Les évêques de France réaffirment leur non à l’euthanasie et au suicide assisté. Dans
une déclaration jeudi concernant le débat sur la fin de vie, le Conseil permanent
de l’épiscopat dit non aussi à l'acharnement thérapeutique, mais oui à un développement
des soins palliatifs. « Devant un sujet si grave et douloureux, l'essentiel est de
rendre plus manifeste le respect dû à toute personne vivant ses derniers jours» ,
relève la déclaration épiscopale. Un projet de loi sur la fin de vie pourrait être
déposé devant le Parlement d'ici la fin de l'année 2014. Divers rapports publiés ces
derniers mois ont demandé des améliorations de la loi Leonetti datant de 2005. « Cependant,
améliorer la législation, ce n'est pas la changer fondamentalement. Le sujet est trop
grave pour ne pas agir avec prudence », relèvent les évêques.
Contrairement
au Comité consultatif national d'éthique (CCNE) opposé à l’idée d’euthanasie, un «
panel » de 18 citoyens consulté par l’institut de sondage IFOP propose de légaliser
le « suicide médicalement assisté », sous condition d'une demande expresse d'une personne
en fin de vie ou atteinte d'une maladie jugée irréversible. « Aider un malade à mettre
lui-même fin à ses jours ou provoquer délibérément la mort d'un patient à sa demande,
ce qui est proprement appelé euthanasie, sont inacceptables », réagissent les évêques.
« L'avis admet même la pratique de l'euthanasie sans consentement de la personne devenue
incapable de s'exprimer ! »
Tu ne tueras pas
Pour les membres
de l’épiscopat, « notre société cherche à ‘esquiver la mort’ et redoute la proximité
avec celui qui va mourir. Elle pourrait être ainsi conduite à des décisions inhumaines.
» Or personne ne peut provoquer délibérément la mort, fût-ce à la demande d'une personne
gravement malade, sans transgresser l’interdit biblique fondamental : ‘Tu ne tueras
pas’. Ce commandement est le fondement de toute vie sociale respectueuse d'autrui,
spécialement des plus vulnérables, rappellent les évêques.
Beaucoup de gens,
en raison d'une maladie, d'un handicap ou de leur âge, se sentent devenus une charge
pour leurs proches et un poids pour la société. Ils souffrent de leur solitude, de
l'indifférence d'autrui, du regard porté sur eux dans une société axée sur les valeurs
d'autonomie et d'efficacité. Ceux qui en viennent à douter de la valeur et du sens
de leur vie ont besoin « d'accompagnement, de solidarité et de soutien dans l'épreuve.
N'aurons-nous rien d'autre à leur proposer que de mettre fin à leur existence ? »,
s’interrogent les membres du Conseil de l’épiscopat.
Le suicide comme ultime
liberté ?
La déclaration épiscopale relève aussi le paradoxe entre la vision
du suicide ‘ultime liberté’ et l’inquiétude face aux taux élevés de suicides particulièrement
chez les jeunes et les personnes âgées. « Comment réagir contre la banalisation du
suicide et en faire en même temps la promotion ? Comment pourrions-nous juger nécessaire
d'aider certaines personnes à affronter un épisode de détresse pour éviter l'irréparable,
et, par ailleurs, encourager et assister d'autres personnes dans leur volonté de mourir
? Qui deviendrait le juge des vies qui ne valent plus d'être vécues ? »
Oui
aux soins palliatifs
Tout suicide affecte l’ensemble du corps social, note
le document. Il est donc nécessaire et urgent de poursuivre un véritable engagement
de solidarité et de fraternité. Beaucoup se sont investis pour soulager les douleurs
et les souffrances de la fin de vie mais la tâche à accomplir est encore immense.
« Les campagnes médiatiques de promotion d'une nouvelle loi contribuent malheureusement
à détourner l'attention des indispensables réformes à entreprendre, parmi lesquelles
l'accès à des soins palliatifs et à un accompagnement à toute personne malade dont
l'état le requiert ».
La conviction profonde des évêques est qu'un changement
législatif ne peut avoir pour objectif que de rendre plus manifeste le respect dû
à toute personne en fin de vie. « Cela passe par le refus de l'acharnement thérapeutique,
le refus de l'acte de tuer; ainsi que par le développement des soins palliatifs et
le renforcement des solidarités familiales et sociales», conclut la déclaration. (apic)