Dialogue avec les non-croyants : le pape écrit au directeur de La Repubblica
Aller vers l’autre, dialoguer avec ceux qui ne partagent pas la même foi et les mêmes
croyances, c’est l’injonction continuelle de François depuis le début de son pontificat.
Il le prouve une nouvelle fois dans les actes en adressant une « lettre à ceux qui
ne croient pas » au directeur du quotidien italien La Repubblica. Le Pape répond à
Eugenio Scalfari qui, dans les colonnes de son journal, avait proposé une série de
réflexions sur l’Eglise et le ministère des souverains pontifes après avoir lu la
première encyclique du pape François « Lumen Fidei » écrite avec son prédécesseur
Benoît XVI.
Par cette lettre, le pape met en œuvre l’un des buts de l’encyclique
« Lumen Fidei », celui d’un dialogue sincère et rigoureux avec un non croyant qui
n’en reste pas moins intéressé et fasciné par les questions liées à la Foi. Un dialogue
qui prend tout son sens dans nos sociétés contemporaines si peu sensibles à la transcendance
et à la figure divine. Son importance dérive de plusieurs circonstances mises en exergue
lors du Concile Vatican II.
Le paradoxe d’abord qui veut que la Foi, qui devrait
illuminer la vie des Hommes, soit dénoncée depuis l’époque moderne comme un sombre
ramassis de superstitions opposé à la lumière de la Raison. D’où la nécessité d’entamer
un dialogue ouvert sans préjugés pour une rencontre féconde. Un dialogue qui n’est
pas une mondanité mais un impératif pour le croyant qui se doit de témoigner de sa
Foi et du Christ.
Le Pape rappelle ainsi que sa Foi est née de la rencontre
avec Jésus, une rencontre personnelle qui a touché son cœur et donné un sens à son
existence. Une rencontre rendue possible par la communauté des chrétiens, l’Eglise,
qui rend accessible les Ecritures, dispense les sacrements, repose sur la fraternité
et l’attention à ses frères et sœurs plus pauvres.
C’est à partir de ce point
central dans sa vie, sa Foi, que le Pape commence ce dialogue avec le directeur de
la Repubblica. François part donc du Christ, de sa vie, de son message. C’est le cœur
de la Foi chrétienne, l’exemple à suivre. Son incarnation, son partage de nos victoires
et de nos défaites, de nos joies et de nos peines en un mot de notre condition témoigne
de l’amour de Dieu pour les Hommes qui sont tous ses fils à l’image du Christ. Un
amour plus fort que le péché, plus fort que la mort, un don qui mérite de donner sa
vie pour en témoigner.
Obéir à sa conscience
« Vous me demandez
si le Dieu des chrétiens pardonne ceux qui ne croient pas et ne cherchent pas la foi
», reprend le pape. « La miséricorde de Dieu n’a pas de limite si l’on s’adresse à
lui avec un cœur sincère et contrit », assure-t-il alors comme présupposé, avant de
poursuivre : « Pour ceux qui ne croient pas en Dieu, la question est d’obéir à sa
conscience ». « Le péché, précise-t-il, même pour ceux qui ne croient pas, est
d’aller contre sa conscience. L’écouter et lui obéir signifie en effet prendre des
décisions face à ce qui est perçu comme bien ou mal. Et c’est sur cette décision que
se joue la bonté ou la méchanceté de notre action ».
Découle ainsi la question
de l’existence de l’Absolu et de la Vérité absolue ou bien d’une série de vérités
relatives et subjectives, ce relativisme si souvent dénoncé par Benoît XVI. Le pape
indique que, même pour les croyants, la vérité ne saurait être absolue, car elle est
relation avec Jésus et « chemin » permanent, ce qui ne fait pas d’elle un élément
« variable et subjectif » pour autant.
La Vérité pour la Foi chrétienne est
cet amour de Dieu pour nous en Jésus-Christ. Ce « chemin » pour la trouver est fait
d’humilité et d’ouverture pour l’accueillir et l’exprimer. « L’Eglise, croyez-moi,
conclut le pape, malgré toutes ses lenteurs, ses infidélités, ses erreurs et les péchés
qu’elle peut avoir commis et qu’elle peut encore commettre à travers ceux qui la composent,
n’a pas d’autre sens et d’autre fin que de vivre et de témoigner de Jésus ». (Olivier
Tosseri)