2014-03-14 17:03:57

L'Eglise possible médiatrice dans la crise vénézuélienne


(RV) Témoignage - Aucune sortie de crise en vue au Venezuela. Les manifestations étudiantes contre les pénuries chroniques et l’insécurité se poursuivent, dégénérant souvent en affrontements. On compte déjà 28 morts et au moins 400 blessés. Dans le viseur de cette contestation sociale : le président Nicolas Maduro et son gouvernement, qui tout en convoquant une troisième conférence pour le dialogue, promet des « mesures drastiques » contre les manifestants.

Le pays semble donc toujours divisé et dans l’impasse. Selon le secrétaire général de l’Organisation des Etats américains, l’Eglise catholique pourrait être le seul médiateur capable de mener un vrai dialogue de paix.

Nous avons joint le père George Engel, prêtre Fidei Donum à Caracas depuis 11 ans. Il témoigne. RealAudioMP3

Photo: arrestation musclée d'une manifestante anti-Maduro



Dernièrement, le cardinal Urosa a obligé tous les curés à lire un appel au dialogue et à la concertation. Mais un appel qui condamnait aussi la violence de la part des forces gouvernementales et en particulier, la violence de ce qu’on appelle ici les « colectivos » et qui sont des cellules communistes qui ont été armées par l’ex-président Chavez et qui sont confortées par l’actuel président Maduro. Ils sont chargés de défendre la révolution bolivarienne. Alors, dans l’état actuel des choses, les membres de ces collectifs empêchent effectivement toute manifestation de se dérouler dans le calme et la sérénité. Ce que demande l’Église, c’est que les membres de ces colectivos soient désarmés et soumis comme tout citoyen à l’emprise de la loi. Alors, c’est vrai que la parole de l’Église est très forte en ce moment. Elle est entendue mais elle n’est pas mise en pratique.

La parole de l’Église est entendue, vous venez de le dire mais par qui ? Par les manifestants autant que par les autorités ?
Elle est entendue par les manifestants ; par les autorités, c’est à voir parce qu’il y a eu une conférence de la paix à la demande du président Maduro, le 26 février dernier. Mais quand on entend le discours du président, il est toujours aussi fort et violent avec les mêmes slogans. Ça, je ne crois pas que cela puisse contribuer au dialogue et à la paix.


Des témoignages nous font état d’actes de vandalisme dans les Églises ces derniers jours. Est-ce que vous pouvez nous en parler ?
Oui, j’ai par exemple un de mes confrères à Caracas qui a vu la destruction de différents biens immobiliers dans son Église.


Sait-on qui se cache derrière ces actes de vandalisme ?
Écoutez, c’est difficile pour moi de dire des choses et je dois faire preuve de discrétion. Il y a des enquêtes qui sont en cours mais les colectivos, les brigades motorisées, etc.., ne sont pas innocentes dans toutes ces affaires.


Vous êtes prêtre missionnaire à Caracas depuis onze ans. Quel est votre quotidien ? Quel est le quotidien d’un missionnaire dans ce contexte que l’on connait ?
Il y a non seulement la violence liée à la politique mais il y a la violence liée à la drogue. Depuis onze ans que je suis ici, j’ai vu un nombre incalculable de morts assassinés dans un périmètre de 500 mètres autour de la maison paroissiale. Alors, comme prêtre, je ne cesse d’en appeler à cela, au dialogue et à la concertation, au respect de la vie et à l’accueil fraternel de l’autre, c’est-à-dire de son accueil inconditionnel avec ses différences. Il y a quelques jours, j’ai organisé une rencontre avec tous les jeunes de la paroisse (et Dieu sait s’ils sont nombreux) à visionner un film ensemble, chaviste et non chaviste parce que vous savez que le pays est réellement divisé et cela se reflète dans la paroisse où je suis. La paroisse est divisée en deux : il y a les chavistes et ceux qui sont de l’opposition. Donc, j’ai invité tous ces jeunes à voir ensemble le film de Justin Chadwick « Mandela, un long chemin vers la liberté » qui est sorti en novembre 2013. Ca a été un succès parce que les jeunes ont pu regarder ensemble ce film et parler à propos de Mandela.



Vous parlez de division au sein même de votre paroisse entre pro-Chavez et anti-Chavez. Justement, le Venezuela a fêté le premier anniversaire de la mort de l’ancien président, Hugo Chavez. Un an après, on peut dire que le pays est profondément divisé ?
Le bilan est catastrophique. Chavez avait pour lui le fait qu’il soit un leader politique, c’était une bête politique. Maduro, c’est totalement différent. Et en plus, divisions au sein même de sa majorité. Dans les fameux colectivos, beaucoup sont en opposition à Maduro. La situation n’a cessé de s’aggraver, et ce sont des queues interminables pour acheter un poulet où on vous tamponne le bras pour vérifier que vous n’êtes pas passé deux fois dans la queue pour acheter un peu de papier toilette, etc.. .Les jeunes sont désespérés parce qu’ils voient qu’ils sont sans avenir.








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