Message du Pape pour la journée missionnaire mondiale : le devoir de porter l'espérance
et l'amour
Le pape François est proche par la prière des personnes, des familles et des communautés
chrétiennes qui endurent la violence et l’intolérance. Il l’affirme dans son message
pour la prochaine journée missionnaire mondiale qui sera célébrée le 20 octobre. Un
texte qui appelle tous les disciples du Christ à proposer avec courage et respect
l’Evangile du Christ, car la foi est un don qui doit être partagé, faute de quoi nous
risquons de devenir des chrétiens isolés, stériles et malades.
Le Saint-Père
tient à rassurer ceux qui craignent de faire ainsi violence à la liberté des autres
: le caractère missionnaire de l’Église n’est pas un prosélytisme mais un témoignage
de vie qui illumine le chemin, qui porte espérance et amour. Ce devoir – souligne
le pape François - est encore plus urgent en cette période de crise, alors que l’horizon
est assombri par des nuages menaçants.
Pas un prosélytisme mais un témoignage
de vie
L’homme de notre temps a besoin d’une lumière sûre qui éclaire sa
route et que seule la rencontre avec le Christ peut donner. L’Église n’est pas une
entreprise ou une ONG ; l’engagement apostolique n’est pas complet s’il ne rend pas
témoignage du Christ devant les Nations et face à tous les peuples. Dans son message,
le pape François exhorte par ailleurs les Eglises où les vocations sont nombreuses
à aider généreusement celles qui en manquent, surtout dans les pays d’ancienne chrétienté.
L’envoi de missionnaires n’est jamais une perte mais un gain. Enfin, le Souverain
Pontife adresse une pensée aux chrétiens qui, en différentes parties du monde, ne
peuvent pas professer ouvertement leur foi et la vivre dignement. Il salue avec affection
ces témoins courageux – encore plus nombreux que les martyrs des premiers siècles
– qui supportent avec persévérance apostolique les différentes formes actuelles de
persécutions et qui risquent leur vie pour demeurer fidèles à l’Évangile du Christ.
La
journée mondiale missionnaire a traditionnellement lieu l'avant-dernier dimanche d'octobre,
mois de la mission. La quête effectué en ce dimanche de la mission est le point culminant
de la Semaine Missionnaire Mondiale. Elle a été instaurée par le pape Pie XI en 1926.
Elle est dévolue aux Œuvres Pontificales Missionnaires.
(Photo: des Missonnaires
de la charité commémorant la naissance de Mère Theresa, le 26 août 2012)
Voici
l'intégralité du message du Pape:
Chers frères et sœurs,
Cette année,
nous célébrons la Journée missionnaire mondiale alors que s’achève l’Année de la foi,
occasion importante pour renforcer notre amitié avec le Seigneur et notre cheminement
en tant qu’Église qui annonce avec courage l’Évangile. Dans cette perspective, je
souhaiterais proposer quelques réflexions.
1. La foi est un précieux don de
Dieu, qui ouvre notre esprit afin que nous puissions le connaître et l’aimer. Il veut
entrer en relation avec nous afin de nous faire participer à sa vie même et rendre
notre vie davantage pleine de signification, meilleure, plus belle. Dieu nous aime
! La foi demande cependant à être accueillie. Elle demande donc une réponse personnelle
de notre part, le courage de faire confiance à Dieu, de vivre son amour, reconnaissants
pour son infinie miséricorde. Elle est ensuite un don qui n’est pas réservé à quelques-uns
mais qui est offert avec générosité. Tous devraient pouvoir faire l’expérience de
la joie de se sentir aimés par Dieu, de la joie du salut ! Et il s’agit d’un don qu’il
n’est pas possible de conserver pour soi mais qui doit être partagé : si nous voulions
le garder seulement pour nous, nous deviendrions dans ce cas des chrétiens isolés,
stériles et malades. L’annonce de l’Évangile est inséparable du fait d’être disciples
du Christ et elle constitue un engagement constant qui anime toute la vie de l’Église.
