Les catholiques sont invités à exprimer une « solidarité authentique envers les autistes
». Dans un message à l’occasion de la 6ème journée mondiale de sensibilisation
à l’autisme, Mgr Zimowski, président du Conseil pontifical pour les services de santé
demande que les personnels de santé apportent « un vrai témoignage d’amour et de proximité
aux malades ». « Ne pas perdre de vue la personne dans son intégralité », « ne pas
la considérer comme un simple numéro », en somme maintenir « le sel » de l’amour pour
que toutes les procédures de soin soient vraiment efficaces : voilà ce qu’il propose.
«
Dans la pratique, il s'agit d'accueillir les enfants autistes dans les différents
secteurs des activités sociales, éducatives, catéchétiques, liturgiques d'une façon
qui corresponde à leurs capacités relationnelles et y soit proportionnelle. » Dépasser
les stéréotypes qui frappent les autistes Le président du Conseil pontifical
des services de santé appelle chacun à dépasser les stéréotypes qui frappent les autistes
et qui souvent sont synonymes de « sentence d’éloignement définitif de la société
». Il rappelle que « l’Eglise a toujours, depuis sa naissance, manifesté son attention
à cet aspect de la médecine, en apportant des témoignages concrets au niveau universel.
Un témoignage, surtout, est l'Amour au-delà du stigmate, ce stigmate social qui isole
le malade, le faisant se sentir un corps étranger ».
« La dimension affective
» est soulignée. Il ne faut pas la perdre de vue surtout dans « le monde actuel de
la santé, un monde parfait dans sa "technicité" ». « Se mettre à l'écoute » doit s'accompagner
ainsi « d'une solidarité fraternelle authentique ».
Pour Christiane Cirasse,
chargée de mission pour la pastorale des personnes handicapées au sein de la Conférence
des évêques de France, la notion d’accompagnement des personnes autistes demeure essentielle.
Ecoutez-la, elle est interrogée par Manuella Affejee
Intégralité
du message :
Très chers frères et très chères sœurs, A l'occasion
de la 6ème Journée mondiale de sensibilisation à l'autisme, qui est célébrée
cette année pendant le temps liturgique en correspondance des fêtes de Pâques, le
Conseil Pontifical des Services de Santé entend manifester le souci de l'Eglise pour
les personnes autistes et pour leurs familles, en invitant les communautés chrétiennes
et toutes les personnes de bonne volonté à exprimer une solidarité authentique à leur
égard. Je voudrais baser ma réflexion sur l'attitude de Jésus en marche vers Emmaüs
aux côtés des deux disciples (cf. Lc 24,13-35). Le regard égaré – et plus encore,
émerveillé – qui rythme le pas de Cléophas et de Simon – pourrait être le même que
celui qui marque le visage et le cœur des parents ayant un ou une enfant autiste,
ou fortement lui ressembler. Autisme : un mot qui fait peur aujourd'hui encore,
bien que dans les nombreux soins qui, traditionnellement, excluaient les handicaps
un progrès ait été fait pour accepter dans la société les personnes "différentes",
pour démanteler beaucoup de préjugés relatifs aux personnes handicapées et jusqu'à
leurs familles. Définir une personne comme autiste semble comporter automatiquement
un jugement négatif sur celle qui en est atteint et, implicitement, une sentence d'éloignement
définitif de la société. Par ailleurs, la personne semble être dans l'incapacité de
communiquer à autrui de façon profitable - comme si, parfois, elle se trouvait sous
une "cloche de verre" – l'univers intérieur qui est le sien, un univers merveilleux
pour nous, mais impénétrable. Et c'est cette image "typique et stéréotypée" de
l'enfant autiste qui doit être entièrement revue. Comme une sorte de fil rouge, l'Eglise
a toujours, depuis sa naissance, manifesté son attention à cet aspect de la médecine,
en apportant des témoignages concrets au niveau universel. Un témoignage, surtout,
est l'Amour au-delà du stigmate, ce stigmate social qui isole le malade, le faisant
se sentir un corps étranger : je me réfère ici à ce sentiment de solitude dont on
parle souvent dans la société moderne mais qui est encore plus présent dans le monde
actuel de la santé, un monde parfait dans sa "technicité", mais toujours plus absent
et privé de cette dimension affective qui, au contraire, devrait caractériser chaque
acte ou parcours thérapeutique. Face aux problèmes et aux difficultés que ces
enfants et leurs parents doivent affronter, c'est avec humilité que l'Eglise propose
un itinéraire au frère souffrant, en l'accompagnant avec compassion et tendresse tout
au long de son parcours tortueux au plan humain et psycho-relationnel, en ayant recours
aux paroisses, aux associations, aux mouvements ecclésiaux et aux personnes de bonne
volonté. Très chers frères et très chères sœurs, il faut nécessairement que le
fait de "se mettre à l'écoute" s'accompagne d'une solidarité fraternelle authentique.
