(RV) - Souvenir. La journée s’annonçait des plus ordinaires à Rome. A l’agenda,
aucun évènement majeur à traiter, seul un consistoire pour la canonisation de trois
bienheureux avait été convoqué au Vatican. Nous avions depuis peu achevé notre conférence
de rédaction. J’étais donc assise face à mon écran à la recherche de sujets pour les
prochaines émissions. C’est un cri, venant du couloir qui est venu bouleverser non
seulement le cours de cette journée mais aussi celui de l’Histoire : « Il Papa
ha dato la dimissione ! » :
Le pape a annoncé sa renonciation !
J’ai
tout d’abord cru à une farce. C’est en découvrant les visages livides de mes collègues
italiens que j’ai commencé à douter. En fond sonore, la voix de Benoît XVI, en latin,
finissait de me convaincre que l’heure était grave, très grave. Un médecin aurait
ainsi pu, je crois, décrire mon état à cet instant précis : augmentation du rythme
cardiaque, dilatation des pupilles, tremblements des membres inférieurs… Je le résumerai
avec ces mots : j’étais bouleversée.
Autour de moi, mes collègues n’étaient
pas plus vaillants, paralysés par l’émotion et dans le même temps conscients qu’il
fallait faire face, être très vite opérationnels et pour cela garder son sang-froid.
Ce jour-là il fut mis à rude épreuve. Non seulement nous devions préparer les prochaines
émissions, réagir sur Internet et Facebook, mais aussi répondre aux nombreuses demandes.
En quelques minutes, le Vatican devint le centre du monde et notre petite rédaction,
jusque-là ignorée de tous ou presque, fut sollicitée par les plus importants medias
francophones.
Tous, comme nous d’ailleurs, voulaient comprendre le sens et
la portée de cet acte historique dans l’Histoire contemporaine. Un an après, quels
enseignements en avons-nous tiré ? Ils sont nombreux et nous n’avons pas fini de les
découvrir. Mais pour les journalistes c’est avant tout, me semble-t-il, l’humilité.
Notre rôle n’est-il pas, entres autres, de prévenir l’orage, de sentir le vent tourner
? Or, aucun de nous, pas même les vaticanistes les plus avertis n’avaient émis d’avis
de tempête.