C’est lundi qu’a été présenté à Rome, le IXe rapport annuel sur les conditions de
détention dans les prisons italiennes. Ce rapport s’accompagne pour la première fois
d’un documentaire Web multimédia, intitulé « inside carceri », à l’intérieur
des prisons. C’est le fruit d’un travail de cinq mois, au cours desquels une équipe
de journalistes a pu enquêter dans vingt-cinq prisons et centres pénitenciers italiens,
filmant et photographiant les cellules, interrogeant les détenus sur un quotidien
carcéral brutal et déshumanisant.
Les précisions de Manuella Affejee
« Sans dignité
» : le nom choisi pour ce rapport est évocateur, et rend compte d’une réalité carcérale
problématique et alarmante en Italie. L’état d’urgence avait pourtant déjà été décrété
le 13 janvier 2010 : le taux de surpeuplement carcéral avait atteint un niveau record
: 142,5%, soit le plus élevé de l’Union européenne. Le gouvernement Berlusconi avait
alors annoncé un nouveau plan d’action prévoyant, entre autres mesures, l’agrandissement
des centres de détention.
Violence carcérale en hausse
Mais la
situation deux ans après, n’a cessé de se dégrader. Le nombre de détenus a augmenté,
-ils sont à présent 66 685-, tandis que les fonds prévus pour les administrations
pénitentiaires, ont, eux, baissé.
Résultat : on manque d’argent pour la manutention
ordinaire des prisons, les bâtiments se délabrent, ferment, et les détenus sont envoyés
dans d’autres centres, déjà surpeuplés. On manque aussi de personnel, de surveillants,
d’éducateurs, d’assistants sociaux, et de professionnels de la réinsertion. Les détenus
sont livrés à eux-mêmes, s’entassant à dix dans des cellules prévues initialement
pour trois ou quatre : cette promiscuité engendre de graves problèmes d’hygiène pour
lesquels les soins de santé dispensés sont loin d’être satisfaisants.
Automutilations
et suicides en hausse
Autre phénomène inquiétant : l’augmentation des violences
de toutes sortes, des détenus entre eux, et des policiers sur les détenus. Plusieurs
témoignages figurant dans ce rapport vont dans ce sens. Parmi eux, la lettre d’un
jeune détenu à son père. Il affirme avoir été battu sans raison par trois surveillants,
et laissé nu et seul dans une cellule. Un autre raconte avoir été battu et laissé
pour mort. Une autre forme de violence en découle, celle des prisonniers sur eux-mêmes
: on recense de plus en plus de cas d’automutilation, et le taux de suicide grimpe
en flèche : l’on compte quarante-sept suicides de prisonniers depuis le début de l’année.