2014-03-06 13:02:37

« La miséricorde signifie avant tout soigner les blessures »


(RV) « L’Eglise est “un hôpital de campagne”, on a besoin de guérir les blessures ». Lors de sa rencontre jeudi matin avec le clergé romain dans la salle Paul VI du Vatican, le Pape François, qui s’est largement confié et n’a pas hésité à se souvenir de certains épisodes de sa vie, est revenu sur la miséricorde en ce temps de Carême. Il a expliqué ce que signifie la miséricorde pour les prêtres, avant de faire le lien avec le sacrement de la réconciliation, soulignant qu’il ne s’agissait ni de laxisme, ni de rigidité. Xavier Sartre RealAudioMP3


En ce temps de miséricorde, c’est un Pape qui a demandé pardon, dans un geste inhabituel, aux curés de Rome. Pardon, non tant en qu’évêque, mais en tant que chef du service diplomatique du Saint-Siège, dont un des membres a accusé, notamment de pédophilie, plusieurs prêtres de Rome.

« J’ai été très touché par la douleur de certains d’entre vous à cause des accusations formulées contre vous. J’ai parlé avec certains d’entre vous. Une folie ! moi, je suis proche des curés. Les accusés : ce sont tous les curés. Je veux vous demander pardon à vous, non en tant qu’évêque, mais comme responsable du service diplomatique du Saint-Siège parce que l’un des accusateurs appartient au service diplomatique. Mais cela n’a pas été oublié ; on étudie le problème afin d’éloigner cette personne. C’est un acte grave d’injustice et je vous demande pardon pour cela, à vous tous. »

Le Pape François a fait référence aux accusations de pédophilie et de comportements douteux formulées à l’encontre de plusieurs prêtres du diocèse de Rome par un ex-prêtre, Patrizio Poggi, et relayées et confirmées par le conseiller de la nonciature, Mgr Luca Lorusso. Les accusés ont alors contacté le Pape, leur expliquant leur souffrance face à de telles accusations.

Pas de prêtres "aseptisés"

Le Pape a ainsi demandé à ses prêtres de faire acte de miséricorde envers lui. Car dans son discours, il a expliqué que le prêtre est « un homme de miséricorde et de compassion, proche de ses paroissiens et au service de tous. Il le démontre dans son comportement, dans la manière dont il accueille, écoute, conseille et absout. »

Le Pape insiste : « si on vit cela en soi, dans son cœur, on peut aussi le donner aux autres dans son ministère ». Et de mettre en garde, reprenant l’histoire du bon samaritain : « le coeur fermé se justifie toujours de ce qu’il ne fait pas. » Cette proximité avec ceux qui souffrent, est donc nécessaire car la « miséricorde signifie avant tout soigner les blessures ». Nul besoin de prêtre « aseptisés », « de laboratoire ». Au contraire, l’Eglise étant « un hôpital de campagne », le prêtre se doit de guérir les gens « blessés par les problèmes matériels, par les scandales, y compris au sein de l’Eglise ».

Pour cela, le prêtre ne doit être « ni laxiste, ni rigoriste » : le premier « ne prend pas au sérieux le problème de la conscience, minimisant le péché » ; le second « cloue la personne à la loi de manière froide et rigide ». Le chemin vers la sainteté se fait, au contraire, « à travers la souffrance pastorale, une des formes de la miséricorde, c’est-à-dire souffrir pour et avec les personnes, comme un père et une mère souffrent pour leur enfants ».

Rassurer les prêtres de Rome

Le Pape a également posé plusieurs questions aux prêtres, questions qu’il se pose à lui-même, a-t-il précisé. « Fais-tu la prière d’intercession devant le tabernacle ? Le soir, finis-tu la journée avec le Seigneur ou avec la télévision ? Luttes-tu avec le Seigneur pour ton peuple ? Un prêtre doit le faire comme le faisait Moïse. Et c’est un combat viril. Moïse avait du caractère », s’est exclamé le Pape. Et de conclure, exhortant les prêtres à « ne pas avoir honte de la chair de leur frère ». Surtout s’il est blessé et exclu.

Le Pape François a également profité de cette rencontre pour rassurer les prêtres de son diocèse qui ont été plusieurs à lui téléphoner, ou à lui écrire, lui reprochant de donner l’impression qu’il voulait les « bastonner ». « Non, je n’en ai pas après vous ! » s’est écrié François.

Cette rencontre fut aussi, pour le Pape, l’occasion de partager avec tous les prêtres présents quelques souvenirs de l’époque où il officiait à Buenos Aires. Il est notamment revenu sur la figure d’un vieux prêtre qui confessait sans arrêt, reconnu par les fidèles pour sa miséricorde. Au moment de son décès, lors du weekend pascal, le futur Pape a alors pris la croix du rosaire du défunt lui demandant : « donne-moi ne serait-ce que la moitié de ta miséricorde ». Depuis lors, le Pape porte sur son cœur, dans une poche en étoffe, cette croix et la touche dès qu’il a « une mauvaise pensée envers quelqu’un ». « Combien est bon l’exemple d’un prêtre miséricordieux » a ainsi conclu le Pape.








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