Le gouvernement français se penche sur la question des Roms
Bruxelles attend de la France des « mesures concrètes et des financements précis »
pour améliorer le sort des Roms. Début août, elle avait placé l’hexagone sous surveillance
et rappelé à Paris la nécessité du respect des garanties contre les expulsions arbitraires
et les traitements discriminatoires après deux démantèlements de camp illégaux à Lille
et Lyon au nord et au sud-est du pays. Des dizaines de familles Roms avaient alors
été privées de logement. Certains ont accepté une aide au retour volontaire, soit
300 euros par adulte et 100 euros par enfant accompagnant, et sont donc repartis vers
leur pays d’origine, principalement la Roumanie.
Le chef de l'exécutif français,
Jean-Marc Ayrault, s’est dit «favorable à une évolution» des mesures transitoires
de l’Union européenne qui restreignent jusqu'à fin 2013 l’accès au marché du travail
des ressortissants de Roumanie et de Bulgarie d’où viennent en majorité les Roms.
Ce
mercredi après-midi, le Premier ministre a réuni autour de lui plusieurs ministres
dont ceux de l’Intérieur et du Logement, afin d’aborder et d’examiner le sort des
Roms vivant en France, soit 15 000 à 20 000 citoyens européens. Jean-Marc Ayrault
recevra également des associations.
Le collectif Romeurope juge qu’une « politique
durable reste à construire » et qu’aujourd’hui les démantèlements sans solutions de
relogement sont « inefficaces ».
Comment gérer la situation des Roms quand
on est de gauche ? C'est tout le dilemme du gouvernement Hollande. Martine Puzin est
présidente de l’association La Pierre Blanche, à Lille. Tous les jours, elle essaye
d’intégrer des familles roms dans la société et elle regarde l’action du gouvernement
avec beaucoup de prudence. Ecoutez ses explications :
Il y a deux
ans, la situation des gens du voyage était déjà au cœur de l’actualité en France.
Le président de l’époque, Nicolas Sarkozy, avait annoncé en juillet 2010 que les camps
illégaux de Roms seraient démantelés et que « certains criminels d'origine étrangère
seraient déchus de leur nationalité française », créant ainsi un lien entre immigration
et insécurité.
En France, ces propos avaient suscité de nombreuses critiques
de la gauche qui était dans l’opposition, mais aussi de quelques responsables de droite.
A l'étranger, des dirigeants roumains et du Conseil de l'Europe s'étaient également
montrés critiques.
Accueillir les hommes de toutes origines
L’Eglise
était elle aussi intervenue dans le débat de manière plus ou moins directe. Le 22
août 2010, le Pape avait appelé les pèlerins français venus à Castelgandolfo pour
l’Angélus, à accueillir les hommes de toutes origines, affirmant : « les textes liturgiques
de ce jour nous redisent que tous les hommes sont appelés au salut. C’est aussi une
invitation à savoir accueillir les légitimes diversités humaines, à la suite de Jésus
venu rassembler les hommes de toute nation et de toute langue ». Le Pape avaient également
invité les parents à éduquer leurs enfants à la fraternité universelle :
Toujours au
Vatican, quelques jours avant lui, le secrétaire du Conseil pontifical pour les migrants
et les gens du voyage de l’époque, Agostino Marchetto, avait déclaré qu’il y avait
« un principe de proportionnalité dans les réactions qu'on peut avoir vis-à-vis des
délinquants. On ne peut pas généraliser et prendre tout un groupe de personnes et
les expulser. La responsabilité est personnelle, elle n'est pas collective ».
Des
discours sécuritaires « inacceptables »
En France, l'archevêque d'Aix-en-Provence
et d'Arles, Mgr Christophe Dufour, avait assisté à un démantèlement de camp. Sans
mettre en cause les forces de police qui «obéissent aux ordres », il avait demandé
dans un communiqué « le respect des personnes et de leur dignité », soulignant que
« les discours sécuritaires qui peuvent laisser entendre qu'il y a des populations
inférieures sont inacceptables. Ces personnes, citoyens européens, vivent pour la
plupart paisiblement ici ».
Enfin, le père Arthur, un prêtre de Lille qui défend
les Roms depuis des années avait écrit au ministre de l’Intérieur pour refuser, en
signe de protestation, la médaille de l’Ordre national du Mérite qui lui avait été
attribuée.
Deux ans plus tard, début août, le père Arthur a assisté une nouvelle
fois au démantèlement d’un camp situé non loin de sa paroisse de Lille. Il avait fait
part de son sentiment à Radio Vatican :
Propos recueillis
par Justine Vassogne et Nadège Decremps.