Mgr Mamberti s'exprime sur la violence criminelle contemporaine
Mgr Dominique Mamberti, Secrétaire du Vatican pour les Relations avec les Etats est
intervenu ce lundi à la 81ème Session de l’Assemblée générale d’Interpol, réunie sur
le thème « la police face aux défis de la violence criminelle contemporaine ». Soulignant
combien « au cours des dernières décennies, le phénomène criminel a connu un essor
conséquent tant du point de vue quantitatif que du point de vue de la violence de
ses manifestations, l’agressivité et l’atrocité des épisodes s’aggravant dangereusement
», Mgr Mamberti reconnaissait que « les activités criminelles s’articulent à un niveau
désormais planétaire, avec des systèmes de coordination et selon des pactes criminels
qui dépassent les frontières des États. »
La mondialisation est arrivée
à modeler la vie criminelle
« Des moyens techniques sophistiqués, des ressources
financières considérables, quelquefois d’obscures complicités politiques sont autant
d’éléments qui concourent à fournir un appui délétère à des formes organisées de violence
extrême. En même temps, le développement des institutions démocratiques a permis d’affiner
les techniques de protection de la liberté des individus et les modalités d’un usage
proportionné et responsable de la force publique. Malgré cela, il reste toujours une
marge de vulnérabilité devant la criminalité la plus atroce dont les manifestations
remettent en cause les bases mêmes de la cohabitation civile, en attaquant l’échelle
des valeurs sur lesquelles les institutions de l’État moderne sont fondées. »
Prévenir
vaut mieux que guérir, avec un regard de vérité sur l’homme.
Mgr Mamberti
a insisté sur la prévention que doivent mettre en place les pouvoirs publics. Si ces-derniers
n’étaient plus en mesure d’agir de façon préventive dans cette direction, ils verraient
par là même s’affaiblir leur propre légitimité. Mais attention : « L’autorité publique
tire nécessairement sa propre vitalité et son autorité d’une constante référence à
un ordre éthique objectif. Quand l’autorité perd le crédit et la confiance des citoyens
et s’appuie seulement sur le formalisme juridique, sur la simple application des règles,
sans un regard de vérité sur l’homme, cette autorité devient un géant aux pieds d’argile.
»
Les conditions d’un état de droit
Pour que l’état de droit
soit en vigueur, il faut que soient réunies, dans un ensemble harmonieux, un certain
nombre de conditions : des normes constitutionnelles précises concernant la séparation
des pouvoirs et les compétences des divers organes, la transparence des actes de gouvernement,
le contrôle juridictionnel exercé par une magistrature indépendante, mais aussi l’existence
de voix diverses capables de s’exprimer librement dans l’espace public. Le but est
que, en droit comme en fait, toutes les personnes physiques, les institutions publiques
et privées, les États et les Organisations internationales soient soumis à la loi,
une loi qui doit être « juste et équitable ».
La valeur transcendante de
l’homme pour une véritable justice
Au-delà du formalisme, la substance
du droit est la justice, ou plutôt ce qui est juste. Aujourd’hui, il n’est pas toujours
facile de déterminer quelle est la chose juste, en vue d’établir la norme de droit
positif. La Déclaration des Droits de l’homme nous offre une référence importante
pour délimiter ce qui est juste, mais elle n’est pas suffisante. La valeur transcendante
de la dignité humaine, enracinée dans la nature même de l’homme et accessible à la
raison droite, offre au droit un fondement de stabilité sûre, parce que correspondant
à la vérité de l’homme créé par Dieu, et elle permet en même temps que l’état de droit
puisse poursuivre son véritable but, qui est la promotion du bien commun. Si, en effet,
manque cette référence fondamentale, se créent des risques de déséquilibre : même
l’affirmation de l’égalité devant la loi peut servir d’alibi à des discriminations
flagrantes et, d’autre part, une affirmation excessive de l’égalité peut donner lieu
à un individualisme où chacun revendique ses droits, sans se vouloir responsable du
bien commun.
Collaboration entre le pouvoir répressif et les citoyens
La
lutte contre toute forme de violence, surtout celle qui se manifeste avec le plus
de brutalité, suppose le devoir moral de contribuer à réaliser les conditions pour
que celle-ci ne puisse ni naître ni se développer. Ceux qui opèrent au sein des institutions
de sécurité publique, comme les forces de police que vous représentez, sont conscients
que les premiers anticorps à toute forme de criminalité sont justement les citoyens
de chaque pays. C’est dans l’alliance et dans la solidarité entre les citoyens et
les forces de l’ordre que se réalise le meilleur bastion de résistance à la criminalité.
Créer
les conditions pour une société harmonieuse
Parmi les actions les plus
efficaces pour créer un contexte social ordonné au bien commun, figure l’élimination
des causes qui provoquent et alimentent des situations d’injustice. Dans ce domaine,
Mgr Mamberti rappelle « qu’un rôle fondamental et préventif doit être reconnu à l’éducation
inspirée par le respect de la vie humaine en toute circonstance. Sans elle, il est
impossible en effet de réaliser un tissu social fort et uni sur les valeurs fondamentales,
capable de résister aux provocations de l’extrême violence. »
En ce sens, le
lieu primordial où l’homme se construit est la famille. En son sein, les enfants expérimentent
la valeur de leur propre dignité transcendante, parce qu’accueillis dans la gratuité
prévenante de l’amour réciproque et stable des époux. En son sein, sont pratiquées
les premières formes de justice et de pardon, ciment des relations intrafamiliales
et base d’une insertion correcte dans la vie sociale.
Le criminel reste
une personne
Le criminel, « quelle que soit la gravité des délits commis,
demeure toujours une personne humaine, dotée de droits et de devoirs. Ainsi l’Etat
« devra dans tous les cas s’abstenir de la pratique des mauvais traitements et des
tortures et assurer la sauvegarde des libertés fondamentales dont jouit toute personne.
»