Syrie : les appels à la libération des évêques se multiplient
On reste sans nouvelle fiable des deux évêques orthodoxes enlevés au nord de la Syrie
alors qu'ils effectuaient une opération humanitaire. Mgr Youhanna Ibrahim, évêque
syriaque orthodoxe d’Alep, et de Mgr Boulos Yazigi, évêque grec orthodoxe d’Alep,
le frère du patriarche Jean X Yazigi, ont été capturé lundi dernier à Kafar Dael,
dans la région d'Alep alors qu'ils rentraient ensemble de la frontière turque. et
de Ibrahim, chef du diocèse de l’Eglise syriaque orthodoxe d’Alep.
Aucune revendication
n'a été formulée pour cet enlèvement, mais des sources au sein de l'Eglise grecque
orthodoxe, de même que le régime syrien, ont affirmé que les ravisseurs étaient des
« djihadistes tchétchènes ».
« Ce sont nos amis, c'est donc une grande
douleur »
L’Eglise catholique ne cesse appeler à la paix en Syrie.
Mercredi dernier, le pape François exigeait qu' « une solution soit trouvée au plus
vite à la crise », demandant la libération des deux prélats chrétiens.
Dans
un entretien accordé à Radio Vatican, le secrétaire du Conseil pontifical pour
l’Unité des chrétiens se montre préoccupé : « Ces derniers jours, nous avons été
attristés, énormément, par le rapt des deux métropolites, des personnes connues et
estimées. Ce sont nos amis, explique Monseigneur Brian Farrell. « Tous deux sont venus
à plusieurs reprises au Vatican. Nous les connaissons bien. C’est donc une grande
douleur, mais aussi le symbole de la souffrance endurée par des milliers de chrétiens
dans cette zone ».
Et s’il y avait un message à délivrer aux auteurs de cet
enlèvement, Mgr Farrell rappelle que ces deux prélats n’ont rien fait d’autre que
de parler de paix, d’amour de justice. « Ils n’appellent jamais à la violence ou à
la division entre les partis ». Ce sont des personnes, poursuit le secrétaire du Conseil
pontifical pour l’Unité des chrétiens, qui ont travaillé pendant des années afin d’améliorer
les rapports non seulement entre chrétiens, mais aussi avec leurs voisins musulmans.
Ainsi, ce sont deux personnes à respecter absolument. « Nous espérons qu’elles seront
respectées et libérées au plus vite », conclue-t-il.
Patriarche Cyrille
: « cet acte démontre les objectifs de ceux qui ont provoqué le conflit »
Le
chef de l'Eglise orthodoxe russe, le patriarche Cyrille a exprimé dans un message
à Mar Zakka Iwas, le patriarche syriaque orthodoxe d’Antioche, sa profonde affliction.
« Une fois de plus, nous sommes témoins d’actions inhumaines et cyniques, commises
par ceux que certains médias tentent de présenter dans le rôle de défenseurs de la
liberté et de la démocratie. Cet acte atroce démontre de façon éloquente les véritables
objectifs de ceux qui ont provoqué un conflit sanglant en Syrie. Notre Eglise prie
pour la santé et la prompte libération des hiérarques enlevés. A cette heure, nous
partageons la souffrance et l’affliction de tous les chrétiens syriens », écrit le
primat de l’Eglise russe qui a lancé un appel au président de la Fédération de Russie,
au président des Etats-Unis, au secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies
et au Premier ministre turc, soutien des rebelles, leur demandant de tout mettre en
œuvre pour obtenir la prompte libération des prélats syriens.
La communauté
internationale appelée à réagir
Jeudi soir, le vice-ministre russe
des Affaires étrangères a estimé, depuis Beyrouth, que cet enlèvement était un
« grand crime ». A l'issue d'une rencontre avec des associations orthodoxes au Liban,
Mikhail Bogdanov a estimé quil s’agissait d’une « question qui concerne tout le monde
en Syrie, notamment la société, le pouvoir et évidemment l'Eglise ». Le haut fonctionnaire
du Kremlin, allié fidèle du régime de Bachar Al Assad, a enfin garantit que son pays
participait aux efforts pour leur libération. « Nous, Etat russe, aux côtés de l'Eglise
orthodoxe, mènerons tous les efforts nécessaires pour permettre la libération des
otages en Syrie et pour résoudre la crise dans ce pays ».
Lors d’un point
presse organisé jeudi soir, le porte-parole du Quai d’Orsay a fait savoir que
« la France condamne fermement » l'enlèvement, qui constitue « une grave violation
des droits de l'homme ». Paris appelle à leur libération « immédiate et exprime sa
solidarité aux communautés chrétiennes qui doivent pouvoir vivre en paix dans une
Syrie respectueuse de toutes ses composantes », a déclaré Philippe Lalliot.
Des
veillées quotidiennes de prières à Alep
Selon les organisations de défenses
des droits de l’homme, les chrétiens, qui constituent environ 5% de la population
syrienne, sont particulièrement vulnérables dans le contexte d'anarchie favorisé par
le conflit qui ensanglante le pays depuis mars 2011.
Depuis plusieurs jours,
dans toutes les églises d'Alep, les fidèles catholiques et orthodoxes participent
à des veillées de prières et à des messes pour obtenir la libération des deux prélats.
Selon Mgr Jean-Clément Jeanbart, l’archevêque grec-catholique melkite d'Alep interrogé
par AsiaNews, plus d'un millier de fidèles participent chaque après-midi à ces moments
de prières.
Pour la première fois deux évêques sont enlevés en Syrie, mais
ce n’est pas la première fois que des chrétiens le sont, parfois par dizaines. Les
prises d’otage semblent de plus en plus récurrentes et visent en général les membres
des minorités, dont les Alaouites, minorité chiite à laquelle appartient le clan de
Bachar el Assad.