Le NEPAD, un plan de développement de l’Afrique, par les Africains
Les plans de développement ne se comptent plus en cinquante ans d’indépendance de
la plupart des pays du continent. Tous, pour la plupart, sont le fait d’une poignée
de pays et inspirés par le seul souci commun d’un bien-être économique, sans bases
sociales solides.
Mais depuis 2001 on parle de NEPAD, Nouveau partenariat
pour le développement de l’Afrique, né de la volonté de la classe politique postindépendance
et postapartheid africaine de promouvoir une vision d’ensemble dans la renaissance
globale et « faire de l’Afrique le continent du XXI è siècle », pour reprendre les
propos de Nelson Mandela.
Au-delà des définitions d’un NEPAD trop souvent erronément
présenté comme un plan de développement économique – et seulement ! -, ce partenariat
a été élaboré pour prolonger dans ses objectifs le programme d’intégration et de développement
durable de Cheik Anta Diop[1]. Il est le résultat d’une réflexion africaine, murie
en quarante ans de recherches et d’interrogations, à travers toutes les phases de
la quête d’affirmation du continent. Si dans les années 1960 les centres d’intérêt
de la classe politique africaine tournaient autour de la lutte d’indépendance, quelques
années plus tard, l’indépendance conquise, c’était au souci de consolider la construction
continentale que se consacraient les dirigeants. Puis vinrent les préoccupations économiques.
Le
NEPAD sera donc la jonction de deux programmes lancés, l’un par le Sénégal (Plan Omega)
et l’autre par les pays surtout anglophones, Afrique du Sud et Nigéria en tête : c’est
le MAP (Millenium Partnership for African Ricovery Programme). Le nouveau partenariat
de 2001 naît de ces visions, menées à leur phase de fusion au sommet de Lusaka par
la défunte Organisation de l’Unité africaine, OUA. Il entendait traduire dans les
faits, proclament ses promoteurs, une promesse de la classe politique africaine d’aboutir
à « une vision à long terme du développement de l’Afrique par l’Afrique elle-même
». C’est un plan d’action.
Faire croître le PIB à un taux de 7%, réduire la
pauvreté, réaliser la parité entre hommes et femmes, réduire du quart le taux de mortalité
maternelle et infantile, garantir à tous l’accès aux soins de santé et engager partout,
au plan régional, des plans de développement durable : le NEPAD était – il est – porteur
d’une ambition continentale réelle, innovante à bien des égards. D’autant que, pour
mettre tout cela en œuvre, deux points fondamentaux étaient insérés dans ce vaste
plan : un secrétariat continental pour sa mise en œuvre (siégeant en Afrique du Sud)
et un accent fortement porté sur la fin préalable des conflits.
« L’expérience,
peut-on lire dans le préambule du document consignant cette « feuille de route »,
a enseigné aux gouvernants africains que la paix, la sécurité, la démocratie, la bonne
gouvernance, le respect des droits de l’homme ainsi qu’une correcte gestion de l’économie
constituent les présupposés nécessaires d’un développement durable ». Vision se projetant
sur l’avenir, le NEPAD était donc aussi, sans complaisance, un bilan d’étape scrutant
les errements du passé et le côté obscur d’une marche qui n’a pas eu que les seuls
colonialismes à blâmer.
Et en tant que partenariat, le NEPAD, entend aussi
s’appuyer sur les organismes multisectoriels (OMC, Banque Mondiale, FMI et toute la
famille des agences de l’ONU) pour aboutir enfin à la réalisation d’une ambition qui,
une fois n’est pas coutume, n’est plus imposée mais librement déterminée par les Africains
eux-mêmes et conduite avec les moyens qu’ils se donnent, les partenaires extérieurs
venant seulement concourir à l’atteinte de ce qui n’est pas à portée naturelle du
continent. Nous consacrerons des éditoriaux aux autres volets du NEPAD.
Nous
en verrons les lumières et les ombres, tracerons en quelque sorte le bilan de ce qui
a été fait et de ce qui reste à faire. Infrastructures, intégrations régionales, agriculture,
démocratie, communication etc… sont autant de chantiers qui attendent de recevoir
la réponse adéquate pour une Afrique vraiment insérée dans son temps.
(Par
Filomeno Lopes, du Programme portugais pour l’Afrique).
***
[1] Voir Fondements culturels, techniques et industriels d’un futur
Etat fédéral d’Afrique noire, 1960 et repris par Edem Kodjo dans Et demain l’Afrique,
1985.