« L’élan missionnaire est un signe clair de la maturité d’une communauté ecclésiale
» (Benoît XVI, Exhortation apostolique Verbum Domini, n. 95). Chaque communauté est
« adulte » lorsqu’elle professe la foi, qu’elle la célèbre avec joie dans la liturgie,
qu’elle vit la charité et annonce sans relâche la Parole de Dieu, sortant de son enclos
afin de la porter également dans les « périphéries », surtout à ceux qui n’ont pas
encore eu la possibilité de connaître le Christ. La solidité de notre foi, au plan
personnel et communautaire, se mesure aussi à partir de la capacité de la communiquer
à d’autres, de la diffuser, de la vivre dans la charité, d’en témoigner auprès de
ceux qui nous rencontrent et partagent avec nous le chemin de la vie.
2. L’Année
de la foi, cinquante ans après le début du Concile Vatican II, nous appelle à faire
en sorte que l’Église tout entière ait une conscience renouvelée de sa présence dans
le monde contemporain, de sa mission parmi les peuples et les nations. Le caractère
missionnaire n’est pas seulement une question de territoires géographiques mais de
peuples, de cultures et de personnes, parce que justement les « frontières » de la
foi ne traversent pas seulement des lieux et des traditions humaines mais le cœur
de tout homme et de toute femme. Le Concile Vatican II a souligné de façon particulière
la manière dont le devoir missionnaire, le devoir d’élargir les frontières de la foi,
est le propre de tout baptisé et de toutes les communautés chrétiennes : « Puisque
le Peuple de Dieu vit dans des communautés, diocésaines et paroissiales surtout, et
que c’est dans ces communautés que d’une certaine manière il se montre visible, c’est
aussi aux communautés qu’il appartient de rendre témoignage au Christ devant les nations
» (Décret Ad Gentes, n. 37). Chaque communauté est donc interpellée et invitée à faire
sien le mandat confié par Jésus à ses Apôtres afin qu’ils soient ses « témoins à Jérusalem,
dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre » (Ac 1, 8),
non pas comme un aspect secondaire de la vie chrétienne mais comme un aspect essentiel
: nous sommes tous envoyés sur les routes du monde pour cheminer avec nos frères,
en professant et en témoignant notre foi au Christ et en étant annonciateurs de son
Évangile. J’invite les Évêques, les prêtres, les Conseils presbytéraux et pastoraux,
toute personne et tout groupe responsable à l’intérieur de l’Église à donner de l’importance
à la dimension missionnaire au sein de leurs programmes pastoraux et de formation,
ressentant que son propre engagement apostolique n’est pas complet s’il ne comprend
pas l’intention de « rendre témoignage du Christ devant les Nations », face à tous
les peuples. Le caractère missionnaire n’est pas seulement une dimension programmatique
dans la vie chrétienne mais il est également une dimension paradigmatique qui concerne
tous les aspects de la vie chrétienne.
3. Souvent, l’œuvre d’évangélisation
rencontre des obstacles non seulement à l’extérieur mais à l’intérieur même de la
communauté ecclésiale. Parfois la ferveur, la joie, le courage, l’espérance que nous
mettons dans le fait d’annoncer à tous le Message du Christ et d’aider les hommes
de notre temps à le rencontrer sont faibles. Parfois, certains pensent encore que
porter la Vérité de l’Évangile consiste à faire violence à la liberté. Paul VI a des
paroles lumineuses à ce propos : « Ce serait … une erreur d’imposer quoi que ce soit
à la conscience de nos frères. Mais c’est tout autre chose de proposer à cette conscience
la vérité évangélique et le salut en Jésus-Christ en pleine clarté et dans le respect
absolu des options libres qu’elle fera … c’est un hommage à cette liberté » (Exhortation
apostolique Evangelii nuntiandi, n. 80). Nous devons toujours avoir le courage et
la joie de proposer, avec respect, la rencontre avec le Christ, de nous faire porteurs
de son Évangile. Jésus est venu parmi nous pour indiquer le chemin du salut et il
nous a confié à nous aussi la mission de le faire connaître à tous, jusqu’aux extrémités
de la terre. Souvent, nous voyons que ce sont la violence, le mensonge, l’erreur qui
sont mis en relief et proposés. Il est urgent de faire resplendir à notre époque la
bonne vie de l’Évangile au travers de l’annonce et du témoignage et cela à l’intérieur
même de l’Église parce que, dans cette perspective, il est important de ne jamais
oublier un principe fondamental pour tout évangélisateur : il n’est pas possible d’annoncer
le Christ sans l’Église. Évangéliser n’est jamais un acte isolé, individuel, privé
mais toujours ecclésial. Paul VI écrivait que « lorsque le plus obscur prédicateur,
catéchiste ou pasteur, dans la contrée la plus lointaine, prêche l’Évangile, rassemble
sa petite communauté ou confère un sacrement, même seul, il fait un acte d’Église
». Il agit « non pas par une mission qu’il s’attribue, ou par une inspiration personnelle,
mais en union avec la mission de l’Église et en son nom » (Ibid. n. 60). Et cela donne
force à la mission et fait sentir à tout missionnaire et évangélisateur qu’il n’est
jamais seul mais qu’il fait partie d’un seul Corps, animé par le Saint Esprit.
