2012-01-10 12:36:41

2011 : une année pas comme les autres en Afrique !


Il y aurait beaucoup à dire du bilan de l’année 2011 en Afrique. Mais cela ne se réduira pas en une récitation des préjugés de toujours, même si les thèmes récurrents de la guerre, de la famine et de la pauvreté ont aussi eu des raisons d’être évoquées et vécus l’an dernier. Ouverte dans le sang avec le massacre des chrétiens coptes d’Alexandrie, en Egypte le 1er janvier, l’année 2011 s’est aussi achevée par des marques de haine violente contre les chrétiens. Au Nigéria, en effet, le 25 décembre a été une Noël de sang après l’attaque d’églises dans plusieurs villes faisant de nombreux morts.

Sur une logique semblable de début et de fin, la politique elle aussi n’a pas été en reste. 2011 s’était en effet ouverte avec le prolongement sanglant d’un conflit de contestation électorale en Côte d’Ivoire ; elle s’est achevée avec une autre contestation électorale, ayant fait des morts aussi, en République démocratique du Congo. De l’Ouest au Centre du continent, pourrait-on dire, a couru la même ligne de continuité. Le prétexte serait tout trouvé chez beaucoup pour confirmer l’Afrique dans les recoins de l’histoire et de l’y condamner à jamais.

Pourtant aussi bien au plan religieux qu’au plan politique, c’est aussi une Afrique surprenante qui s’est révélée au monde l’an dernier. C’est un continent à la recherche de soi-même et des meilleures formes de son propre développement qui a émergé, ne serait-ce que le temps d’une nouvelle de premier plan ; ne serait-ce que dans une partie seulement et pas sur l’ensemble d’un continent où pourtant vivent des hommes et des femmes aux aspirations normales d’hommes et de femmes de leur temps.


Au plan religieux donc, d’abord. Si l’Eglise a toujours été aux côtés de l’Afrique, 2011 l’a confirmée dans un rôle noble, le Pape Benoît XVI s’étant fait plus qu’un avocat de cette «terre d’espérance» ! Comment oublier l’émouvante visite pastorale au Bénin où, du 18 au 20 novembre, il est allé à la rencontre de l’Eglise d’Afrique, lui a remis le fruit des réflexions émergées de son deuxième synode au Vatican en 2009, et a rendu un hommage vibrant à un digne fils de l’Afrique, le cardinal défunt Bernardin Gantin, son ami et défunt collègue d’origine béninoise ! Aux journalistes le Pape a expliqué les autres raisons de son 2è voyage africain.

«La première [raison], le Bénin est un pays en paix, en paix extérieure et intérieure. Il y a des institutions démocratiques qui fonctionnent, qui sont réalisées dans l’esprit de liberté et responsabilité, et donc la justice et le travail pour le bien commun sont possibles et garantis par le fonctionnement des institutions démocratiques et le sens des responsabilités dans la liberté. La 2° raison, est qu’il y a, comme dans la majeure partie des pays africains, une présence des différentes religions et une [coexistence] pacifique des religions. Il y a les chrétiens dans leur diversité - pas facile toujours, il y a les musulmans, il y a finalement les religions traditionnelles, toutes les 3 religions, différentes, vivent ensemble dans le respect réciproque et dans la commune responsabilité pour la paix, pour la réconciliation intérieure et extérieure».

Il fallait sans doute la personnalité du Pape pour prendre les commentateurs de l’actualité par la main et les amener à constater que l’Afrique ne se réduit pas, en 2011 plus que jamais, en guerres ataviques et conflits sanglants ! Qu’au plan politique même, les «titubages» ne doivent pas masquer les cas éclatants d’alternance démocratique, d’organisation impeccable d’élections et des majorités acceptées et assumées sans heurts par les nations. Le cas d’Alpha Condé en Guinée-Conakry : il remporte les élections de novembre dans un pays longtemps sous la férule des militaires, et introduit la Guinée dans l’année nouvelle avec des espérances certaines. Le cas du Cap Vert qui, le 6 février, organise des élections impeccables qui voient la victoire du PAICV (Partis Africain pour l’Indépendance du Cap-Vert). La Zambie, en septembre etc…

Au plan formel, l’année 2011 a été littéralement une année pas comme les autres : 28 pays ont organisé des consultations électorales. L’année a aussi vu la naissance, le 9 juillet, du 54è Etat africain : le Sud-Soudan. Et c’est aussi l’année de ce mouvement qui a secoué la planète, retenu sous le nom de «Printemps Arabe». La face des pays arabes d’Afrique d’abord, puis du reste du monde ensuite, en a été bouleversée. La Tunisie, l’Egypte, la Libye, le Maroc, l’Algérie ont vu changer des dirigeants en apparence inamovibles. Ou bien ces pays ont été, sous la poussée d’une opinion jusque-là négligée, obligés de revoir leurs bases constitutionnels, la répartition des pouvoirs et les agendas politiques.

Même au plan économique, avec une croissance établie par la Banque Mondiale à 6%, l’Afrique a été dynamique en 2011. Le dire, ce n’est pas céder à un quelconque chauvinisme même si le continent continue malgré tout de peiner à traduire la santé des seuls chiffres en bien-être de ses populations. Sans doute faut-il laisser encore au Pape, le soin de formuler les vœux les meilleurs pour ce continent. 2011 a été aussi, ne l’oublions pas, l’année où deux femmes africaines, toutes deux originaires du Libéria, ont été récompenser du Prix Nobel de la Paix ! Alors, que souhaiter pour 2012 ? Sans doute, devrions-nous transformer en vœu pressant, l’adresse du Pape aux membres du gouvernement du Bénin, lors de ce fabuleux voyage.

«Lorsque je dis que l’Afrique est le continent de l’espérance, je ne fais pas de la rhétorique facile, mais j’exprime tout simplement une conviction personnelle, qui est également celle de l’Église. (…) Ces derniers mois, de nombreux peuples ont manifesté leur désir de liberté, leur besoin de sécurité matérielle, et leur volonté de vivre harmonieusement dans la différence des ethnies et des religions. Un nouvel État est même né sur votre continent. (...) De cette tribune, je lance un appel à tous les responsables politiques et économiques des pays africains et du reste du monde. Ne privez pas vos peuples de l’espérance ! Ne les amputez pas de leur avenir en mutilant leur présent !»

Par Albert Mianzoukouta (Programme Français Afrique)







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