La cause désespérée de 170 indiens Guarani-Kaiowa au Brésil
Sommés par la justice brésilienne de quitter des terres qu’ils occupent au nom du
"droit ancestral", 170 indiens Guarani-Kaiowa se disent prêts à "mourir collectivement".
L’information a fait le tour des réseaux sociaux au Brésil. "Nous demandons au gouvernement
et la justice fédérale de ne pas décréter un ordre d’expulsion, mais de décréter notre
mort collective. Nous demandons, une fois pour toutes, de décréter notre extinction
définitive et de nous envoyer des bulldozers pour creuser un grand trou afin d’y enterrer
nos corps. C’est cela que nous demandons aux juges fédéraux".
La constitution
ignorée par la justice
Ces quelques phrases sont extraites d’une lettre
ouverte qu’un groupe de 170 indiens Guarani-Kaiowa a adressé, le 8 octobre 2012, au
Conseil Indigéniste missionnaire (CIMI), de la Conférence épiscopale brésilienne.
Le courrier évoque la situation dramatique de 50 hommes, 50 femmes et 70 enfants,
sommés par la Justice fédérale de quitter les quelques centaines d’hectares de terres
qu’ils occupent, arguant qu’il s’agit là des terres de leurs ancêtres. Ces indiens
vivent sur les rives d’une rivière traversant la commune d’Iguatemi, dans l’état du
Mato Grosso do Sul, au nord-ouest du Brésil. Ce droit est reconnu par la Constitution
brésilienne de 1988 mais manifestement pas par la Justice brésilienne.
"Mort
collective, pas suicide collectif"
La décision est définitive: "Nous ne
sortirons pas de nos terres: ni vivants, ni morts". Conscients qu’ils n’obtiendront
pas d’accès légal à leur terre, ils se disent prêts à être "décimés et à entrer dans
le cimetière de leurs ancêtres". Par le biais d’un suicide collectif?
"Contrairement
à ce qui est relayé sur les réseaux sociaux, il n’y a aucune mention de menace de
suicide collectif, mais bien de mort collective". La nuance est de taille, tient à
préciser le service communication du CIMI. Et de préciser que cette détermination
des Guarani-Kaiowa s’inscrit "dans un contexte de lutte pour la terre, que ce soit
face aux menaces quotidiennes des pistoleiros engagés par les grands propriétaires
terriens ou d’éventuelles forces de l’ordre qui seraient envoyées par la justice fédérale
pour faire appliquer ces décisions".
Plus de 500 suicides en sept ans
Reste
que le suicide, surtout chez les jeunes, est un thème récurrent depuis plus d’une
décennie dans la vie des Guarani-Kaiowa. Entre 2003 et 2010, le CIMI a dénombré pas
moins de 555 suicides au sein de ces tribus. Motif? Confinement, manque de perspectives,
violences aiguës et diverses, éloignement des terres, modes de vie traditionnels et
vie dans des campements souvent au bord de routes. Il faut dire que depuis 1991, seulement
huit territoires ont été homologués et attribuées à ces tribus indigènes au Brésil.
Elles représentent pourtant 43’000 personnes. (Apic)