4.
À notre époque, la mobilité diffuse et la facilité de communication au travers des
« nouveaux média » ont mélangé entre eux les peuples, les connaissances, les expériences.
Pour des raisons de travail, des familles entières se déplacent d’un continent à l’autre.
Les échanges professionnels et culturels, suivis par le tourisme et des phénomènes
analogues, provoquent un vaste mouvement de personnes. Parfois il est difficile même
pour les Communautés paroissiales de connaître de manière sûre et approfondie ceux
qui sont de passage ou ceux qui vivent de manière stable sur le territoire. En outre,
dans des zones toujours plus vastes des régions traditionnellement chrétiennes s’accroît
le nombre de ceux qui sont étrangers à la foi, indifférents à la dimension religieuse
ou animés par d’autres croyances. Par ailleurs, il n’est pas rare que certains baptisés
fassent des choix de vie qui les conduisent loin de la foi, rendant ainsi nécessaire
qu’ils fassent l’objet d’une « nouvelle évangélisation ». À tout cela vient s’ajouter
le fait qu’une vaste part de l’humanité n’a pas été atteinte par la Bonne Nouvelle
de Jésus Christ. Nous vivons par ailleurs un moment de crise qui touche différents
secteurs de l’existence, non seulement celui de l’économie, de la finance, de la sécurité
alimentaire, de l’environnement mais également celui du sens profond de la vie et
des valeurs fondamentales qui l’animent. La coexistence humaine est marquée, elle
aussi, par des tensions et des conflits qui provoquent insécurité et difficulté à
trouver le chemin d’une paix stable. Dans cette situation complexe, où l’horizon du
présent et de l’avenir semblent caractérisés par des nuages menaçants, il est encore
plus urgent de porter avec courage au sein de chaque réalité l’Évangile du Christ
qui constitue une annonce d’espérance, de réconciliation, de communion, une annonce
de la proximité de Dieu, de sa miséricorde, de son salut, une annonce du fait que
la puissance de l’amour de Dieu est capable de l’emporter sur les ténèbres du mal
et de conduire sur le chemin du bien. L’homme de notre temps a besoin d’une lumière
sûre qui éclaire sa route et que seule la rencontre avec le Christ peut donner. Portons
à ce monde, par notre témoignage, avec amour, l’espérance donnée par la foi ! Le caractère
missionnaire de l’Église n’est pas un prosélytisme mais un témoignage de vie qui illumine
le chemin, qui porte espérance et amour. L’Église – je le répète une fois encore –
n’est pas une organisation d’assistance, une entreprise, une ONG mais une communauté
de personnes animées par l’action de l’Esprit Saint, qui ont vécu et vivent l’étonnement
de la rencontre avec Jésus Christ et désirent partager cette expérience de joie profonde,
partager le Message de salut que le Seigneur nous a apporté. C’est justement l’Esprit
Saint qui conduit l’Église sur ce chemin.
5. Je voudrais tous vous encourager
à vous faire porteurs de la Bonne Nouvelle du Christ et je suis particulièrement reconnaissant
aux missionnaires, aux prêtres fidei donum, aux religieux et aux religieuses, aux
fidèles laïcs – toujours plus nombreux – qui, répondant à l’appel du Seigneur, quittent
leur propre patrie pour servir l’Évangile dans des terres et des cultures différentes.
