2014-02-21 19:46:10

La France va faire entrer Geneviève de Gaulle-Anthonioz au Panthéon


(RV) Entretiens - François Hollande l’a annoncé vendredi. Germaine Tillion, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Pierre Brossolette et Jean Zay entreront en 2015 au Panthéon, le monument des grands Hommes de l'Histoire de France. Ils rejoindront ainsi les 74 hommes et femmes qui y reposent déjà.

Deux femmes figurent donc parmi les quatre personnes choisies, deux illustres figures de la résistance et de la défense des Droits de l’homme. Parmi elles, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, la nièce du général Charles de Gaulle. Déportée à Ravensbrück pendant la Seconde Guerre mondiale, elle a fait de la défense des plus pauvres une priorité. Elle a d’ailleurs été la présidente d’ATD, e mouvement international de lutte contre la grande pauvreté et l’exclusion sociale, connu aujourd’hui sous le nom d’ATD-Quart monde.

Marie Jahrling milite pour ce mouvement. Elle a bien connu Geneviève de Gaulle-Anthonioz. RealAudioMP3

Quels sont vos souvenirs de Geneviève de Gaulle-Antnonioz?
C’était une femme qui a été vraiment exemplaire pendant toute sa vie.On l’a côtoyée dans le mouvement ATD Quart Monde et elle est venue dans le bidonville où moi j’étais gamine. Les première fois où elle est venue dans le bidonville de Noisy-le-Grand, je devais avoir 14 ou 15 ans. Ce dont je me souviens d’elle, c’est que jamais elle n'est venue en grande dame ou pour nous donner des leçons. C’était vraiment très rare à cette époque-là parce que toutes les personnes bien pensantes et pleines de charité- je ne dis pas le contraire- c’étaient souvent des personnes qui disaient « il faut faire comme-ci, il faut faire comme ça ». Et quand on a rien, on fait comment? Puis, on ne les revoyait plus.

Ensuite, Geneviève est venue , avec toute son humilité. C’était une femme très humble et je sais que tout de suite, on a ressenti une proximité avec elle, bien sûr, par rapport à son vécu de prisonnière. Ça, on ne le savait pas tout de suite. Moi, j’étais trop jeune pour comprendre toutes ces choses. En tout cas, on l’a ressenti comme quelqu’un en qui on pouvait avoir confiance et qui était comme une proche.

Qu’est-ce qu’elle a apporté à la cause des personnes en grande souffrance, dans la pauvreté ?

Elle-même, déjà, je trouve que c’est beaucoup. En fait, on a très vite compris qu’elle venait pour lutter auprès de nous. Quand je dis « auprès de nous », ce n’est pas à notre place, mais ensemble. Et ça, c’était d’avoir des conversations en disant « ben oui, ce n’est pas juste » et elle partageait vraiment nos colères. Elle était vraiment très humble et très douce. Mais en tout cas, elle était ferme dans ce combat contre les exclusions. Et ça, c’était une chose vraiment très importante pour nous. Elle était auprès de nous, pour qu’ensemble, on puisse sortir de ces situations-là de grande pauvreté.

Est-ce que vous avez eu l’occasion de reparler avec elle, plus tard, de ces engagements qu’elle avait pris ?
Écoutez, on l’a suivi toute notre vie parce que moi aussi, j’étais militante. Je suis devenue militante et je suis restée très proche du mouvement jusqu’à aujourd’hui. Toute sa vie, elle a été la même femme. Je me souviens par exemple pour la loi contre les exclusions a été faite avec des gens qui vivaient la pauvreté. On se réunissait parfois à Paris pour discuter de certaines questions que l’on vivait et qu’on sentait bien qu’elles étaient injustes. Et Geneviève participait souvent à ces discussions et même parfois, on allait en petits groupes aux rencontres avec la Commission des Droits de l’Homme. On mettait en commun et Geneviève était parmi nous. Geneviève était aussi une femme de foi . Son combat était surement aussi pour la gloire de Dieu parce que l’humanité qu’avait Geneviève relevait du divin, par sa personnalité et par ce qu’elle était. C’était une femme qui était là pour restituer l’humain dans son humanité.

Pierre-Yves Madignier est le président d’ATD Quart Monde France. Un poste occupé par Geneviève de Gaulle-Anthonioz pendant presque quarante ans de 1964 à 1998. A l’annonce de cette nouvelle, il a ressenti comme l’ensemble du mouvement ATD Quart Monde une grande émotion. RealAudioMP3

Quels souvenirs gardez-vous de Geneviève de Gaulle-Anthonioz ?
C’était quelqu’un de profondément humain, de profondément respectueuse des autres, qui vivait aussi de grandes indignations, notamment par rapport à la dictature de l’argent et qui mettait toujours l’humanité et en particulier celle des personnes les plus pauvres en avant parce qu’elle reconnaissait dans les personnes très pauvres, la même force de résistance contre tout ce qui défigure l’homme.

Est-ce qu’elle pourrait représenter un idéal de sainteté laïque ?
En tout cas, c’est quelqu’un qui peut inspirer beaucoup d’engagements au sein du mouvement ATD Quart Monde. Vous savez , dans le mouvement ATD-Quart-Monde, il y a des personnes qui sont nées dans la grande pauvreté et qui partagent le combat avec d’autres pour détruire la misère, ce sont les militants Quart Monde. Il y a les volontaires permanents qui prennent un engagement pour aller rejoindre les plus pauvres et à la fin de sa vie, Geneviève Anthonioz-de Gaulle a été un peu une volontaire permanente du mouvement ATD Quart Monde. Et puis aussi les alliés, c’est-à-dire tous ceux qui sont un petit peu partout dans la société et qui s’unissent, qui font alliance avec les plus pauvres pour détruire la misère. Elle a été alliée du mouvement ATD- Quart-Monde pendant de très nombreuses années. Donc, au sens d’un engagement, oui. Un engagement qui donne aussi envie de s’engager auprès des plus pauvres, pourquoi pas ?

Qu’est-ce que son action peut apporter aujourd’hui dans les luttes par exemple, que vous, vous menez encore ?
Je pense qu’il y a des images qui resteront toujours présente. Celle de son intervention à l’Assemblée Nationale après avoir fait un rapport au Conseil économique et social pour ce qui allait devenir la loi de lutte contre les exclusions, la loi de décembre 1998. Cette femme si frêle et si forte dans ses convictions qui portait le combat de tout le Quart-Monde, ça, c’est quelque chose qui restera comme une très forte inspiration pour nous et pour beaucoup de personnes qui sont en dehors du mouvement ATD-Quart-Monde mais qui sont dans ce grand courant du refus de la misère.

Des propos recueillis par Audrey Radondy

Photo: Geneviève de Gaulle-Anthonioz le 17 octobre 1997, lors de la journée mondiale du refus de la misère








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