2014-01-24 16:44:17

Le regard de Mgr Podvin sur la visite du Président Hollande


(RV) Entretien - Une rencontre délicate et très attendue : celle du président français, François Hollande, avec le Pape François. Elle a eu lieu ce vendredi matin au Vatican. En toile de fond de cette rencontre, le malaise profond de la communauté catholique française, qui ne cache pas son inquiétude face aux évolutions sociétales dont le gouvernement Hollande se fait le héraut et le promoteur, -mariage homosexuel, avortement, lois sur la fin de vie-.

Ces thèmes sensibles, François Hollande les a soigneusement éludés lors de la conférence de presse qui s’est tenue après la rencontre, préférant mettre en exergue les points de convergence entre la France et le Saint-Siège, sur les sujets internationaux notamment, tels que le Proche-Orient, l’Afrique ou encore l’immigration en Europe.

Mais selon le communiqué officiel du Saint-Siège, la famille et la bioéthique ont également été au cœur de l’entretien, à la grande satisfaction de Mgr Bernard Podvin, porte-parole de la conférence des évêques de France. RealAudioMP3

Le texte intégral de l'entretien:

Vous avez tout à fait raison de bien souligner que des thèmes comme la bioéthique et la famille sont évoqués par le Saint-Siège comme étant présents dans l’entretien, je n’en suis pas surpris parce que le Pape François a la liberté de parole que nous savons et il a certainement abordé ces sujets de société, comme c’était nécessaire : des sujets qui sont aussi des sujets d’inquiétude pour de nombreux catholiques. J’ai envie de dire que là, au stade où nous sommes, ce qui est très important, c’est qu’il y ait eu cette rencontre. Il est essentiel qu’elle ait eu lieu. Le Président de la République a souligné des points de convergence, il a parlé de la laïcité comme vraiment permettant le débat. Maintenant, j’ai envie de dire « il faut donc que cette laïcité permettant le débat sera concrète, notamment pour ces sujets de société » et c’est ce que nous espérons. J’espère que ces sujets de société seront profondément abordés et respectés dans les temps qui viendront puisque le Pape en a parlé.

Le président Hollande a notamment indiqué que la défense de la dignité humaine a été le mot qui rassemble. L’Église catholique et le gouvernement français sont-ils vraiment en phase sur ces sujets ?
Le mot « dignité humaine » est essentiel mais après, il faut savoir ce que l’on met derrière ce mot. Il ne suffit pas de le prononcer, il faudra donc évidemment creuser cela. Il faudra continuer à dialoguer sur cette dignité. Elle est essentielle pour le croyant au nom de l’Évangile mais pour les croyants, la dignité, ce n’est pas au prix de n’importe quelle réforme sociétale, notamment concernant la vie naissante mais aussi la vie finissante. Il est essentiel de redire ce que nous pensons. Je pense que là, la rencontre avec le Saint-Père est très importante parce que le Président de la République a pu mesurer le rayonnement du Pape, l’importance que le Pape accorde à toutes ces questions, à charge maintenant pour nous tous, de continuer à être vigilants sur ces questions de dignité. On peut converger sur la dignité dans des questions de paix, de justice, comme cela a été évoqué. Il y a des convergences, il y a sans doute aussi des divergences.

Parlons maintenant des catholiques français. On constate qu’il y a un véritable malaise, voire même un sentiment de colère qu’on voit par exemple sur les réseaux sociaux, même dans la rue. Les catholiques se sentent assiégés, dénigrés, mis à l’index et ont adressé une supplique au Pape François qui a recueillie près de 110.000 signatures. Comment la hiérarchie catholique perçoit-elle cette initiative ?
Cette supplique qui est envoyée au Saint-Père est un signe très fort. Elle est un symptôme du malaise, le malaise de la non-écoute ressentie notamment par une jeune génération : le fait que des jeunes couples, de jeunes croyants ont pris le temps d’écrire cette supplique est bien révélateur qu’il y a une non-écoute et ça doit absolument interpeller les pouvoirs publics. Ils ne peuvent pas être indifférents à un tel nombre de signatures. Il y a dans cette supplique des phrases parfois maladroites, des phrases sur lesquelles toute la hiérarchie catholique n’est certainement pas d’accord mais globalement, c’est un signe fort qui a été envoyé. Cette supplique, elle est révélatrice en elle-même d’un malaise et c’est cela que moi, je retiens personnellement comme une interpellation importante et il faut vraiment qu’on en tienne compte.

Alors, c’est aujourd’hui également la Journée pour les Communications Sociales. Le Pape François a livré sa vision de la communication dans un message. Alors je cite «dialoguer, signifie être convaincu que l’autre a quelque chose de bon à dire, c’est faire de la place à ses propositions ». Mgr Podvin, peut-on dire aujourd’hui que ce dialogue, cette conception du dialogue existe entre le gouvernement français et les catholiques français ?
Je crois que le message du Saint-Père est très important parce qu’il nous rappelle que la technique ne suffit pas, il ne suffit pas d’être connecté, il faut vraiment aller à la rencontre de l’autre en vérité. La rencontre a eu lieu ce matin, c’est déjà très important. C’est déterminant, parce que tant qu’on ne se rencontre pas, on ne mesure pas bien l’importance des sujets qui préoccupent. Évidemment, tout ce qui s’est passé ce matin ne vient pas résoudre la totalité des questions, loin s’en faut. Nous sentons bien que demeurent des inquiétudes vives. Les questions de bioéthique et de famille sont là devant nous. Je suis personnellement très préoccupé par la fin de vie, notamment dans les semaines qui viennent. Il y a beaucoup de travail, beaucoup de progrès mais l’Église catholique en France, en tous cas, est disponible pour ce dialogue. Elle est engagée au service du bien, au service de la personne et elle continuera, en communion avec le Pape, ce travail de dialogue, c’est vraiment essentiel. Je voudrais surtout dire aux auditeurs qui nous écoutent et qui souffrent, tous ceux qui ont des inquiétudes pour leurs avenirs, qui sont désemparés soit par le malaise sociétal ou par l’inquiétude économique, de leur dire à quel point François nous montre à travers cette façon de recevoir le Président français qu’il est avec nous, qu’ il se préoccupe de nous, qu’ il a vraiment une attention profonde à tous les pays dont le nôtre. Et j’ai entendu le Président de la République qui dit avoir invité le Pape chez nous, je me réjouis, comme beaucoup de catholiques, déjà d’entendre cela, et l’Église catholique, bien sûr, aussi, invite et invitera le Saint-Père et ce sera un bonheur vraiment immense que de le recevoir dès que possible.








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