Zimbabwe : les évêques appellent les électeurs à voter pacifiquement
Les diplomates zimbabwéens en poste à l'étranger ainsi que près de 87.000 personnes,
militaires, policiers et membres des principaux organes sécuritaires du Zimbabwe ont
commencé à voter par anticipation dimanche et lundi 14 et 15 juillet 2013, deux semaines
avant l'élection du 31 juillet qui opposera à nouveau le président Robert Mugabe au
Premier ministre, Morgan Tsvangirai. Dans la capitale, Harare, policiers et militaires
en uniformes faisaient la queue devant les bureaux de vote, sous le regard d'observateurs
électoraux régionaux et des objectifs tandis que lors des précédents scrutins, ce
vote se déroulait portes closes, dans les casernes, sans la présence d'observateurs
indépendants.
2 400 observateurs catholiques à travers le pays
La
Conférence épiscopale du Zimbabwe dépêchera 2'400 observateurs dans les bureaux de
vote, a annoncé Arkmore Kori, le directeur de la Commission Justice et Paix. Cette
mesure est destinée à “donner confiance” et encourager les inscrits à participer aux
élections législatives et présidentielles du 31 juillet.
Dans un entretien
à la revue des jésuites In Touch, Arkmore Kori a déclaré que des volontaires seraient
également déployés “dans les régions les plus reculées” du pays, difficiles d'accès
pour les observateurs. “Nous appelons les gens à aller voter et à voter de manière
pacifique, a rappelé Arkmore Kori, en tenant compte du fait que le choix de ses dirigeants
s’inscrit dans le cadre de la responsabilité pastorale de chaque chrétien”.
Le
directeur de Justice et Paix du Zimbabwe a ajouté que dans 2'400 des quelque 9'700
bureaux de vote prévus pour le scrutin, certains volontaires porteraient un T-shirt
avec l’inscription “observateur catholique”. Il s’agit d’un moyen, selon Arkmore Kori,
d’encourager une population “qui a perdu confiance” depuis les violences qui avaient
caractérisé les élections de 2008.
Le spectre des violences post-électorales
de 2008 ressurgit au Zimbabwe
Amnesty International a publié un rapport
ce vendredi sur l’élection présidentielle qui se déroulera le 31 juillet prochain.
Rapport dans lequel l’organisation de défense des droits de l’Homme souligne un climat
de restriction des libertés politiques.
Le scrutin voit s’affronter le président
sortant Robert Mugabe, au pouvoir depuis l’indépendance en 1980, et son Premier ministre,
Morgan Tsvangirai, les deux candidats d’il y a cinq ans. Comme à l’époque, le climat
est tendu et les actes d’intimidation envers les candidats ou les partisans du chef
du gouvernement et chef du MDC ( Mouvement pour un changement démocratique) se multiplient
à l’approche de l’élection. C’est ce que relève Amnesty dans son rapport sur lequel
revient Quentin Ferral, coordinateur pour l’Afrique australe à Amnesty France.
Il est interrogé par Xavier Sartre
«
Amnesty International a mené depuis 2008 une quinzaine d’enquêtes sur le terrain,
interrogeant des militants des droits de l’Homme, des autorités officielles et des
journalistes. Nous constatons que depuis l’adoption de la Constitution, il y a de
nombreuses intimidations de la part des forces de sécurité qui entravent le travail
des ONG locales », explique-t-il. Des militants sont ainsi arrêtés et retenus au poste
de police pendant quelques heures, sans que des poursuites pénales soient nécessairement
entreprises. Des locaux d’organisations ont été visités par des policiers ou des membres
des forces de l’ordre afin de « dissuader ces militants de faire leur travail ou de
dissuader même les électeurs de se rendre aux urnes ».
Police et armée aux
mains de Mugabe
Cet état de fait que dénonce Amnesty International montre
bien que l’essentiel de l’appareil sécuritaire du Zimbabwe est demeuré dans les mains
de Robert Mugabe et de ses partisans. Morgan Tsvangirai, pourtant chef du gouvernement
depuis la fin de la crise politique post-électorale, n’est pas parvenu à contrebalancer
l’influence de celui préside aux destinées du pays d’une main de fer depuis trente-trois
ans.
Face aux craintes de nouvelles irrégularités lors du vote, Amnesty International
appelle les observateurs africains de la SADC, la Communauté de développement des
Etats d’Afrique australe, à ne pas vérifier que les opérations de vote mais de voir
ce qui se passe dehors pour s’assurer que tous les électeurs aient la possibilité
de voter.
De son côté, l’Union européenne, qui « aurait voulu davantage de
réformes » avant les élections, lèvera ses sanctions contre le régime zimbabwéen si
le scrutin est validé par les observateurs régionaux. C’est ce qu’a fait savoir l’ambassadeur
de l’UE, Roland van de Geer ce vendredi depuis l’Afrique du Sud. Il a réclamé des
réformes notamment dans les secteurs de l’armée et de la police, points sensibles.
(Photo : un officier s'apprête à voter ce lundi à Harare)