« Ma pensée affectueuse va aux personnes consacrées : puissent-elles suivre le Christ
fidèlement dans la pauvreté, la chasteté, l’obéissance ! » Le Pape a envoyé ce samedi
matin un tweet en 10 langues sur son compte @Pontifex. A 17h30, le Pape présidera
une messe en la basilique Saint-Pierre. Elle sera co-célébrée par le cardinal João
Braz de Aviz, le préfet de la Congrégation des Instituts de Vie consacrée et les sociétés
de Vie apostolique, car chaque année depuis 1997, l’Eglise dédie le 2 février, fête
de la Présentation de l’Enfant Jésus au temple, à la Vie consacrée.
Comme
l'explique la Conférence des évêques de France sur leur site internet, la présentation
de Jésus au temple, consacré selon la prescription rituelle de l'époque au Seigneur
comme tout garçon premier né, annonce le don de Jésus par amour de Dieu et des hommes
et l'offrande suprême de la Croix. Cette journée a donc une importance particulière
pour toute personne consacrée, qui, inspirée par le don bouleversant du Christ, aspire
à son tour à donner sa vie et à tout abandonner pour marcher à sa suite.
Valoriser
la vocation religieuse
A l’origine de cette initiative, Jean Paul II
tenait à « remercier le Seigneur pour le grand don de la vie consacrée, qui enrichit
et réjouit l'Eglise par la multiplicité des charismes et le dévouement de tant de
vies totalement données au Seigneur et aux frères ». Consacré une journée aux personnes
consacrées était également pour ces dernières l’occasion de « célébrer ensemble et
solennellement les merveilles que le Seigneur a accomplies en elles ».
Dans
un contexte de sécularisation en Europe et de crise des vocations, Jean Paul II souhaitait,
grâce à cette initiative, valoriser la vocation religieuse : « en contemplant le don
de la vie consacrée, disait-il alors, l'Eglise contemple sa vocation la plus profonde,
celle de n'appartenir qu'à son Seigneur. La vie consacrée a pour mission prioritaire
de garder vivante dans l'Eglise la forme historique de vie assumée par le Fils de
Dieu quand il est venu sur cette terre ».
Interrogé par Manuella Affejee,
le père Jean-Marie Cabes, Prieur des Fraternités monastiques de Jérusalem à Rome,
nous offre son témoignage
« Au fond,
la vie consacrée, c’est la vie baptismale qui essaie d’aller jusqu’au bout. Une parabole
de vie chrétienne », raconte le père Jean-Marie Cabes qui raconte les signes de sa
vocation : « Il faut avoir rencontré Jésus-Christ et vouloir le suivre. Il faut aimer
le « cœur à cœur » avec le Seigneur ». Il faut avoir sur lui un regard amoureux dans
la prière, mais aussi une disponibilité à le faire rentrer concrètement dans toutes
les dimensions de son existence, en particulier la dimension affective. » Faisant
référence au célibat, le prieur des Fraternités monastiques de Jérusalem à Rome explique
que ce n’est pas très facile, surtout à notre époque, car elle « n’idéalise certainement
pas ce genre de vie ».
Quant à son enracinement spirituel et humain, le père
Cabes dit avoir eu la grâce de recevoir la foi de sa famille et d’une éducation qui
a baigné dans la prière. « Je peux vraiment bénir le Seigneur à mon âge, plus de 60
ans, d’avoir dans des périodes troublées trouvé toujours auprès de moi des amis avec
qui partager sur l’essentiel et se retrouver sur l’essentiel, sinon avec les secousses
que notre génération a connues, j’aurais pu déraper très facilement ». Mais bien sûr,
explique-t-il cet enracinement familial, amical et d’éducation doit être entretenu
par des temps de prières, d’adoration. Le père Cabes souligne également l’importance
des rencontres amicales et fraternelles. Prière et vie fraternelle, comme « une greffe
permanente sur la vie « Jésus, c’est lui qui est l’arbre la vigne sur laquelle nous
sarment nous sommes greffés ».
Pour le père Cabes, la vie religieuse a bien
des points communs avec le mariage. Il explique qu’il faut avoir une « existence ouverte
». « Il faut vraiment s’ingénier à inventer chaque jour du nouveau » avec des « temps
de ressourcements ». S’il est difficile de promettre une fidélité pour toujours, mais
on peut s’engager pour aujourd’hui, affirme-t-il. Ainsi, « chaque jour doit être l’aujourd’hui
du « oui » ». Enfin le religieux souligne que dans un couple comme dans la vie en
communauté, il faut avoir toujours en tête de « saisir les occasions de la joie ».
