Mgr Müller : L’Église dans son enseignement et dans sa pratique, s’est constamment
référée aux paroles de Jésus
Le préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, Gerhard Müller a publié mardi
un article dans le quotidien du Saint Siège l’Osservatore Romano. Il y aborde notamment
les questions sur le Mariage, la famille, l’engagement pastoral envers les divorcés
remariés. Le texte avait déjà été publié en juin dernier dans les colonnes du quotidien
allemand Tagespost, alors que la question des divorcés remariés agitait déjà l'opinion
publique sur de possibles ouvertures de l'Eglise. Depuis, le Pape François a convoqué
un Synode extraordinaire des Evêques en octobre 2014 consacré aux défis pastoraux
de la famille dans le contexte de l’évangélisation. La publication de cet article,
autorisée par le Pape, voudrait simplement rappeler la position traditionnelle de
l'Eglise et n'a pas pour but de verrouiller par avance le débat synodal. Une brève
synthèse.
Le témoignage de la Sainte Écriture
Pour Mgr
Müller, la discussion concernant la problématique des fidèles qui ont contracté un
nouveau lien civil après un divorce n’est pas nouveau et a toujours été suivie avec
un grand sérieux par l’Église dans l’intention d’aider les personnes concernées. En
effet, le mariage est un sacrement qui touche de manière particulièrement profonde
la réalité personnelle, sociale et historique de l’homme. Ce furent surtout les controverses
avec les pharisiens qui donnèrent à Jésus l’occasion de se confronter à ce thème.
Il prit expressément ses distances d’avec la pratique vétérotestamentaire du divorce,
que Moïse avait permise à cause de la « dureté de cœur » des hommes, et renvoya à
la volonté originaire de Dieu. L’Église catholique, dans son enseignement et dans
sa pratique, s’est constamment référée à ces paroles de Jésus sur l’indissolubilité
du mariage.
Le témoignage de la Tradition de l’Église
Les
Pères de l’Église et les conciles constituent par la suite d’importants témoignages
pour l’élaboration de la position ecclésiastique. Pour les Pères, les directives bibliques
sont normatives. Ils récusent les lois civiles sur le divorce comme étant incompatibles
avec l’exigence de Jésus. L’Église des Pères, en obéissance à l’Évangile, a rejeté
le divorce et le remariage ; sur cette question, le témoignage des Pères est sans
équivoque.
Le Concile Vatican II a proposé une doctrine théologiquement et
spirituellement profonde du mariage dans la Constitution pastorale Gaudium et spes
sur l’Église dans le monde de ce temps. Il maintient clairement et distinctement l’indissolubilité
du mariage. Celui-ci est entendu comme une communion corporelle et spirituelle complète
de vie et d’amour entre un homme et une femme, qui se donnent et s’accueillent l’un
l’autre en tant que personnes. À travers l’acte personnel et libre du « oui » réciproque,
est fondée par droit divin une institution stable, qui est ordonnée au bien des époux
et de leurs enfants, et qui ne dépend plus de l’arbitraire humain : « Cette union
intime, don réciproque de deux personnes, non moins que le bien des enfants, exigent
l’entière fidélité des époux et requièrent leur indissoluble unité »
Le
témoignage du Magistère à l’époque contemporaine
Le texte, aujourd’hui
encore fondamental, de l’Exhortation apostolique Familiaris consortio, publiée
par Jean-Paul II le 22 novembre 1981 à la suite du synode des évêques sur la famille
chrétienne dans le monde contemporain, confirme avec insistance l’enseignement dogmatique
de l’Église sur le mariage. Du point de vue pastoral, l’Exhortation post-synodale
se soucie aussi des fidèles remariés civilement, mais qui sont encore liés par un
mariage ecclésiastiquement valide. Le Pape fait preuve d’un haut degré de sollicitude
et d’attention. Le n. 84 (« Les divorcés remariés ») contient les énoncés fondamentaux
suivants
Dans l’homélie prononcée à Milan le 3 juin 2012, à l’occasion de la
VIIe Rencontre mondiale des familles, Benoît XVI est revenu sur ce douloureux
problème : « Je voudrais aussi réserver un mot aux fidèles qui, tout en partageant
les enseignements de l’Église sur la famille, sont marqués par des expériences douloureuses
d’échec et de séparation. Sachez que le Pape et l’Église vous soutiennent dans votre
peine. Je vous encourage à rester unis à vos communautés, tout en souhaitant que les
diocèses prennent des initiatives d’accueil et de proximité adéquates ».
Observations
théologico-morales
On propose toujours à nouveau que la décision de
s’approcher ou non de la Communion eucharistique devrait être laissée à la conscience
personnelle des divorcés remariés. Cet argument, qui se fonde sur un concept problématique
de « conscience », a déjà été repoussé dans la Lettre de la Congrégation pour la doctrine
de la foi de 1994. Assurément, dans chaque célébration de la Messe les fidèles sont
tenus de s’examiner dans leur conscience s’il est possible de recevoir la Communion,
ce à quoi s’oppose toujours un péché grave non confessé. Ils ont donc l’obligation
de former leur conscience et de l’orienter selon la vérité ; ce faisant, ils obéissent
également au magistère de l’Église, qui les aide « à ne pas dévier de la vérité sur
le bien de l’homme, mais, surtout dans les questions les plus difficiles, à atteindre
sûrement la vérité et à demeurer en elle » (Jean-Paul II, Lettre encyclique Veritatis
splendor, n. 64).
Le souci pastoral
Le souci pour
les divorcés remariés ne devrait certes pas se réduire à la question de la réception
de l’Eucharistie. Il s’agit d’une pastorale plus globale qui cherche à tenir compte
le plus possible des différentes situations. Il est important de savoir, à ce propos,
qu’outre la Communion sacramentelle, il existe encore d’autres manières d’entrer en
communion avec Dieu. La relation avec Dieu est réalisée lorsqu’on s’adresse à lui
dans la foi, dans l’espérance et dans la charité, dans le repentir et dans la prière.
Dieu peut accorder sa proximité et son salut aux hommes à travers diverses voies,
même s’ils vivent des situations contradictoires. Comme le soulignent constamment
les récents documents du Magistère, les pasteurs d’âmes et les communautés chrétiennes
sont appelés à accueillir avec ouverture et cordialité les personnes vivant dans des
situations irrégulières, pour être à leurs côtés avec empathie, les aidant et pour
leur faire sentir l’amour du Bon Pasteur. Une pastorale fondée sur la vérité et sur
l’amour trouvera toujours à nouveau dans ce domaine les voies et les formes justes.