Les chrétiens, inspirés par Dieu, doivent avertir la société
Les chrétiens doivent adresser à la société les « avertissements que Dieu (leur) inspire
», a martelé le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, lors de la traditionnelle
messe de rentrée des responsables politiques et des parlementaires, mardi dernier
à la basilique Saint-Clotilde, à Paris. S’interrogeant sur une comparaison possible
entre « notre société » et « Ninive, la grande ville païenne », le cardinal a rappelé
que cette cité n’était pas restée sourde aux avertissements du prophète Jonas. « Si
éloignée que notre société nous paraisse de la foi et de la Parole de Dieu, nous ne
pouvons pas nous récuser en arguant du fait que les croyants et spécialement les chrétiens
ne dominent pas la société et que nous ne serions pas écoutés, a-t-il souligné. À
cette société, comme à Ninive, nous sommes invités à adresser les avertissements que
Dieu nous inspire, respectant la liberté personnelle de chacun pour les accueillir
ou pour les réfuter, pour les suivre ou pour s’en détourner. »
Jean Pierre
Raffarin, Erwann Binet et Frigide Barjot
Étaient présentes dans la basilique
de rentrée plusieurs dizaines de personnalités politiques, parmi lesquels l’ancien
premier ministre Jean-Pierre Raffarin, l’ex-président de l’Assemblée nationale Bernard
Accoyer, l’ancien ministre de la justice Michel Mercier. À gauche, le rapporteur à
l’Assemblée de la loi sur le « mariage pour tous », Erwann Binet, ou le député des
Yvelines Jean-Philippe Mallé assistaient également à la messe. Frigide Barjot s’était
jointe à l’assistance. L’ancien président de la Conférences des évêques de France
a évoqué en particulier trois domaines « dans lesquels le travail législatif est gravement
impliqué ». Premièrement, la mise en œuvre de la « solidarité nationale ». « Est-il
possible de progresser dans ce domaine sans affronter les avantages catégoriels, sans
reconnaître que la consommation ne peut pas être le seul levier du dynamisme économique
et social ? », a-t-il interrogé, alors que le débat sur le travail le dimanche provoque
la polémique depuis la mi-septembre.
Chrétiens d’Orient
Par ailleurs,
l’archevêque de Paris a attiré l’attention de ses interlocuteurs sur « le sort réservé
aux enfants dans notre société ». « Dans beaucoup des débats que nous avons connus
au cours de l’année écoulée et qui reviendront dans les mois qui viennent, on dissimule
à peine la tendance lourde qui consiste à considérer l’enfant exclusivement du point
de vue des désirs de l’adulte qu’il est supposé satisfaire. (…) On va le revoir dans
le débat sur l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation. » Il a souligné
l’importance de la « dignité de la personne humaine », y compris lors de la « gestion
de la fin de la vie ». Enfin le cardinal Vingt-Trois a évoqué le sort des chrétiens
d’Orient, invitant la France à accueillir largement les réfugiés. Il a appelé à «
une grande attention dans l’aide militaire et diplomatique que nous pourrions apporter
à des groupes » qui ne permettraient pas aux chrétiens de ces pays de « rester paisiblement
dans leur patrie ».
Marthe ou Marie ?
L’archevêque de Paris a
mis en garde contre une lecture dualiste de « la petite scène familiale » mettant
en scène Jésus, Marthe et Marie dans l’Évangile. « Le durcissement du contraste, jusqu’à
l’incompatibilité entre les deux missions, n’est-il pas une tentation récurrente pour
celles et ceux qui sont appelés à vivre leur mission de disciples dans les terrains
nécessairement indécis et troublés de la vie publique?, a-t-il interrogé. (…) Seraient-ils
de meilleurs chrétiens s’ils abandonnaient la responsabilité de la gestion du monde
à ceux qui ignorent tout de Dieu ou qui lui refusent de prendre en considération sa
sagesse ? » Il a engagé ses auditeurs à « assumer les contraintes de l’existence humaine
», tout en restant fidèle à la parole de Dieu.
De ce fait, a-t-il poursuivi,
les élus ne doivent pas céder à la tentation de cette séparation pour comprendre «
la place des croyances et des religions dans la société ». « Pour un certain nombre
de nos contemporains, elles sont considérées comme des instances chargées de rappeler
des principes moraux, a-t-il jugé. Au nom de la laïcité, on accepte qu’elles se fassent
entendre, mais sans aller jusqu’à prendre en compte leurs observations. (…) Comme
si la seule référence morale était de se modeler sur les comportements existants,
y compris avec leurs contradictions, et de les rendre licites par la loi. » (La Croix)