2013-10-07 15:37:42

CCEE : les chrétiens ont une Espérance que le monde recherche


L'Europe entre laïcité et laïcisme. Ce fut le thème central des discussions lors de l'Assemblée plénière annuelle des Présidents des Conférences épiscopales d'Europe qui s'est achevée le 6 octobre à Bratislava, ville choisie à l’occasion du 1150ème anniversaire de l’arrivée des Saints Cyrille et Méthode sur sol slovaque. Pour représenter le Saint-Siège, le Préfet de la Congrégation pour les Evêques, le Cardinal Marc Ouellet et le Nonce Apostolique en Slovaquie, l’Archevêque Mario Giordana ont participé à ces trois jours de réflexion.

Quel espace est aujourd’hui reconnu à la religion en Europe ? Quel est dès lors le rôle des communautés religieuses dans les sociétés des pays européens, qui se débattent entre laïcité et laïcisme ? Pour répondre à ces questions, une enquête a été menée auprès des Conférences épiscopales. L’historienne Emila Hrabovec en a présenté les conclusions qui permirent ainsi que les débats qui ont suivi d'esquisser quelques tendances générales et de définir des perspectives de travail.


La tentative de construire une image exclusivement négative de l'Eglise


L’idée de laïcité, normalement acceptée comme étant la séparation entre l'Eglise et l'État, n'exprime pas le même concept dans toutes les cultures. Il existe d’ailleurs une grande variété de termes utilisés pour parler de laïcité : neutralité, tolérance, séparation correcte, bienveillante, etc. Dans les pays de l'Europe centrale et orientale, « le concept de laïcité est importé, étranger à beaucoup de cultures locales » affirme le communiqué final de la CCEE.

L´archeveque de Marseille et président de la Conférence épiscopale de France, Mgr Georges Pontier, nous explique les défis que son pays doit affronter. Il est interrogé par Mario Galgano RealAudioMP3


Il est clair en tout cas que l'identité de la foi catholique a toujours misé sur cette séparation entre Eglise et État. « Cela ne veut pas dire, précise le document, que l'État se désintéresse du phénomène religieux ou bien qu'il doive y avoir une sorte de religion d'État neutre et laïciste ».

Dans les domaines de l’éducation, à l’université, dans les administrations, mais également enseignement de l'histoire, l’historienne souligne qu’on remarque « souvent l'ingérence d'un certain laïcisme et la tentative de construire une image exclusivement négative de l'Eglise et de la foi », précise le communiqué final de la CCEE.


L’Eglise doit prendre la parole, apporter l’Espérance


« La réponse de l'Eglise ne peut pas être celle d'une fermeture qui la transformerait en une forteresse au sein de l'Europe ». Au contraire, les présidents des Conférences épiscopales d’Europe soulignent combien les chrétiens ont une Espérance que le monde recherche. « Les chrétiens ont une claire identité basée sur leur foi qui est vivante et qui réveille l'espérance (…) Les chrétiens sont porteurs d'une expérience et d'un contenu de foi qui est intéressant pour tout le monde » Les évêques européens ont exprimé leur conviction que cette espérance offerte par l'Eglise est précisément ce que le monde cherche.

« Et cette même espérance doit donner aux chrétiens le courage d'affronter les situations difficiles avec un esprit d'ouverture aux questions que leur posent les personnes, en regardant avant tout à la mission évangélisatrice de l'Eglise qui, en suivant Son Seigneur, se sent interpellé par tout ce qui appartient à la vie de l'homme », expliquent les évêques. Ils poussent ainsi à avoir une approche positive et des propositions à l'égard de la réalité et des dynamiques sociales. L’Eglise doit consacrer une réflexion particulière sur plusieurs secteurs prioritaires: la question de l'éducation, la pastorale des jeunes, le thème de la pastorale de la famille et du soin de la famille, ainsi que celui du chômage, notamment le chômage des jeunes.


Pour une laïcité saine


Enfin, l’archevêques de Prague, le Cardinal Duka a d’ailleurs souligné l'importance que l'Eglise participe aux débats publics, non pas pour défendre des privilèges ou un espace au sein de la société, mais plutôt pour le bien commun de l'Europe. Même si le monde d'aujourd'hui est sécularisé, cela ne veut pas dire que l'Eglise ne dispose pas d'un espace dans lequel elle puisse s'exprimer. L'expérience des régimes totalitaires que beaucoup de pays européens ont subi, pousse les fidèles à ne pas vouloir avoir encore « une église du silence ».

En somme, pour les Evêques, une laïcité saine garantit la liberté d'annoncer l'Évangile et la doctrine sociale de l'Eglise, qui est la source du patrimoine d'espérance et d'humanisme qui est à la base du tissu de la civilisation européenne.


Questions urgentes : les chrétiens de Bosnie ou les drame de l’immigration


L’Assemblée plénière de la CCEE est un lieu privilégié de rencontres personnelles où les présidents des Conférences épiscopales peuvent partager leurs défis respectifs. Les Evêques ont manifesté leur solidarité aux chrétiens de Bosnie-Herzégovine qui vivent une « injustice non résolue » qui perdure. L'attention des Evêques a également été attirée par la non application des décisions du tribunal de Bucarest concernant la démolition de la part du maire de la capitale roumaine d'un grand immeuble qui a été construit à côté de la cathédrale catholique de la ville. Un drame comme celui de Lampedusa (quelques 300 migrants ont perdu la vie jeudi dernier) ne doit plus se reproduire : « Les réfugiés qui arrivent en Europe exige, de la part des Etats européens, une solidarité concrète ». Enfin, conséquence de la crise économique que traverse l’Europe : les communautés chrétiennes reçoivent une telle quantité de demandes d'aide, qu'elles ne sont pas en mesure de les satisfaire par manque de ressources. « L'appel à une plus grande solidarité entre pays riches et pays pauvres a clairement retenti ».


Témoignages venant du proche et moyen-Orient

Enfin, les participants ont écouté le témoignage personnel de Mgr William Shomali, Evêque auxiliaire du Patriarcat Latin de Jérusalem, qui a présidé une veillée de prière pour la Terre Sainte, ainsi que celui de Sa Béatitude Ignace Youssif III Younan, Patriarche d'Antioche de l'Eglise syriaque. Ils ont parlé de la situation dramatique au Moyen-Orient et en Terre Sainte, ainsi que de la condition de grande souffrance que vivent les chrétiens, contraints à abandonner leur terre. En ce qui concerne la situation en Syrie, les évêques espèrent que les initiatives diplomatiques en cours soient efficaces et qu'il n'y ait pas d'hypocrisie parmi ceux qui disent vouloir résoudre le problème.
En union avec le Saint-Père, les évêques demandent que la voie du dialogue soit empruntée avec plus de décision et que, à la prière, s'ajoutent des décisions politiques qui puissent conduire à un cessez-le-feu immédiat et à l'interruption de l'entrée d'armes dans le pays qui ne font qu'alimenter la guerre.


Dans le message envoyé au Cardinal Péter Erdő, le Président du CCEE, le Pape François a voulu exprimer toute son appréciation et sa proximité à l'égard du travail que font les Conférences épiscopales en Europe, notamment quant à la contribution qu’elles offrent à la réflexion sur le thème de la laïcité et la promotion d'une culture « qui sache conjuguer foi et raison, vérité et liberté, dans une harmonie constante ».


Photo : l'assemblée générale du CCEE







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