Etats-Unis : l'Etat fédéral peut-il avoir plus de contrôle sur les armes ?
Le massacre de Newton a relancé le débat sur le contrôle de la vente et de la circulation
d’armes à feu. Depuis la fusillade qui s’est produite vendredi dans une école primaire
de cette ville de 27 000 habitants à 100km de New York, plusieurs voix se sont exprimées
en faveur d’une réglementation plus sévère.
En trois jours, près de 160 000
Américains ont signé une pétition demandant au président Barak Obama d’agir sur la
section « We the people » (nous le peuple) du site de la Maison blanche qui permet
aux citoyens de s’adresser directement au président. Cette pétition intitulée « traiter
immédiatement la question du contrôle des armes en introduisant un texte de loi au
Congrès a largement dépassé le seuil des 25 000 signatures. Barak Obama va ainsi devoir
y répondre.
Barak Obama promet de tout faire pour empêcher de nouvelles
tragédies
Dimanche, le président américain s’est rendu auprès des familles
des victimes de la tuerie de Newtown, Il leur a promis de faire « tout ce qui est
en son pouvoir » pour empêcher ce genre de tragédies. Mais dans son discours, aucune
mention du mot « arme ».
Lundi, le porte-parole de M. Obama, Jay Carney,
est resté vague sur les mesures que M. Obama souhaitait voir entrer en vigueur. «
Je n'ai pas de gamme de propositions à vous présenter. Le président a évoqué hier
du mouvement dans les semaines à venir », a-t-il rappelé, en estimant que lutter contre
la prolifération des armes ne constituait qu'une des pistes parmi d'autres face au
problème « complexe » de la violence.
L’Etat fédéral laisse en général le
soin aux Etats de légiférer sur les armes
Dans le camp démocrate, des responsables
ont pressé le président d’agir. Le maire de New York, Michael Bloomberg, a lui aussi
demandé des mesures immédiates. L’influente sénatrice démocrate, Dianne Feinstein,
a proposé dimanche de bannir les fusils d’assaut. Elle a promis des propositions de
loi pour réinstaurer l’interdiction des « armes d’assaut » qui a expiré en 2004, faute
d’un accord au Congrès de l’époque sur cette loi signée en 1994 par Bill Clinton.
Barak Obama en avait d’ailleurs prôné son rétablissement lors de sa campagne présidentielle
en 2008, sans passer à l’action par la suite.
Le président américain voudrait
agir, mais ce sera difficile. D’abord parce que la Chambre des représentants qui prendra
ses fonctions début 2013 sera légèrement plus républicaine que celle qui avait laissé
expirer cette loi sur les armes d’assaut. Ensuite, explique Bernadette Fohran, spécialiste
des Etats-Unis à l’ACAT, il n’en a pas vraiment la possibilité, car ce sont les états
et non l’Etat fédéral qui sont compétents en matière de réglementation des armes.
Bernadette Fohran, spécialiste des Etats-Unis à l’ACAT est interrogée par
Olivier Bonnel
Aujourd’hui,
l’Etat fédéral compte peu de textes contraignants. Votée en 1993, la loi Brady, oblige
les armuriers à vérifier les antécédents criminels et psychiatriques des acheteurs.
Or 40% des ventes ne sont pas concernées par cette loi, car elles se font entre particuliers.
En outre le fichier fédéral d'antécédents comporte des failles. Selon l'association
des "Maires contre les armes illégales" des millions de dossiers sur des personnes
déséquilibrées n'avaient pas été transmis au FBI. Enfin, sur les 50 Etats, 13 ne consultent
que le casier de l'Etat où se trouve le vendeur : des antécédents criminels dans un
autre Etat, ou au niveau fédéral, n'apparaissent donc pas dans le fichier consulté.
La majorité des restrictions sur les ventes d'armes relève aujourd’hui des Etats où
le président américain n’a pas compétence.
Le silence des républicains et
du lobby pro-armes
Trois jours après la fusillade, la majeure partie du
camp républicain, en général favorable à une interprétation généreuse du second amendement
de la Constitution américaine, fait profil bas. La politique de la National Rifle
Association semble être la même. Le puissant lobby pro-arme aux Etats-Unis est resté
silencieux sur les réseaux sociaux. Sa page facebook n’était pas disponible ce lundi
et son compte twitter n’a pas affiché de nouveaux messages depuis le drame de vendredi.
Signalons
enfin, la chute des titres en bourse des fabricants d’armes depuis vendredi. Lundi
soir, l’action de Smith & Wesson et celle de Sturm, Ruger & compagny ont respectivement
perdu 9,33% et 7,81% depuis la clôture de la bourse de New York ce jeudi. Cela ne
devrait pas être trop compromettant pour ces entreprises dont les ventes au dernier
trimestre ont augmenté de plus de 40 %. Entre août et octobre dernier, Smith & Wesson
enregistre ainsi 48% de hausse avec des ventes atteignant un record, plus 136 millions
de dollars.