Il doit toujours y avoir une attention globale à la personne "fragile", comme c'est
le cas du malade autiste : une attention qui se concrétise dans le sentiment de proximité
que chaque agent de la santé – suivant le rôle particulier de chacun – doit savoir
transmettre à son malade et à sa famille, pour que l'autiste ne se sente pas un simple
numéro, en faisant en sorte de donner corps à une situation où le chemin est partagé,
un chemin fait de gestes, de comportements, de mots – même s'ils ne sont pas éblouissants
– qui suggèrent une quotidienneté proche de la normalité. Ce qui signifie écouter
l'exhortation, impérieuse, à ne pas perdre de vue la personne dans son intégralité
: aucune procédure, aussi parfaite soit-elle, ne pourra se révéler "efficace" si elle
est vidée du "sel" de l'Amour, de cet Amour que chacun de ces malades vous demande,
lorsque vous le regardez dans les yeux. A la fin, le meilleur "bilan" qui viendra
nous enrichir sera leur sourire, la sérénité d'une famille qui voit un être cher
au cœur d'un engrenage complexe auquel, en vertu de sa tâche spécifique, chacun de
nous est appelé à contribuer pour gérer sa vie, de même que le partage, un partage
réel. Dans la pratique, il s'agit d'accueillir les enfants autistes dans les différents
secteurs des activités sociales, éducatives, catéchétiques, liturgiques d'une façon
qui corresponde à leurs capacités relationnelles et y soit proportionnelle. Pour ceux
qui ont reçu le don de la foi, cette solidarité devient présence aimante et proximité
généreuse à celui qui souffre, à l'exemple et à l'imitation de Jésus-Christ, le bon
Samaritain, qui, avec sa passion, sa mort et sa résurrection, a racheté l'humanité.
En cette Année de la Foi, le désir du Conseil pontifical pour les Services
de Santé est de partager avec les personnes qui souffrent à cause de l'autisme, l'espérance
et la certitude qu'avec l'Amour nous pouvons reconnaître le Christ Ressuscité chaque
fois qu'il se fait notre prochain sur le chemin de la vie. Une référence pour nous
sera l'affirmation suivante de Jean-Paul II, auquel nous demandons d'intercéder et
dont nous célébrons précisément aujourd'hui le huitième anniversaire de son retour
à la Maison du Père : "La qualité de la vie au sein d'une communauté se mesure
en grande partie par l'engagement dans l'assistance aux plus faibles et aux personnes
plus indigentes, et dans le respect de leur dignité d'hommes et de femmes. Le monde
des droits ne peut pas être uniquement l'apanage des personnes saines. La personne
atteinte de handicap doit elle aussi être aidée à réaliser toutes ses potentialités
d'ordre physique, psychique et spirituel. Ce n'est que si les droits des plus faibles
sont reconnus qu'une société peut prétendre être fondée sur le droit et la justice”
(Jean-Paul II, Message aux participants au Symposium international sur "Dignité
et droits de la personne atteinte d'un handicap mental", Cité du Vatican, 7-9 janvier
2004, n° 3) Que les mots que le Saint-Père François dans les premiers jours de
son pontificat a prononcés pour manifester sa proximité aux pauvres et aux personnes
souffrantes nous éclairent en permanence : "nous devons tout faire pour garder
vivante dans le monde la soif d'absolu, en ne permettant pas que prévale une vision
de la personne humaine à une seule dimension, selon laquelle l'homme se réduit à ce
qu'il produit et ce qu'il consomme: c'est là l'un des pièges plus dangereux de notre
temps”. Tout en souhaitant une collaboration de tous pour pouvoir répondre
de façon chorale et généreuse aux nombreuses instances qui nous parviennent de nos
frères atteints d'autisme et de leurs famille, je confie leurs souffrances, leurs
joies et leur espérance à la médiation de Marie, Mère du Christ et "Santé des malades"
qui, en se tenant au pied de la Croix, nous a enseigné à nous arrêter près de toutes
les croix de l'Homme d'aujourd'hui (cf. Salvifici Doloris n° 31). Aux personnes
autistes, à leurs familles et à tous ceux qui sont engagés à les servir, je tiens
à redire ma proximité et ma prière et j'envoie mes vœux sincères et affectueux pour
une Pâque sereine et joyeuse, dans la paix du Seigneur Ressuscité.