Cardinal Sarah : les réfugiés syriens espèrent que le Saint-Siège intervienne pour
régler le conflit en Syrie
C’est un homme ému qui est revenu du Liban après avoir rendu visite aux réfugiés syriens.
Le cardinal Sarah, président du Conseil pontifical Cor Unum, a passé trois jours au
Liban la semaine dernière. Envoyé en mission par Benoît XVI, il a témoigné auprès
des victimes du conflit qui ensanglante la Syrie depuis un an et demi de la proximité
et de la solidarité du Saint-Siège et de toute l’Eglise catholique.
Le cardinal
Sarah s’est entretenu avec le président de la République libanaise, Michel Sleimane,
avec les évêques maronites du Liban et a présidé une réunion de coordination de l’ensemble
des Caritas du Proche-Orient et de toutes les organisations humanitaires catholiques
présentes au Liban et qui viennent en aide aux dizaines de milliers de personnes qui
fuient les combats et les exactions commises par les deux camps.
Au-delà de
l’aspect proprement technique de sa visite, le président de Cor Unum a pu se rendre
compte par lui-même des dures conditions de vie des réfugiés. Il s’est rendu dans
la plaine de la Bekaa, dans l’est du pays, non loin de la frontière syrienne, pour
visiter plusieurs camps dont l’existence n’est pas reconnue officiellement par le
gouvernement libanais. Là, il a rencontré de nombreuses femmes et leurs enfants mais
très peu d’hommes, ces derniers étant restés en Syrie, « soit pour garder la maison
soit parce qu’ils sont engagés dans la guerre », précise le cardinal.
«
Vous me traitez en être humain »
« Voir cette foule de personnes sans eau,
sans électricité, sans hygiène, avec l’approche de l’hiver - il commence déjà à faire
froid - la pluie, cela était émouvant », raconte le cardinal Sarah qui salue le travail
« extraordinaire » mené par Caritas Liban dans ces conditions matérielles et climatiques
difficiles.
« J’ai été ému par une dame dans un camp qui venait d’avoir son
enfant il y a quatre mois. Elle m’a dit : « prenez le pour le sauver de cette situation
». Mais comment prendre un enfant de quatre mois ? ». Le cardinal a également été
touché par une autre femme, une musulmane, qui s’est mise à pleurer à son approche.
« Pourquoi pleures-tu ? » lui a demandé l’envoyé du Pape. « Voyez-vous, lui a-t-elle
répondu, vous me traitez comme un être humain, je retrouve ma dignité que je n’ai
pas dans ma communauté religieuse ».
Visiblement touché par ces histoires
individuelles révélatrices du drame que vivent les Syriens depuis plus d’un an et
demi, le cardinal Sarah révèle le sens de l’aide que l’Eglise catholique procure à
ces réfugiés. Il ne s’agit pas seulement d’aide humanitaire au sens strict du terme,
il s’agit aussi de considérer chacune de ces personnes éprouvées par les événements
en tant qu’individus ayant une dignité inaliénable.
L’Eglise attendue pour
régler le conflit
Lors de son voyage, le cardinal Sarah a pu constater
que l’implication de l’Eglise est souhaitée. « Les autorités pensent que le Saint-Siège
pourrait étudier la possibilité de faire arrêter cette guerre. Le Saint-Père a une
voix qui a une autorité sur le plan international et probablement son intervention,
ces appels auprès des grandes puissances pourraient être entendus » affirme le président
de Cor Unum.
Concernant la création le weekend dernier à Doha au Qatar d’une
nouvelle instance représentative de l’opposition syrienne, regroupant tous les opposants,
CNS compris, le cardinal Sarah espère qu’elle « pourra peut-être faciliter une négociation
parce que jusqu’à présent on ne savait pas avec qui s’asseoir ». « C’est en tout cas
une situation nouvelle mais je ne sais pas si nous nous acheminons vraiment vers la
pacification du pays ». Pessimiste, le cardinal met en avant le fait que Bachar al-Assad,
le président syrien, a rappelé vendredi dernier dans une interview à une télévision
russe, qu’il mourrait en Syrie, sous-entendant qu’il ne lâcherait pas le pouvoir.
En attendant, les réfugiés syriens tentent de retrouver un minimum de dignité en même
temps qu’ils fuient la mort et la destruction.
Le cardinal Sarah au micro
de Xavier Sartre
(Photo : le
cardinal Sarah, président de Cor Unum)