« Nous pouvons être les uns pour les autres une invitation à la joie, en portant sur
l’autre un regard clair et plein d’espérance ».
Afin de se faire connaître,
de nombreuses communautés ouvriront d’ailleurs leur porte et proposeront des animations
dans leur diocèse ce samedi.
Ci-dessous, le message de la Corref, la
conférence des religieux et religieuses de France pour la Journée de la vie consacrée.
« Dans la lumière du Christ partagée au monde dans la beauté de la communion de
l’Église »
La Fête de la Présentation de Jésus au Temple, le 2 février,
a été choisie par le Pape Jean-Paul II comme un jour de l’année mettant l’accent de
manière particulière, sur la vie consacrée. Quel est donc le rapport entre cette fête
et l’engagement de ces hommes et de ces femmes qui suivent le Christ dans cette vocation
spécifique de la vie consacrée ?
Ce jour porte en Orient, le beau nom
de « Fête de la Rencontre ». En effet en entrant pour la première fois au Temple de
Jérusalem, Jésus encore enfant, est déjà reconnu comme la Lumière du monde rencontrant
l’humanité. C’est bien ce que l’Evangile de saint Jean évoque par ailleurs dans son
Prologue : « le Verbe était la vraie lumière éclairant tout homme, en venant en ce
monde. » Ainsi Jésus rencontre deux vieillards, Siméon et Anne, tout entier dans l’attente
de la venue du Messie ; il rencontre les scribes qui sont subjugués par la pertinence
de ses interventions ; il rencontre le Temple lui-même, ce monument où est manifestée
de manière si puissante la Révélation divine.
Jésus vient : les réalités
anciennes à la rencontre desquelles il se rend, peuvent désormais lui faire place
car tout est juste en lui ; il sera reconnu comme Parole du Père aux affaires duquel
il se doit.
A ce titre, le vieillard Siméon, prenant Jésus dans ses
bras et chantant son Cantique, « Maintenant, ô maître souverain, tu peux laisser ton
Serviteur s’en aller dans la paix, selon ta Parole. » a de quoi impressionner : Siméon
reconnaît la nouveauté radicale de Jésus comme Lumière venant en ce monde et s’efface
pour que s’opère librement sa croissance ici-bas. De même la prophétesse Anne, à plus
de quatre-vingts ans, elle qui passait sa vie dans le Temple, s’effacera aussi. Comme
le dira Jean le Baptiste au sujet du Christ : « Il faut qu’il croisse et que moi,
je diminue. »
Ainsi les religieux et religieuses, les membres des Sociétés
de vie apostolique, des Instituts séculiers, les Vierges et les Veuves consacrées,
pour être vraiment des témoins de l’Evangile, sont invités à une rencontre avec celui
qui se manifeste comme la lumière du monde. Mais loin de l’accaparer pour eux-mêmes,
ils s’effacent et en transmettent la clarté. Cela peut se traduire de bien des manières
mais cette attitude passe toujours par une véritable écoute d’autrui, une obéissance
mutuelle dans l’amour, une joie profonde à recevoir le mystère du Christ au plus intime
de soi-même pour le transmettre au monde ; une forme d’humilité et de simplicité qui
rendent libres de tout repli sur soi, un dépouillement bienheureux pour vivre des
richesses du Royaume.
Ainsi visités au plus profond d’eux-mêmes, ceux
qui ont reçu vocation à mener une vie consacrée dans l’Eglise deviennent réellement
des guetteurs, des passeurs et des éveilleurs. Leur souci n’est plus de préserver
des acquis aussi précieux soient-ils, mais de les transmettre quelle que soit la forme
sous laquelle ils se développeront par la suite. Les anciens résumaient cette disposition
en une belle formule dont ils faisaient vœu : « conversion de sa vie » (conversatio
morum). Oui, c’est bien là que la vie consacrée peut être la plus évangélique et la
plus prophétique : elle permet une rencontre où tout est renversé. L’échelle des valeurs
qu’elle emprunte invite à une dépossession afin de laisser croître en soi, la lumière
du Christ partagée au monde dans la beauté de la communion d’une Église qui avance
à tâtons à la clarté des mille et mille chandelles de l’Amour.
Frère Jean-Pierre
Longeat, président de la Corref
(Photo : des religieux chantant lors de
la messe célébrée le 2 février 2011 en la basilique Saint-Pierre)