Le procès de la jeune Rimsha Masih touche à sa fin au Pakistan. Arrêtée le 16 août
dernier dans la banlieue d’Islamabad, cette jeune chrétienne handicapée mentale avait
été accusée de blasphème pour avoir brûlé des pages du Coran, puis libérée sous caution
parce que les preuves à sa charge avaient été construites de toutes pièces. La Haute
Cour d'Islamabad a tenu mercredi la dernière audience de la phase du débat, recevant
un mémoire écrit portant les conclusions des deux parties en cause.
Les avocats
de Rimsha ont demandé l'annulation de la plainte (First Information Report) et donc
l'acquittement, réaffirmant que la jeune fille a été mise en cause injustement par
l'imam Khalid Jadoon Chishti. Celui-ci avait été incarcéré début septembre pour complot,
après avoir fabriqué des pièces à charge pour accuser l’adolescente.
Le
solide dossier des avocats de la défense
L'accusation a pour sa part affirmé
que le rapport médical présenté concernant l'état de santé de la jeune fille était
un faux et a cherché à démonter les accusations portées contre l'imam Chishti, présentant
une rétractation des trois témoins. Le juge de la Cour, Iqbal Hamid Khan, a accueilli
les positions des parties, se réservant de décider au fonds.
Répondant à l’agence
Fidès, Le Père Emmanuel Yousaf, président de la Commission Justice et Paix de la Conférence
épiscopale du Pakistan et présent au tribunal, a souligné que « la défense de Rimsha
a présenté une argumentation solide. Nous espérons et nous prions pour son acquittement.
Nous sommes confiants dans le fait que cette affaire tragique se conclura au mieux
et qu'elle pourra servir de leçon à toute la nation sur la manière dont traiter les
faux cas de blasphème ». La sentence devrait être connue dans les tous prochains jours.
L’arrestation de la jeune fille avait provoqué une vague d’indignation internationale.
La loi anti blasphème en question
Cette affaire très médiatisée
ne présage pas en revanche d'une éventuelle remise en question de la loi contre le
blasphème au Pakistan, une loi discriminatoire et vise souvent les minorités et que
de nombreuses voix, dans le pays comme à l'extérieur ont demandé d'abroger. Il est
dans l'intéret de certains groupes radicaux musulmans de maintenir le statu quo. En
effet, si le système judiciaire du pays est capable d’innocenter les personnes faussement
mises en cause pour blasphème, cela signifie pour certains comme le Conseil des Oulémas,
que l’État de droit fonctionne et qu’il n’est nullement nécessaire de réviser ces
lois, nécessaires à la protection du caractère islamique de la nation pakistanaise.
La route est donc encore longue pour les partisans de la liberté religieuse
au Pakistan, d'autant plus que se pose la question de la protection des personnes
inculpées puis relachées. "Si Rimsha est innocentée, il paraît évident que nous allons
devoir trouver un lieu sûr pour elle et sa famille" a expliqué un responsable de la
Pakistan Minorities Alliance. (Avec Fides et Églises d'Asie)