Catholiques et luthériens vont publier un document commun :"Du conflit à la communion"
Catholiques et luthériens s'apprêtent à publier une déclaration louant la compréhension
mutuelle engrangée "depuis 40 ans", mais leurs chemins continuent de diverger sur
les "questions fondamentales de la vie", a confié à l'AFP le Cardinal Kurt Koch, dans
un entretien exclusif. Le cardinal suisse, président du Conseil pontifical pour la
promotion de l’unité des chrétiens, avait déjà confié en janvier à l’agence catholique
autrichienne « Kathpress » la prochaine parution de cette déclaration conjointe. Il
s’agira en quelque sorte d’un état des lieux du dialogue avec les obstacles, les points
de convergence et les progrès enregistrés, notamment depuis la Déclaration d’Augsbourg
du 31 octobre 1999.
Commun à la Fédération luthérienne mondiale et l'Eglise
catholique, "ce document de 30 pages", intitulé "Du conflit à la communion", "est
maintenant en cours de traduction en différentes langues", a annoncé le Président
du Conseil pontifical pour l'unité des chrétiens. Ce texte devrait être publié dans
les prochains mois. Il est le fruit de 4 années de travail de la Commission bilatérale
pour le dialogue.
L'histoire d'un long dialogue, de ses avancées et des
points de résistance
A quatre ans du 500ème anniversaire de la Réforme
(2017), la déclaration reparcourt un douloureux conflit mais aussi les progrès théologiques
après le Concile Vatican II, a expliqué le prélat suisse, infatigable apôtre depuis
2010 d'un oecuménisme de longue haleine qui ne cherche pas les effets d'annonce.
Dans
cet entretien le Cardinal Kurt Koch dresse le bilan du travail que Benoît XVI lui
a confié et qu'il dit conduire avec "plaisir et patience". "Pas toujours facile" admet-il,
que ce soit avec les protestants ou les orthodoxes. "Je suis heureux, remarque l'ancien
évêque de Bâle, que l'on s'intéresse à ce que l'Eglise fait en matière d'oecuménisme".
Entre
catholiques et protestants, "on avait dit que la foi divise et l'agir unit. Aujourd'hui
on doit affirmer le contraire", explique-t-il. En effet, des reconnaissances théologiques
fondamentales ont été accomplies sans bruit, mais les chemins s'éloignent par exemple
"sur la pratique de la bioéthique". "C'est très fondamental. Pour la voix du christianisme
dans notre société, s'il n'y a pas de communion dans des questions fondamentales de
la vie de l'homme, c'est très difficile", remarque-t-il. Il relève aussi "l'absence
de but commun dans l'oecuménisme": pour les catholiques, l'objectif reste "l'unité
visible dans une Eglise unique "corps du Christ" et pour les protestants, la revendication
est résumée par le "concept de reconnaissance mutuelle".
La question délicate
d'un ordinariat pour les luthériens
Interrogé sur l'hypothèse de proposer
aux luthériens déçus par leur Eglise un "ordinariat" pour rejoindre l'Eglise catholique
(comme cela se fait déjà avec les Anglicans), le Cardinal Koch assure: les propos
à ce sujet du Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, l'archevêque allemand
Gerhard Ludwig Müller, ont été mal interprêtés: "C'est une question concrète qui avait
été posée à l'archevêque Müller, mais ce n'est pas quelque chose qu'il a lancé lui-même.
La question était (de savoir) ce que Rome pense si des demandes similaires à celles
des Anglicans viennent de Luthériens".
La reconnaissance mutuelle du baptême
Un
des progrès concrets enregistrés, selon lui, depuis le Concile est "la reconnaissance
mutuelle du baptême": "ce ne sont pas tous les Eglises qui le font, mais la plupart.
Il y a aussi des Eglises orthodoxes qui n'acceptent pas, qui font un re-baptême".
"L'oecuménisme doit être aussi un oecuménisme baptismal", les deux conditions pour
la reconnaissance universelle d'un baptême étant le symbole de l'eau et le signe trinitaire
("au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit").
Le dialogue avec les orthodoxes
n'est pas facile
Mgr Koch s'est rendu récemment au Caire pour l'intronisation
du nouveau pape copte-orthodoxe Tawadros, et émet l'espoir qu'il pourra un jour venir
rencontrer Benoît XVI. Au Moyen-Orient, note-t-il, "j'ai beaucoup de peine à parler
de printemps arabe, j'ai l'impression que c'est plutôt un automne islamique".
Avec
les quinze Eglises orthodoxes, "le dialogue n'est pas facile", et "la question de
la primauté (du pape) reste la question fondamentale" qui fait problème, admet-il.
Quant à une rencontre du pape avec le patriarche Cyrille de Moscou, "c'est un rêve,
mais les signaux de Moscou ne sont pas évidents" pour pouvoir envisager une rencontre
bientôt. (AFP)