« Je devais 20 000 euros à mon usurier, j'ai déboursé trois fois plus »
(RV) Témoignage - L’usure, ce prêt à un taux d’intérêt excessif, un délit en
Italie, est appréciée notamment par le crime organisé. Le Pape François l’a qualifié
mercredi matin lors de l’audience générale de « dramatique plaie sociale »,
car elle « blesse la dignité inviolable de la personne ». Un usage qui n’est
pour le Souverain pontife « ni chrétien, ni humain ». Face à lui, quelque 3000
représentants du Conseil national italien contre l’usure. Ils défendent notamment
les victimes de cette pratique.
Des victimes qui étaient présentes elles aussi
place Saint-Pierre, aux côtés de Mgr Alberto D’Urso, le secrétaire national de l’organisation.
Antonino Galofaro les a rencontrés. Reportage :
Selon son témoignage,
après l'audience générale, cette victime de l’usure devait 20 000 euros à son usurier.
Il déboursera près de trois fois plus. Cet homme souhaite rester anonyme. Il est venu
des Pouilles pour voir le Pape François, aux côtés des représentants du Conseil national
italien contre l’usure. Loin de son sud natal, il raconte avec encore beaucoup d’émotion
son histoire vieille de dix ans.
« En 2003, j’ai perdu la tête. Je voulais
en finir avec la vie. Je me souviens juste avoir fait le plein avec ma voiture pour
partir, et avoir laissé une lettre pour dire que je voulais en finir. »
Il
se rendra finalement dans sa paroisse, près de Brindisi, dans le sud de l’Italie.
Le conseil contre l’usure local lui viendra en aide. Mgr Alberto D’Urso, secrétaire
national de l’organisation, explique qu’il a essayé « de le rassurer et de rassurer
sa famille ». « Puis nous avons essayé de le convaincre de ne plus payer son
usurier, après énormément de rencontres, nous avons transformé sa dette envers l’usurier
en dette bancaire, qu’il est désormais en train d’honorer. »
« Libérer
les personnes de la peur »
Car les dettes d’usuriers en entraînent d’autres,
comme celles des fournisseurs de la station essence de cette victime, par exemple.
Les sortir des spirales de problèmes financiers peut prendre des années, sans compter
les conséquences psychologiques.
« Il faut d’abord libérer les personnes
de la peur, explique Mgr D’Urso. Les gens sont désorientés, j’ai donc appris
à faire le confesseur, j’ai appris à les écouter. Parce que quand elles viennent vers
nous, ces personnes veulent juste être aidées. Mais elles, elles ne vous aident pas.
Elles ne vous aident pas à comprendre quel est le problème. »
Des victimes
de l’usure, Mgr D’Urso en a vu passer des dizaines de milliers ces dernières années.
Mais impossible pour lui d’avancer un quelconque chiffre précis, officiel, de ce phénomène
caché.
Les représentants du Conseil national italien contre l’usure ont pu
assister mercredi après-midi à une messe en leur honneur, célébrée par le cardinal
Angelo Comastri, le vicaire général pour la Cité du Vatican, en la Basilique Saint-Pierre.
Dans son homélie, il a condamné l’utilisation de l’usure « pour crucifier les personnes
en difficultés », une « action abominable qui frappe Dieu et qui trouve en
Lui la plus sévère des condamnations ».
Photo : le Pape François
a rencontré mercredi matin des victimes de l'usure, qu'il a dénoncée au terme de son
Audience générale