2013-07-17 08:21:15

Bangladesh : les violences sont la «réaction d’un parti islamiste en déroute»


La police a tiré mardi sur une foule, au Bangladesh, protestant contre la condamnation du chef spirituel du parti islamiste Jamaat-e-islami un jour plus tôt. Deux personnes ont été tuées.

Ghulam Azam a été condamné lundi à 90 ans de prison pour des atrocités commises sous sa responsabilité lors de la lutte pour l'indépendance du pays contre le Pakistan en 1971. En réaction, ses partisans ont provoqué des émeutes dans le sud-ouest du pays.

Pour Jérémie Codron, politologue spécialiste du Bangladesh au Centre d’études de relations internationales à Paris, ces violences ne sont pas surprenantes. Ce sont celles d’un parti qui tente désormais de survivre. Il l’explique à Antonino Galofaro : RealAudioMP3

Cette violence ne fait partie d’aucune stratégie politique. « Le parti est totalement en déroute, explique Jérémie Codron. Le but du parti au pouvoir, de tendance laïc, consiste à décapiter la Jamaat-e-islami, de l’éliminer de la scène politique bangladaise. »

Jamaat-e-islami, un parti minoritaire, selon le politologue. Peu populaire « en vertu de son passé lors de la guerre d’indépendance ». C’est encore un parti vu comme un parti de « collabos », qui a lutté contre l’indépendance du Bangladesh aux côtés de l’armée pakistanaise.

« Il est stigmatisé, poursuit Jérémie Codron. Ce qu’il cherche à faire pour l’instant, c’est essayer de garder la place qu’il avait dans le système politique, une place qui doit correspondre à 10% du vote populaire. »

90 ans de prison

« Il a été prouvé que Ghulam Azam a été l'architecte des milices, dont Peace Committee, Al Badr et Bazakar », a déclaré le juge en présence de l'accusé, en fauteuil roulant, tandis que le tribunal était placé sous haute sécurité. Le nonagénaire a toutefois échappé à la peine capitale au vu de son âge et de sa santé.

L'accusation l'a comparé à Adolf Hitler pour son rôle de « guide » dans les massacres lors des neuf mois de la sanglante guerre d'indépendance, qui a abouti à la naissance du Bangladesh, jusqu'à alors province du Pakistan baptisée Pakistan oriental.

La sentence, c’est celle du « Tribunal internationale des crimes ». Un tribunal contesté et, malgré son nom, national. Pour Jérémie Codron, cette instance judiciaire peut être vue comme un outil du gouvernement contre le parti islamiste : RealAudioMP3

Indépendance

Lors de l'intervention de l'Inde à la fin du conflit, signifiant la défaite imminente du Pakistan, les milices pro-Islamabad ont massacré des dizaines d'enseignants, de réalisateurs, de médecins et de journalistes.

Ghulam Azam a notamment été présenté comme le « cerveau » des meurtres d'intellectuels. De nombreux d'entre eux ont été retrouvés quelques jours après la fin de la guerre dans un marécage à l'extérieur de Dacca, les yeux bandés et les mains attachées derrière le dos.

(Photo : Ghulam Azam, à la sortie du tribunal, lundi à Dacca)







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