Mgr Savio Hon Tai-fai, le secrétaire
de la Congrégation vaticane pour l’évangélisation des peuples, a salué la semaine
dernière la mémoire de l'ancien évêque clandestin de Shanghai. Mgr Hon, qui a enseigné
dans les années 1990 au grand séminaire régional de Sheshan, dans la banlieue de Shanghai,
se souvient de l’attachement des fidèles et des prêtres à la figure de cet évêque
reconnu par Rome, mais pas par le régime de Pékin. Mgr Fan avait été ordonné évêque
de Shanghai par le pape Jean Paul II en 2000. Le Parti communiste chinois avait refusé
cette nomination, et avait depuis lors placé l'évêque sous bonne garde chez lui. Mgr
Fan a passé la quasi-totalité de ses soixante dernières années en prison ou en résidence
surveillée.
Absence de l’évêque de Shanghai, lui-même assigné à résidence
L'évêque
de l'Église "officielle" à Shanghai, Mgr Aloysius Jin Luxian, est décédé l'an dernier
à l'âge de 96 ans. Son successeur Mgr Thaddeus Ma Daqin, ordonné en juillet 2012 au
titre d’évêque auxiliaire avec l’accord du pape et l’agrément de Pékin, a été placé
par les autorités chinoises en résidence surveillée au grand séminaire de Sheshan
et ne peut pas exercer ouvertement son ministère. Il avait en effet quitté, après
son ordination, l’Association patriotique des catholiques chinois (APCC), l'instance
de contrôle du régime, pour se consacrer entièrement à son diocèse. Cela a été perçu
comme un geste de défiance sans précédent de la part d’un évêque «officiel». Il a
été immédiatement placé en résidence surveillée et interdit d’exercer son ministère
pour une durée de deux ans. Mardi dernier, Mgr Savio Hon Tai-fai, secrétaire de
la Congrégation vaticane pour l’évangélisation des peuples, avait appelé le gouvernement
chinois à libérer Mgr Ma Daqin pour qu’il puisse célébrer les funérailles de Mgr Fan.
Un appel qui n’a pas été entendu par les autorités. (avec Asianews et AFP)
Photo
: Cliché pris lors des funérailles de Mgr Fan, samedi 22 mars