La contribution de l’Eglise du Congo-Brazzaville au processus de réconciliation
La République du Congo, plus connue par son appellation de Congo-Brazzaville (pour
la différencier de la République démocratique du Congo) est, parmi les Etats de l’aire
francophone, le 3è à avoir organisé une conférence nationale souveraine. C’était en
février 1991. Tout comme cela fut le cas au Bénin, un an auparavant, et au Gabon,
le Congo fit lui aussi appel à un Evêque catholique pour aider le pays à ressouder
la nation autour des idéaux de paix et de développement.
Ce fut le Jésuite
Ernest Kombo, alors Evêque d’Owando, qui fut choisi pour mener les conférenciers vers
l’élaboration de règles consensuelles pour la nation. Il fut élu président de la Conférence
nationale souveraine et, avec l’approbation de Rome, il fut choisi pour diriger pendant
un an la période intérimaire jusqu’aux élections démocratiques pluralistes qui eurent
lieu en juillet 1992. Ensuite, il s’écarta et retourna à son diocèse d’Owando, pour
vaquer à ses charges plus spécifiquement pastorales. L’expérience, jugée positive
par tous, n’allait pourtant pas de soi !
Le Congo – il s’appelait alors République
populaire du Congo ! - avait fait le choix du marxisme léninisme en 1969. Le parti
unique, le Parti congolais du Travail, avait prééminence sur l’Etat. Il était dirigé
par des idéologues qui ne cachaient pas leur hostilité ou, au moins, leur indifférence
face à la religion. Certains tenants du marxisme officiel avaient même milité pour
l’idée de transformer églises et lieux de catéchisme en salles de cinéma. En 1977,
l’unique cardinal de toute l’histoire du pays, le Cardinal Emile Biayenda, Archevêque
de Brazzaville, fut même assassiné. Entre l’Eglise et l’Etat régnait alors une méfiance
qui, de temps en temps, culminait en violences. Arrestations de prêtres ou de journalistes
catholiques, tortures des hommes d’Eglise, expropriation de terrains, censure sourcilleuse
contre l’unique journal catholique La Semaine Africaine etc… n’étaient pas
rares.
Aussi, l’appel à un Evêque catholique pour « arbitrer » les joutes d’un
forum de communistes, d’anti-communistes ou de communistes réformateurs n’était-il
pas un exerce évident, à peine un peu plus d’un an après la chute du Mur de Berlin
! Mais l’Evêque sut rallier dirigeants et opposants congolais à l’idée que l’action
politique ne pouvait pas se fonder sur l’opposition systématique, ni sur la méfiance
violente ; que la Parole de l’Evangile s’adressait à chacun, quelle que soit sa conviction,
et restait une parole d’apaisement pour tous.
Surtout, Mgr Ernest Kombo toucha
la fibre de toute la Nation congolaise lorsqu’il déclara que, athées ou non, « les
fils d’un même pays peuvent au moins s’accorder suc 3 des 10 Commandements de Dieu
qui ont particulièrement bafouées au Congo : Tu ne mentiras point ! Tu ne voleras
point ! Tu ne tueras point ! ». Une véritable « standing ovation » salua les
propos de l’homme d’Eglise. Le lendemain, les journaux pouvaient titrer : « le
Congo vient enfin de se retrouver en tant que Nation ».
La conduite provisoire
des affaires de l’Etat par un Evêque avisé sut épargner au Congo les violences qui
ont salué un peu partout en Afrique la recomposition du monde post-bipolaire. Monde
politique, société civile et confessions religieuses surent engager un dialogue sans
apriori, et asseoir la paix. De fait, dès que Mgr Ernest Kombo remit le pouvoir aux
politiques, après avoir dirigé les premières élections démocratiques et pluripartites
du pays, le Congo ne tarda pas à plonger dans une première guerre civile (1992). Deux
autres allaient suivre en 1993 et en 1997.
Albert Mianzoukouta, Programme
Français-Afrique (Radio Vatican)