L’annonce a été faite ce mardi, le pape convoquera les évêques en synode du 5 au 19
octobre 2014. Cette troisième assemblée extraordinaire du synode des évêques aura
pour thème « Les défis pastoraux de la famille dans le contexte de l’évangélisation
». Lors de ses discussions la semaine passée avec le conseil des cardinaux chargé
de l’aider dans le gouvernement de l'Eglise, le pape François avait abordé personnellement
la question de la pastorale familiale. La famille face aux évolutions du monde contemporain,
c'est l’un des défis les plus urgents pour l’Église. L’annonce de ce synode, dont
le Pape François attend beaucoup, réjouit Mgr Jean-Luc Brunin, évêque du Havre et
président du conseil Famille et société de la conférence des évêques de France
“Je me
réjouis de cette volonté du Pape François de faire vivre la collégialité. Et que le
synode permette vraiment la ressaisie de ce qui se vit dans les Églises locales, dans
les diocèses du monde entier. Et que des décisions, des réflexions soient portées
par l’ensemble de la collégialité épiscopale. Je trouve que c’est une bonne évolution
qui va dans le sens de ce que Vatican II a voulu par rapport à la collégialité. »
Est-ce que vous pensez que cette réforme du synode peut amener à plus de
liberté de ton peut-être de la part de certains évêques ou en tout cas avoir le sentiment
d’être mieux entendu ? « Alors peut-être pas de liberté parce que les évêques
ont toujours eu la liberté d’exprimer ce dont ils étaient porteurs à partir de la
vie et des questions de leur diocèse. Mais certainement d’être mieux entendus , de
ne pas entrer dans un cadre un peu trop rigide et trop convenu et de pouvoir avoir
vraiment cette liberté d’expression et de faire entrer la diversité parce que je crois
que la catholicité de l’Église, ça ne peut pas être l’uniformité. La catholicité c’est
faire se croiser des différences de points de vue selon des situations géographiques
et culturelles différentes. » Alors je reviens sur la pastorale de la famille
qui sera donc l’objet du prochain synode. Pourquoi selon vous cette insistance du
Pape François sur la pastorale de la famille ? On a le sentiment que le sujet a été
déjà traité en tout cas largement abordé lors des pontificats précédents. «
Je pense que l’Église a toujours porté le soucis de la famille. La famille est la
cellule de base de la société-disait Jean Paul II dans Familiaris Consortio- qui est
la cellule de base de l’Église. Et c’est vrai qu’aujourd’hui en tout cas, pour ce
qui concerne la France, je me réjouis de cette décision parce qu’on s’est aperçu ces
derniers mois que la famille était menacée. Il y a des dispositions législatives,
des décisions administratives aussi qui peuvent mettre en péril la famille. Et il
me semble qu’aujourd’hui l’Église doit se repositionner dans un service des familles,
dans la diversité de ces familles pour aider finalement les hommes à réussir cette
expérience. Pour moi je pense que ça va dans le sens d’un service d’humanité que l’Église
doit remplir à l’égard des familles et qui est un enjeu pour la société autant que
pour l’Église. » A l’échelle française précisément on sait que les questions
sociétales ont beaucoup divisées ces derniers mois . Quels sont les défis précisément
pour l’Église en terme de pastorale familiale aux vues des différentes évolutions,
des différents thèmes d’actualité ? « Le défi pour l’Église française est
à la fois de manifester ce pourquoi elle tient au mariage et à la famille. Le mariage
étant entre un homme et une femme responsables l’un de l’autre et responsables des
enfants qui naitront de leur union. Cette attestation de ce qu’est la famille dans
une attitude d’ouverture à toutes les formes de vie familiale-non pas pour les cautionner,
l’Église ne dit pas que tout se vaut- mais une responsabilité d’accompagnement des
personnes qui s’engagent dans cette expérience de réussir une vie familiale. Alors
je crois que c’est ce défi -là. Et il me semble que le synode devra pouvoir prendre
en compte à la fois l’attestation que le mariage et la famille dans la tradition de
l’Église, ce n’est pas n’importe quoi. Et en même temps mettre en place une pastorale
des familles qui accompagne chaque famille dans cet exercice difficile de réussir
une vie familiale qui soit épanouissante pour les enfants qui naissent des couples
qui se marient. » Un des dossiers brûlants pour l’Église, on le sait, c’est
la communion pour les divorcés remariés...une question qui devra justement être largement
débattue lors du synode de l’an prochain. Est-ce que l’Église s’oriente progressivement
vers une ouverture à la communion pour ces personnes divorcées remariées ? «
Je pense que dans la logique de ce que le Pape François nous dit maintenant depuis
plusieurs mois, il y a un soucis de l’ouverture, de la miséricorde. Il y a la prise
en compte de cette demande des personnes divorcées remariées qui vivent le non-accès
à la communion eucharistique comme une exclusion de l’Église. Et je crois que nous
pouvons peut être avancer dans une attitude pastorale qui manifeste davantage la miséricorde
sans pour autant revenir quand même sur des choses qui sont fondamentales à savoir
cet engagement à la fidélité. Et il me semble qu’on ne peut pas régler cette question
trop rapidement. C’est très complexe, ça demande certainement beaucoup de discernement,
d’écoute pastorale mais aussi de discernement par rapport à ce dont l’Église est porteuse
dans sa tradition. Et il me semble que si on prenait des mesures libérales, faciles
et rapides , on risquerait finalement de banaliser l’échec de l’engagement à la fidélité
dans le mariage que représente le divorce. Il y a certainement des choses à mettre
en place, je pense à s’inspirer peut-être de ce qui se vit dans la tradition orthodoxe.
Mais il ne s’agirait pas simplement d’ouvrir l’accès à la communion en disant « mais
ce n’est pas grave, on peut ne pas garder la fidélité à l’engagement qu’on a pris.
» C’est banalisé. Je crois qu’il y a là des questions beaucoup plus complexe qui demande
du temps et du discernement. » Le thème exact du prochain synode c’est donc
les défis pastoraux de la famille dans le contexte de l’évangélisation. En quoi la
pastorale familiale peut être aussi source d’évangélisation ? « D’abord
parce que la famille, c’est une bonne nouvelle. La famille, c’est le lieu où on apprend
à se recevoir des autres, on apprend la gratuité dans les relations. Un enfant ne
fait rien pour mériter l’amour de ses parents. Et la gratuité, la gestion des relations,
la gestion des conflits dans une perspective de réconciliation, c’est un lieu essentiel
pour la formation des citoyens et pour la formation des croyants. Et je pense que
l’Église est une bonne nouvelle. Et si l’Église se met au service de l’humanité pour
aider les gens à réussir leur vie de famille, cela participe de la nouvelle évangélisation.
»