Mais je voudrais également souligner combien les jeunes Églises elles-mêmes s’engagent
actuellement généreusement dans l’envoi de missionnaires aux Églises qui se trouvent
en difficulté – et il n’est pas rare qu’il s’agisse d’Églises d’antique chrétienté
– portant ainsi la fraîcheur et l’enthousiasme avec lesquels elles vivent la foi qui
renouvelle la vie et donne l’espérance. Vivre selon ce souffle universel, en répondant
au mandat de Jésus, « allez donc, de toutes les nations faites des disciples » (Mt
28, 19), est une richesse pour toute Église particulière, pour toute communauté et
donner des missionnaires n’est jamais une perte mais un gain. Je fais appel à ceux
qui perçoivent cette vocation à répondre généreusement à la voix de l’Esprit, selon
leur état de vie, et à ne pas avoir peur d’être généreux avec le Seigneur. J’invite
également les Évêques, les familles religieuses, les communautés et tous les groupements
chrétiens à soutenir, avec clairvoyance et un discernement attentif, l’appel missionnaire
ad gentes et à aider les Églises qui ont besoin de prêtres, de religieux et de religieuses
ainsi que de laïcs pour renforcer la communauté chrétienne. Ceci devrait être également
une attention présente au sein des Églises faisant partie d’une même Conférence épiscopale
ou d’une même Région : il est important que les Églises qui sont plus riches en vocations
aident avec générosité celles qui souffrent suite à leur manque. J’exhorte aussi
les missionnaires, en particulier les prêtres fidei donum et les laïcs, à vivre avec
joie leur précieux service dans les Églises auxquelles ils sont envoyés, et à porter
leur joie et leur expérience aux Églises dont ils proviennent, se rappelant comment
Paul et Barnabé, au terme de leur premier voyage missionnaire « se mirent à rapporter
tout ce que Dieu avait fait avec eux, et comment il avait ouvert aux païens la porte
de la foi » (Ac 14, 27). Ils peuvent devenir un chemin pour une sorte de « restitution
» de la foi, en portant la fraîcheur des jeunes Églises, afin que les Églises d’antique
chrétienté retrouvent l’enthousiasme et la joie de partager la foi dans un échange
qui est enrichissement réciproque sur le chemin à la suite du Seigneur. La sollicitude
envers toutes les Églises, que l’Évêque de Rome partage avec ses confrères Évêques,
trouve une importante réalisation dans l’engagement des Œuvres pontificales missionnaires,
qui ont pour but d’animer et d’approfondir la conscience missionnaire de chaque baptisé
et de chaque communauté, tant en rappelant la nécessité d’une plus profonde formation
missionnaire de l’ensemble du Peuple de Dieu qu’en alimentant la sensibilité des Communautés
chrétiennes afin qu’elles offrent leur aide pour favoriser la diffusion de l’Évangile
dans le monde. Une pensée enfin va aux chrétiens qui, en différentes parties du
monde, se trouvent en difficulté en ce qui concerne le fait de professer ouvertement
leur foi et de se voir reconnu le droit de la vivre dignement. Ce sont nos frères
et sœurs, témoins courageux – encore plus nombreux que les martyrs des premiers siècles
– qui supportent avec persévérance apostolique les différentes formes actuelles de
persécution. Nombreux sont ceux qui risquent même leur vie pour demeurer fidèles à
l’Évangile du Christ. Je désire assurer que je suis proche par la prière des personnes,
des familles et des communautés qui endurent la violence et l’intolérance et je leur
répète les paroles consolantes de Jésus : « Gardez courage ! J’ai vaincu le monde
» (Jn 16, 33). Benoît XVI exhortait : « ‘Que la Parole du Seigneur accomplisse
sa course et soit glorifiée’ (2 Th 3, 1) : puisse cette Année de la foi rendre toujours
plus solide la relation avec le Christ Seigneur, puisque seulement en lui se trouve
la certitude pour regarder vers l’avenir et la garantie d’un amour authentique et
durable » (Lettre apostolique Porta Fidei, n. 15). C’est mon souhait pour la Journée
missionnaire mondiale de cette année. Je bénis de tout cœur les missionnaires et tous
ceux qui accompagnent et soutiennent cet engagement fondamental de l’Église afin que
l’annonce de l’Évangile puisse résonner dans tous les coins de la terre et que nous,
Ministres de l’Évangile et missionnaires, fassions l’expérience de « la douce et réconfortante
joie d’évangéliser » (Paul VI, Exhortation apostolique Evangelii nuntiandi, n. 80).
Du
Vatican, le 19 mai 2013, Solennité de la Pentecôte